Par Jean-Baptiste Noé.
C’est la fête des chandelles et l’on risque fort d’en voir de toutes les couleurs. Trente-six chandelles qui tournent au-dessus d’un pays groggy, comme après avoir reçu de violentes châtaignes. Trente-six chandelles qui n’éclairent pas le chemin des réformes, d’un pays qui semble se fourvoyer depuis 36 ans dans les impasses d’une omnipotence de l’État.
Heureusement, les chandelles peuvent devenir fête, et cela donne la Chandeleur, la festa candelarum, cette fête de la lumière qui se tient chaque année le 2 février. C’est en 472 que le pape Gélase 1er fixe la fête de la Purification au Temple au 2 février, soit 40 jours après Noël. À l’origine, c’est un rite juif qui demande aux femmes qui viennent d’accoucher de se purifier pendant sept jours, puis d’attendre 33 jours avant d’aller au Temple. 33 et 7 faisant 40, ce qui correspond aussi aux 40 années passées par les Hébreux dans le désert avant d’atteindre la Terre promise. Le 2 février, 40 jours après Noël, nous commémorons donc la purification de Marie au Temple de Jérusalem. Purification qui se dit februare en latin, d’où le nom du mois de février. L’Évangile de Luc raconte comment Marie et Joseph se sont rendus au Temple pour y offrir un couple de tourterelles, selon la tradition juive, et comment ils reçurent la prophétie du vieillard Siméon : « un glaive transpercera ton cœur », annonce de la mort de Jésus sur la croix.
Le jour de la Présentation est donc une fête de la lumière. Dans nos contrées occidentales, on constate que les jours ont rallongé, que la nuit a reculé, le matin comme le soir. C’est cette lumière qui est associée au Christ, « lumière des nations », et à la chandelle, dont la symbolique est double : la flamme évoque la nature divine du Christ, et la cire sa nature humaine. Voici expliqué le mystère de l’homme Dieu.
En revanche, l’Évangile de Luc ne nous parle pas des traditions populaires liées à la Chandeleur, ni des crêpes que l’on y consomme. Février, c’est le retour de la vie, de la sève dans les arbres, l’hiver touche à sa fin. Les trois premiers jours de février sont consacrés aux saintes patronnes du lait : Brigitte, Ella et Agathe. Ce lait qui évoque à la fois la pureté et l’enfance, les gâteaux, le chocolat chaud que l’on buvait étant petit, le sein maternel auquel l’enfant est venu boire. Le lait pur, par antonyme avec le lait frelaté de la mauvaise doctrine.
Avec le lait, on peut aussi faire des crêpes, ces belles crêpes que les Bretons font sauter dans leur casserole. Pourquoi des crêpes ? Les historiens se perdent en conjecture, même si plusieurs pistes peuvent être concomitantes. L’homophonie d’abord, crispus étant proche de christus. La forme aussi : le rond de la crêpe évoque la perfection, le soleil, rappelé par la coloration brune du dessert. Encore une fois, gastronomie et religion se marient. Pour respecter la tradition de la France rurale, on place deux crêpes de la Chandeleur en haut d’une armoire jusqu’à l’année suivante, pour apporter fécondité et richesse à la famille. Encore une fois, gastronomie et superstition sont liées. Et comme dit nos bons proverbes, que ne renierait pas le 13h de TF1 : « S’il pleut à la Chandeleur, les vaches auront beaucoup de beurre » et « À la Chandeleur, l’hiver cesse ou reprend vigueur. »
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