Les miracles, vous y croyez ? Moi, pas trop… Et pourtant, il semble qu’il y en ait… Et notamment à l'Atelier, un centre associatif qui recueille les âmes en peine. Paumés, déprimés, angoissés, rejetés de toutes sortes y sont les bienvenus et seront entourés et remis sur pied.
C’est là-bas que vont se rencontrer trois personnages qui n’auraient jamais dû se croiser. Mariette est prof d’histoire-géo et n’en peut plus de son boulot, des élèves, de l’école où elle enseigne. Il faut dire qu’elle est mariée à un pervers narcissique, politicien de surcroit, qui fait tout pour l’enfoncer, la rabaisser. Et un beau jour, elle craque et envoie valser un élève dans l’escalier. Elle doit s’arrêter de travailler.
Millie est jeune, et seule. Très seule même. Et quand un soir son immeuble se met à brûler, elle se jette dans le vide, un vide pas pire que celui dans lequel elle évolue chaque jour de sa vie.
Quant à Michel, il vit dans la rue après avoir déserté de l’armée. Pas vraiment malheureux, avec la bière pour compagne depuis que sa copine l'a plaqué. Mais la rue a ses dangers et un jour il est passé à tabac parce qu’il a pris le porche qu’un autre reluquait.
Trois personnes aussi différentes que possible, qui n’ont rien de commun ni dans le caractère ni dans leur passé, mais qui vont faire connaissance et petit à petit se rapprocher sous la houlette de Jean, le créateur de l’Atelier. Jean qui est vu presque comme un saint, un sauveur. Qui redonne espoir et courage, qui aide, mais aussi rudoie un peu pour qu’on se bouge les fesses. Ange gardien tombé du ciel au moment opportun, il donne sans compter de son temps et de son énergie. Gratuitement. Enfin, pas si gratuitement que ça, en fait…
Le lecteur ressentira aussi sans doute l’envie d’aider ces pauvres gens, de tendre lui aussi la main pour les sortir de leurs problèmes, mais cette envie que j’ai éprouvée au début m’est passée au fil de ma lecture, pour finalement me dire ensuite que chacun pouvait se débrouiller tout seul. Ils y arrivent d’ailleurs très bien du moment qu’ils ont retrouvé l’impulsion qui fait avancer et se battre. Et puis, même bien avant la fin du roman, je n’ai pas aimé Jean et c’est tout à fait le genre de personnes que je fuis dans la réalité. Dégoulinant de bons sentiments, adulé de tous, affable et sûr de lui, et pourtant qui cache sa part d’ombre comme tout un chacun, sauf que lui la cache bien. Trop bien pour être honnête à mon goût, ce qui me donne toujours envie de chercher la petite bête qui gratte et de titiller jusqu’à ce qu’elle sorte de son trou, afin que le côté obscur apparaisse au grand jour…Mon avis sur ce roman est un peu ambivalent. J’ai bien aimé dans l’ensemble, avec quelques pages que j’ai trouvées absolument magnifiques, écrites avec une extrême sensibilité et beaucoup de finesse, et des descriptions de personnages terriblement humains qui m’ont vraiment émue, voir remuée, comme Mariette par exemple. Mais sans doute est-ce dû au fait que les pervers narcissiques me fascinent autant qu’ils me dégoutent et que le sujet m’intéresse depuis de longues années. Et par ailleurs, parfois, ça tombe. Comment dire, on a l’impression que certains passages sont « moins bien », moins travaillés, plus hâtifs, moins profonds ou construits. D’où un avis qui oscille suivant les passages du roman...
Il faut cependant donner un bon point à ce roman choral, qui donne tour à tour la parole à chacun des personnages. On y apprend (au cas où certains ne le savaient pas déjà) qu’on ne construit rien, et surtout re-construit rien sans avoir fait table rase, sans affronter la vérité, les peurs, les problèmes et leurs conséquences. Et puis c'est une jolie raison d’espérer, avec la solidarité et l’entraide qui au final, aideront ces trois êtres perdus à reprendre pied dans leur vie, même si on se rend compte que même dans l'entraide, il y a parfois du calcul d'intérêt.
Je me pencherai en tout cas très probablement sur le prochain roman de Valérie Tong Cuong, que j’ai de plus rencontrée dans au salon du livre de Bondues et qui avait été si charmante que je n’avais pas hésité à acheter son roman… (alors que j'avais pris de radicales résolutions palesques).