ONEGUINE
De John Cranko
Ballet en trois actes
D’après le roman d’Alexandre Pouchkine
L’ARGUMENT
Le ballet Eugène Onéguine est tiré de l’œuvre de Pouchkine qui fit du muscadin une sorte de figure nationale. L’argument pose l’histoire d’une incompréhension amoureuse entre un dandy pétersbourgeois et Tatiana, amoureuse trop vite éprise , de lettres échangées, de revirements et de palinodies, d’un aveu venu trop tôt …L’indécision dure et c’est le drame … Insoutenable légèreté de l’être : Eugène tue en duel son ami Lenski .
Peu importe de savoir si les arrangements musicaux de l’Opéra de Tchaïkovski sont légitimes ou pas (la musique du ballet n’est pas celle du chef d’œuvre lyrique) ils collent par leur diversité à la chorégraphie et permettent un canevas souple et efficace. La baguette de James Tuggle enchantera mélomanes et exégètes pointilleux.
Les magnifiques « pas de deux » que le chorégraphe sud africain John Cranko, aimé de Béjart et découvreur de talents aussi immenses que ceux de John Neumaier ou Kiry Jilian fonctionnent à cœur ouvert. Nous sommes au seuil de la modernité chorégraphique, un mélange de rigueur classique et de d’affolement de la norme. C’est sublime comme une valse folle lors d’un bal chez le Prince Grémine. La musique de Tchaïkovski est merveilleuse (nul ne le contestera même la russie homophobe qui l’utilise pour la cérémonie des JO).
La bonne surprise de la soirée c’est la présence de Karl Paquette ambivalent magnifique qui incarne le dandy avec une prestance tragique et inquiétante.
Ce qui n’était pas aisé après que Nicolas Le Riche ou Hervé Moreau aient dynamité le rôle. Entre ses bras, Ludmila Pagliero au style lent(elle aussi rude challenge après Ciaravola), génie de la déconstruction, comme en apesanteur mais aussi capable de déclencher la foudre, tantôt décomposant le mouvement pareil à un Muybrigde chorégraphe, tantôt striant l’espace de mouvements vifs et précis. C’est un grand bonheur de voir danser ces étoiles. Pagliero, comme en suspension, comme au ralenti, Paquette qui intériorise sa torture et ses doutes mais le temps d’un pas de deux , la fièvre monte, la foudre frappe. Hallucinants pas de deux par ce duo de faux lents , de faux calmes…
A leurs côtés , ça brûle les planches : Charline Giezendanner (à peine sujet) papillonne espiègle avec une grâce fragile aux bras d’un Matthias Heymann (Lenski déchirant) remarquable lui aussi, dans les décors discrètement romantiques russes de Jürgen Rose . Sae Eun Park récemment nommée Première danseuse piétine avec légèreté…et tous les autres danseurs, bien sûr, bien sûr…
Entré au répertoire en juillet 2009
CHOREGRAPHIE de John Cranko
MUSIQUE DE PIOTR-ILLYTCH TCHAIKOVSKI
(extraits d’opéras et de pièces pour piano)
Direction musicale de James Tuggle
OPÉRA GARNIER jusqu’au 5 mars 2014