Au café cet après midi, tranquille,
assise à une table de 4 personnes,
il fait chaud, il est 16 heures,
le dimanche est languide, bleu, intérieur
Je suis à ma table
je lis le journal distraitement, un rayon de soleil me caresse la manche
Un couple à côté de moi attire mon attention
La femme, une brune, a une mine basse
on dirait qu'elle pique du museau
l'homme, un blond d'une cinquantaine, pas mal,
lui parle à voix basse
Tout ce qui se dit à voix basse attire mon oreille
Il dit : " les séparations, c'est un moment difficile,
celui qui part perd tout,
il faut le savoir."
"Moi, quand je suis parti, je n'avais qu'un sac.
j'ai tout laissé et presque rien récupéré."
Je sens qu'il veut la prévenir de ce qu'il l'attend,
quand on part, on part léger
on renonce au confort, on file vers le vide, le blanc
C'est la moindre des choses, non.
Elle ne dit rien, son grand nez se rapproche du bois de la table,
je pressens qu'elle est juste avant le départ.
Ca me rappelle quand je suis partie,
un samedi, avec un sac à l'épaule
Je m'en souviens comme si c'était hier
Cette impression grisante et désespérée
de partir sans savoir où l'on va,
avec le visage déformé au dessus de soi de celui qu'on laisse
et qui plane, comme une sanction,
comme un cauchemar
Donnez moi une chose qui n'est pas difficile
Même le plaisir.