Ça faisait longtemps que je l’attendais, ce concert. Même si ce n’était pas la première fois que je les voyais. Ni la deuxième. Ni la troisième pour tous vous dire. Pourtant, je ne suis pas une inconditionnelle de ce groupe. Et même, à chaque fois, j’en ressortais un peu déçue.
Ce n’étaient pas les mêmes conditions, aussi. Deux gros festivals : Rock en Seine (2010 et 2013), et Garorock (2013). Outsiders sur la Cascade en 2010, juste en face de Cypress Hill et Blink 182, chauffeurs de salle en 2013 avant Nine Inch Nails et Phoenix à Rock En Seine, et l’inconnu de la soirée à Garorock. Les gens n’étaient, pour la plupart, pas ici pour les voir eux, spécialement eux … et ça se ressentait. D’où des concerts en dents de scie, qui finissent par lasser.
J’attendais donc ce concert au Krakatoa avec une impatience non dissimulée. Si bien que j’en parlais partout. Et donc ce 5 Février arrive.
20h20 : le premier groupe, Dead Combo, est déjà sur scène, pour fignoler les balances. Manque de bol, l’ingé son n’était pas là. Et pour occuper le temps, quoi de mieux que de dire des conneries avec le public et d’aller demander à l’un d’entre nous d’aller commander des bières pour eux. C’est à cette occasion que l’on a appris qu’ils n’étaient pas ce célèbre groupe portugais, également nommé Dead Combo, qui faisait des reprises de country. Et ça, on a pu vite s’en rendre compte. Leur show, reposant uniquement sur une guitare, une basse et des beats électroniques, n’est pas avare en décibels. Du gros rock bien lourd, bien saturé, mais qui tourne rapidement en rond. Malgré ça, les gars ne se prennent pas la tête, se font plaisir, et nos oreilles se réchauffent.
Puis vient le tour des Kid Karate. Ils sont deux, ils sont jeunes, ils sont Irlandais et ils envoient du gros son. Par contre, ils ne parlent pas bien le français. Mais ça, on leur pardonne. Leur fougue aura eu davantage raison du public, qui s’est montré plus enthousiaste que pour le groupe précédent. Ils offrent un set énergique, frais et saturé. Pourtant, l’impression générale que tout cela m’a laissé, c’est celle d’un petit groupe à peine sorti du lycée, qui a trop écouté les Blink 182, Green Day et tout le reste, sans y apporter beaucoup d’originalité. Trop propre peut-être. Mais ils sont jeunes, et on entendra sûrement parler d’eux dans quelques années.
La salle est maintenant pleine. Pleine de blousons en cuir et de tatouages. La moyenne d’âge ? On doit approcher des 35. C’est que les Black Rebel Motorcycle Club ne sont pas des petits nouveaux : 15 ans qu’ils officient dans le rock blues hypnotique. Sur ce créneau, ils sont nombreux, mais seuls quelques uns subsistent. De ces fameux artistes auxquels on a attribué, au début des années 2000, le renouveau du rock (les Kings Of Leon et Strokes, pour ne citer qu’eux), ils sont les moins connus. Pourtant, ils remplissent les salles. Rock’n Roll.
Le groupe arrive sur scène. Le mercure grimpe. Le set commence sous les plus fervants applaudissements (ça faisait longtemps que je n’avais pas entendu pareille clameur). La basse de "Hate The Taste" commence à résonner … et le public reprend les paroles. Pas de doute : ça va être un bon concert. Puis, cadeau divin, cet enchaînement avec un "Beat The Devil’s Tatoo" grandiose, la reprise de papa "Let The Day Begin" (originellement par The Call, le groupe de Robert the bassiste’s dad) et "Rival". Une explosion de gros riffs en pleine figure. Sur scène, le groupe fait magnifiquement le job, réglés comme du papier à musique. Et là me vient cette réflexion : devant 15 000 personnes, BRMC, c’est bien. Mais devant 1000 personnes, BRMC, c’est encore mieux. Malgré la puissance de leurs compositions, elles ne prennent leur envol qu’en salle, devant une audience chauffée à bloc.
Les chansons et les riffs toxiques s’enchaînent, et … c’est le drame. La très belle "Returning" casse l’ambiance. Volontairement, sûrement. C’est que ça avait commencé très fort. Seulement, en chemin, ces ballades et les chansons un peu trop similaires (sans parler de "Lose Yourself " très U2) en auront perdu quelques uns. Le même schéma que lors des festivals se reproduit. Vers le milieu du set, tu t’emmerdes. Pourtant, la qualité est là, ils maîtrisent totalement le truc … Mais ils ne te captivent plus.
Jusqu’à ce que "Conscience Killer" ne rapplique. Le rock reprend ses droits. Ouf, on est sauvés. La batterie se refait massive, la basse collante, la guitare lacérante. Après un "Spread Your Love" interminablement jouissif, le groupe quitte la scène, pour mieux revenir pour un rappel … en acoustique. Problème : le public crie trop fort, et les empêche de s’entendre. Harmonicas, guitares, un micro les séparant, les voilà repartis. "Complicated Situation", "Shuffle Your Feet" se suivent, le calme avant la dernière tempête nommée "Whatever Happen To My Rock’nRoll" et "Sell It".
Comment résumer le concert ? Crade, puissant, hypnotisant, juste de bout en bout … Près de deux heures d’un véritable exutoire pour des oreilles qui avaient un peu oublié ce qu’était le rock. Si on chipote, on pourrait leur reprocher leur manque de spontanéité, notamment dans la gestuelle. Tout est calibré, mais si bien calibré qu’on oublie et on se laisse aller à secouer la tête pour les uns, pogoter pour les autres, profiter pour tous.