Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, je laisse la plume à quelqu’un d’autre, à ma copine Zab en l’occurrence. Je lui ai laissé carte blanche et n’ai qu’à peine relu son texte et choisi les photos…
Je vous propose aujourd’hui de (re)découvrir un joyau du gothique rayonnant situé au cœur de l’île de la Cité : la Sainte-Chapelle. Comme tout monument visité par les touristes en visite à Paris, je suis sûre que bon nombre de lecteurs d’Artetvia n’y sont pas allés depuis longtemps (un peu comme la Tour Eiffel ou l’Arc de Triomphe) même s’ils y passent à proximité régulièrement.
Un peu d’histoire…
Entre 1242 et 1248, la Sainte-Chapelle est édifiée selon le vœu de Louis IX (futur Saint Louis) pour y conserver les reliques de la Passion du Christ. Implantée dans l’enceinte du Palais de la Cité, siège du souverain et de son administration, elle a un caractère éminemment politique, au-delà de son premier but qui est spirituel : le roi y rappelle sa double fonction, il est le chef temporel de son peuple mais a aussi un rôle spirituel, en tant qu’oint du Seigneur.
C’est une immense fortune que le pieux roi a du dépenser pour obtenir quelques unes des plus précieuses reliques du christianisme. Une somme dépassant largement le coût de la construction de l’édifice lui même !
Ainsi la Sainte-Chapelle, archétype de l’art gothique monumental est d’abord et avant tout une chapelle reliquaire et non seulement une chapelle palatine (une chapelle de château quoi !) comportant une chapelle basse pour le culte public et une chapelle haute pour le souverain. Bien qu’édifiée en sept ans, ce qui est très court pour l’époque, aucun défauts de construction n’ont été relevés, et la décoration a immédiatement été soignée.
La chapelle basse
La chapelle haute
Par un escalier étroit on accède à la chapelle du Haut. A cet instant, on reste subjugué : sculptures et verrières se complètent pour glorifier la passion du Christ. On accède à la Jérusalem céleste, baignée de lumière et de couleurs.
Prenons un exemple pour montrer la précision avec laquelle l’Histoire Sainte est racontée dans ces vitraux. Regardons de plus près les quarante panneaux illustrant l’histoire de Judith et les circonstances qui l’amènent à assassiner Holopherne. Nabuchodonosor a envoyé Holopherne châtier les peuples de l’ouest parce qu’ils ont refusé de le soutenir dans la guerre. Après avoir pillé, tué et ravagé dans tout le Proche-Orient, Holopherne assiège Béthulie, qui barre un passage dans les montagnes de Judée. Comme l’eau vient à manquer, les habitants sont sur le point de se rendre, mais une jeune veuve, Judith d’une extraordinaire beauté et d’une richesse considérable, prend la décision de sauver la ville. Avec sa servante et des cruches de vin elle pénètre dans le camp d’Holopherne ; ce dernier est immédiatement ensorcelé par la beauté et l’intelligence de cette femme. Mais elle l’enivre et, quand il est hors d’état de se défendre, elle le décapite avec l’aide de sa servante et revient à Béthulie avec la tête. Quand les soldats découvrent au matin leur chef assassiné, ils sont pris de panique et s’enfuient. Tous ces épisodes sont racontés sur le vitrail !
Tous les vitraux étaient en place dès l’origine, mais beaucoup ont été reconstruits au milieu du XIXème siècle, dans un parfait respect de l’iconographie et du style d’origine.
Le reliquaire
La grande Châsse contenant les reliques de la passion du Christ était jadis exposée sur la tribune. La châsse était un coffre-fort d’orfèvrerie de 2,70 m de large, avec deux vantaux extérieurs s’ouvrant à l’arrière, et deux vantaux intérieurs en treillis comme seconde protection. Le roi portait les dix clés sur lui-même en permanence, et ne les confiait qu’à des personnes de confiance.
La révolution française sonne la fin du reliquaire de la Sainte-Chapelle. La grande chasse est fondue par les révolutionnaires en 1791 et les reliques sont transportées à la basilique saint Denis. Aujourd’hui, les reliques sont conservées dans le trésor de la cathédrale Notre-Dame et exposée chaque premier vendredi du mois et vendredis de carême.
Honnêtement, la visite de ce monument historique vaut le coup. Malgré l’affluence, parfois gênante, il faut prendre le temps d’observer les détails de cette cathédrale de lumière et d’y apprécier l’harmonie des couleurs aussi bien que la hardiesse de sa construction, tout en se rappelant les raisons pour lesquelles elle a été construite. C’est beau et émouvant !
Addendum (il y a décidément beaucoup d’addendum à la fin des articles d’Artetvia, c’est plutôt bon signe, cela veut dire que ses lecteurs y portent un minimum d’intérêt) : un fidèle lecteur me signale le rôle irremplaçable des chevaliers du Saint-Sépulcre dans la garde des reliques de la Sainte-Chapelle : http://www.notredamedeparis.fr/spip.php?article157)