"La silencieuse" d'Ariane SCHREDER est un roman sur l'intime de la vie au féminin.Clara est sculpteur. Elle se laisse bercer par le quotidien, des sculptures, comme des mobiles, créées dans un atelier, des marionnettes pour accompagner Barnabé dans le théâtre pour enfants. Puis Barnabé part. Elle ne peut pas rester sur Paris, elle fuit à la campagne. Pour un an tout au plus.Dans cette maison louée, elle peut enfin rester sans parler. Parce qu'elle ne sait pas s'exprimer, les mots sont coincés dans sa gorge depuis quelques temps déjà.
Elle est encore inachevée."La plupart des pierres sont rudimentaires. Mal dégrossies, inachevées. Abandonnées pour d'autres pierres ou d'autres routes. Interrompues par la mort. Plus émouvantes encore que celles dont la dentelure est parfaite, trésors rescapés et rates. Des pièces de musées. Elles se repèrent à leur éclat sous le soleil. Il est interdit de les ramasser. Tant pis. Je les vole quand même. Mes pochent ne suffisent pas toujours."
Les promenades au bord du fleuve avec la chienne des voisins lui apporte réconfort. Elle se construit aussi avec la rencontre des villageois: Omar le taiseux et son couscous hebdomadaire pour apprendre à dire non parce qu'elle a le choix, l'Adorateur et ses retranchements pour profiter des petits riens, Ameline la pharmacienne qui s'ennuie en campagne et les choix de vie d'une femme, mais aussi la cousine adorée Lise et Julie, cette nièce au début de sa vie de femme. Tous vont l'aider à se positionner par leurs choix propres.Et puis la vie reprend son cours, elle apprend le lâcher prise. Des question sur l'art, entre débat sur la forme, l'épaisseur, avec Jean ARP, et Alberto GIACOMETTI, qui peuvent aussi être des réflexions sur la vie.
Clara a besoin de prendre de l'épaisseur, du poids, de la consistance. Ces sculptures évanescentes sont plus marquées quand elles représentent des personnes réelles. Elle même doit se façonner pour ne pas devenir folle pour ne pas s'enliser dans une maison comme la Robinsonne. Il ne manque plus que l'intervention d'un chaton pour bousculer la vie, lui rendre de la folie, de la spontanéité, des craintes et des joies.
Lily vous livre un très beau billet ici et Mirontaine accentue encore l'envie de savourer là.