L'entrepreneuriat social semble bénéficier d'une réelle vague d'adhésion, mais encore faut-il se rappeler que l'entrepreneuriat social a bien une visée... entrepreneuriale.
Si l'entrepreneuriat social est protéiforme, il n'en est cependant pas cantonné qu'à certains secteurs spécifiques et démontre au sens économique une volonté d'entreprendre, de s'intégrer dans un marché pour y répondre. A l'occasion de la conférence "Innovez, devenez entrepreneur social" organisée dans le cadre du Salon des Entrepreneurs qui se tenait à Paris, nous avons eu l'occasion de revenir aux fondements de ce phénomène. Que ce soit avec la légalisation de la Responsabilité Sociale des Entreprises ou avec l'évolution des associations vers un modèle inspiré de l'efficience entrepreneuriale, il semble ainsi que les modèles se recroisent.
Sortir du manichéisme
Il est particulièrement difficile de vouloir parler de l'entrepreneuriat social sans tomber dans un certain angélisme. De fait la plupart des entreprises qui ont suivi ce modèle se sont emparées de secteur de marché, et surtout de secteur de la population, particulièrement délaissée dans le système économique existant. Cependant, et Charles-Edouard Vincent, président d'Emmaüs Défi l'a intelligemment relevé lors de la conférence "Il faut sortir du manichéisme, savoir s'il y a des bons, les entreprises sociales, et des mauvais, les entreprises classiques à but capitalistique." Celui-ci a ainsi expliqué que son travail de préparation à la réinsertion, entrepreneuriat social, ne pouvait s'exprimer ensuite que dans la coopération avec des groupes à visée capitalistique qui acceptent d'engager les personnes ayant bénéficié du programme. La remarque de l'ancien polytechnicien est apparue particulièrement pertinente à la lumière des autres invités. Si ceux-ci servent tous un but social, le caractère très différent de leur activité, depuis la coopérative alimentaire biologique pour Biocoop ou les activités physiques et artistiques pour patients avec l'Effet Papillon, rappelle ainsi que l'entrepreneuriat social est un modèle économique et peut dès lors s'appliquer à n'importe quel secteur.
Un véritable modèle économique
Ainsi, l'entrepreneuriat social n'est ni un service public ni une association, même si celui-ci en revêt quelques unes des plus importantes caractéristiques en matière de théorie économique. A l'image de ce que disait Charles-Edouard Vincent, l'entreprenariat social ne peut fonctionner que sur la coopération avec le reste des acteurs économiques. En effet, leur business model est basé sur la monétarisation des externalités positives, qui sont normalement offertes, comme l'infrastructure hydraulique par exemple, par l'Etat. Dans l'exemple de l'Effet Papillon, la dirigeante Mélanie Peron a de cette façon, pointé les économies importantes engendrées par les institutions médicales. "Un patient stimulé est moins déprimé, consomme moins de médicaments, guérit plus vite, et plus largement améliore l'efficacité de l'écosystème de soins." explique-t-elle. Cependant, si l'entrepreneuriat social bénéficie bien des avantages de l'entrepreneuriat, il en subit aussi les difficultés. Comme le rappelle Jean-Marc Maury, Directeur département développement économique et économie sociale et solidaire à la Caisse des Dépôts : "Le social ne légitime en rien l'amateurisme, et au contraire demande une double compétence afin d'être viable, l'efficience économique et la dimension sociétale."