Des tumeurs du foie chez des souris exposées au bisphénol A (BPA) in utero et durant l’allaitement, c’est la constatation de chercheurs de l’Université du Michigan. Les conclusions, à paraître dans la revue Environmental Health Perspectives, montrent également un effet dose dépendant, plus les mères sont exposées, plus le risque de tumeur est élevé.
Le bisphénol A, ou BPA, est un produit chimique couramment utilisé dans les matières plastiques, les reçus de caisse et le revêtement de boîtes de conserve et autres contenants alimentaires. Des études ont estimé qu’au moins 90% de la population présentent des niveaux décelables de BPA dans le corps.
Les chercheurs ont nourri durant 6 semaines des souris femelles avec une dose de BPA avant l’accouplement, puis tout au long de la grossesse et l’allaitement. Ils ont ensuite pris un mâle et une femelle de chaque portée et les ont suivis jusqu’à 10 mois. Leur étude montre que 23% des souris exposées par l’alimentation de leur mère, à la plus élevée des 3 doses testées de BPA, ont développé des tumeurs du foie et des lésions précancéreuses. Plus la dose est importante, plus l’incidence des tumeurs est élevée : ainsi les souris dont les mères ont reçu la dose la plus élevée soit 50 mg de BPA par kg de nourriture ont un risque multiplié par 7 de tumeurs du foie que les souris de mères non exposées (OR : 7.23).
· Ce développement tumoral est identique quel que soit le sexe- alors que les femelles sont normalement à risque moindre de développement spontané du cancer du foie.
· Enfin, il est lié non à une exposition directe mais indirecte via la mère.
La recherche se poursuit : L’étape suivante est de rechercher chez des souris exposées via leur mère, des biomarqueurs génétiques ou épigénétiques qui pourraient signaler de manière précoce le risque de cancer, puis d’identifier les biomarqueurs équivalents chez l’Homme. La même équipe avait trouvé, lors d’une précédente étude, du BPA dans les tissus du foie de fœtus humain,- ce qui suggère l’importance de l’exposition in utero- ainsi qu’une concentration élevée de formes conjuguées libres (non métabolisées) de BPA- ce qui suggère une capacité moindre chez le fœtus à éliminer les substances toxiques.
C’est l’une des premières études à rapporter une association statistiquement significative entre l’exposition au BPA et des tumeurs cancéreuses, dans n’importe quel organe. Elle suggère que l’exposition précoce au BPA pourrait aussi avoir des conséquences pour la santé humaine.
D’autant que les effets indésirables probables sur le foie font déjà partie des dernières conclusions de l’Agence européenne de sécurité sanitaire (EFSA) sur les effets liés à l’exposition au BPA. L’EFSA vient tout juste de recommander dans l’attente des résultats de l’évaluation américaine en cours, de diviser par 10 la dose journalière tolérable (DJT).
Source: Environ Health Perspect 4 Feb, 2014 DOI:10.1289/ehp.1307449 Dose-Dependent Incidence of Hepatic Tumors in Adult Mice following Perinatal Exposure to Bisphenol A