Qui fait et défait la loi dans la République ?

Publié le 05 février 2014 par Charlesf

D’usurpation en triangulation, les défilants de «jour de colère» autant que ceux de la «manif pour tous» en viennent à utiliser les slogans de mai 68 (ici  ou ) qu’ils récusent pourtant, et notamment celui réclamant l’impossible au nom d’un réalisme de circonstance ! !?


Madrid, au jour le jour

Tout débat devient impossible puisque le sens de tout argument est éteint sous un flot d’inepties et de mauvaise foi partagées au nom de la survie d’un capitalisme inique à œillères en guise de bonnet d’âne.
«La colère des imbéciles m'a toujours rempli de tristesse, mais aujourd'hui elle m'épouvanterait plutôt (notait Georges Bernanos 1938). Le monde entier retentit de cette colère. Que voulez-vous ? Ils ne demandaient pas mieux que de ne rien comprendre, et même ils se mettaient à plusieurs pour ça…» Cette réflexion est à transcrire au présent.


Communiqué LDH ...

Ainsi donc, la « Manif pour tous les intégristes » a gagné. La promesse faite en 2012, les amendements présentés par les députés socialistes lors de la loi sur le mariage instituant l’égalité d’accès à la PMA, l’engagement qui leur avait été fait que ce que l’on bloquait alors serait repris en 2014 dans la loi sur la famille… Tout cela est passé à la trappe.

Comme il y a dix ans, le ministre de l’Intérieur est Premier ministre, ministre de la Famille, ministre de la Justice, auto-investi du pouvoir de définir le « destin » des Roms, des étrangers, des homosexuels, de déclencher des censures a priori, etc.

Ainsi donc, le reste du gouvernement ne sert à rien. Le Parlement ne sert à rien. Les associations porteuses d’égalité des droits, la « société civile », dont on nous rebat les oreilles quand cela peut servir la communication électoraliste, tous ceux qui connaissent l’état réel de la société quant aux rapports familiaux, aux droits et à l’intérêt réel des enfants, eux non plus ne servent à rien.

Quel gâchis démocratique ! Aujourd’hui comme hier, le mélange d’astuce et d’inaction est un double message que ses auteurs ne sont pas en état de maîtriser. Aux manifestants d’extrême droite et de droite extrême, que l’on croit naïvement « apaiser », on montre « ce qui paie » : à quand les mobilisations des « familles » sur la « fin de vie », contre l’avortement, pour une Europe à la Mariano Rajoy ? Et message non moins redoutable, pour toutes celles et tous ceux qui avaient entendu « le changement, c’est maintenant » : citoyens électeurs qui vous imaginiez souverains, députés qui vous imaginiez législateurs, voyez comme le vrai pouvoir, qui est ailleurs, est capable de faire très vite ce qu’il n’avait pas dit, et d’oublier très vite de faire ce qu’il avait promis.

Avec cette combinaison d’impuissance et de reculade face aux forces les plus régressives, avec une forme d’autoritarisme face au Parlement et un mépris des engagements pris, c’est l’effectivité de la démocratie qui est gravement compromise. Et l’on peut craindre que ceux qui ont fait ce pas de clerc ne soient pas les seuls à en payer le prix.

La Ligue des droits de l’Homme, solidaire de tous ceux et toutes celles qui continuent à faire avancer l’égalité des droits, appelle les citoyennes et les citoyens à continuer à construire ensemble un avenir qui n’est ni dans le rétroviseur ni dans l’immobilisme.

Paris, le 4 février 2014