genre: drame
année: 1965
durée: 2h05
l'histoire: Hector Valentin revient dans ses Vosges natales hériter de la scierie familiale. Il embauche plusieurs repris de justice sans se soucier de Therraz, l'homme fort de la vallée.
la critique d'Alice In Oliver:
On a souvent tendance à l'oublier, mais Bourvil n'a pas joué que des rôles comiques (souvent l'idiot et/ou le bénêt du village) au cinéma. L'acteur sait aussi composer des personnages dramatiques et/ou plus complexes. C'est par exemple le cas dans La Traversée de Paris, Les Misérables, Fortunat, L'Arbre de Noël, Le Cercle Rouge et Les Grandes Gueules, réalisé par Robert Enrico en 1965.
En dehors de Bourvil, le film réunit également Lino Ventura, Jean-Claude Rolland, Jess Hahn, Marie Dubois, Michel Constantin et Paul Crauchet.
Sous ses airs de film populaire qui passe régulièrement sur nos chaînes, Les Grandes Gueules est rarement cité parmi les références du cinéma français. Pourtant, il s'agit bel et bien d'un classique de notre cinéma hexagonal et d'un film plus complexe qu'il n'y paraît.
Finalement, ce drame humain s'apparente bel et bien à une sorte de western moderne avec son lot de personnages marginaux et solitaires. Aussi est-il nécessaire de rappeler les grandes lignes du scénario. Attention, SPOILERS ! Hector Valentin, un Français qui vit depuis plusieurs années au Canada, apprend par son notaire qu'il vient d'hériter d'une scierie dans les Vosges.
De retour en France, il constate avec dépit que le « haut-fer » est en ruine, mais décide de faire revivre l'entreprise. Cependant, une autre scierie existe déjà dans le village, et son propriétaire, Therraz, heureux de la disparition de son concurrent, se présente à Valentin dans le but de lui acheter son héritage. Devant le refus de vendre et la détermination du nouveau venu, Therraz n'aura de cesse de mettre des bâtons dans les roues de Valentin. Lors d'une vente aux enchères, ce dernier est repéré par Laurent et Mick, deux anciens détenus venus accomplir une vengeance.
Ces derniers comprennent assez vite la situation de Valentin : un repreneur à la tête d'une scierie en ruine, sans employé fiable et essuyant les coups d'une concurrence déloyale.
Laurent lui propose alors d'embaucher des détenus en liberté conditionnelle en guise de main-d'œuvre. Valentin hésite jusqu'à ce que Laurent lui révèle son passé. Les anciens détenus sont alors engagés dans la scierie, lui donnant l'air d'un camp de travailleurs truculents.
Devant les provocations, Valentin et Laurent répondent coup pour coup. Laurent demande alors à son patron d'insister pour qu'un de ses amis détenus puisse les rejoindre, un certain Reichmann (pour lui l'homme à abattre). Peu à peu, Laurent met en place son dessein.
Le scénario des Grandes Gueules se concentre sur un duo atypique, à savoir Bourvil et Lino Ventura, deux hommes avec des caractères totalement opposés.
Encore une fois, impossible de ne pas voir dans ce drame un hommage appuyé au western. La loi terrible de l'Ouest se retrouve transposé au beau milieu de nulle part dans les Vosges. Cette fois-ci, on ne se bat pas pour de l'or mais pour l'industrie et le marché du bois.
Le scénario oppose un modeste patron d'entreprise, Hector Valentin (Bourvil), à un grand concurrent. Le scénario propose une nouvelle fois un combat entre David et Goliath. Sauf que cette fois, c'est Goliath qui gagne et (hélas) haut la main. Tout comme les grands westerns, Les Grandes Gueules se concentre sur plusieurs personnages atypiques, entre autres, des anciens détenus.
Dans cette histoire, chaque personnage poursuit ses propres intérêts. Personne n'est vraiment honnête, sauf Bourvil qui incarne un petit patron dépassé par les événements, mais néanmoins déterminé. C'est indéniablement lui la vedette du film et le personnage le plus émouvant.
Quant à Lino Ventura, l'acteur est égal à lui-même et livre à nouveau une belle prestation. En l'occurrence, l'acteur interprète un "salaud", tout du moins, un personnage qui agit avant tout pour lui et non pas par amitié. Mais peu à peu, chacun des personnages dévoilera son vrai visage. Ce qui aura évidemment des conséquences sur l'entreprise du bon (trop bon) Hector Valentin.
Finalement, Les Grandes Gueules nous parle déjà de la dure loi du marché et du capitalisme, mais sur la forme d'un drame, qui prend souvent les allures d'un western et parfois d'une comédie populaire (comme je l'ai déjà souligné dans le second chapitre).
A priori sans prétention, Les Grandes Gueules se révèle beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît (je sais, je me répète) et contient son lot de rebondissements et de révélations, qui finiront par dépasser les principaux protagonistes de l'histoire. Encore une fois, Bourvil livre une composition étonnante et atteint son paroxysme dans les dernières minutes du film. Bref, Les Grandes Gueules a bien mérité son statut de classique du cinéma français.
note: 16.5/20