J'emploie le verbe "jouer" à dessein car c'est bien davantage qu'une chorégraphie que nous avons sous les yeux. Vous pourrez en goûter un aperçu dans l'extrait que j'inclus dans l'article.
Nous sommes dans la pénombre presque tout le long du spectacle. Les jeux de lumières sont très étudiés pour nous maintenir dans l'intime tout en provoquant des images proches de l'illusion. On assiste, médusés, à l'invention du mouvement immobile.
Cet homme en blanc, allongé dans le noir, sur les barreaux d'une prison imaginaire, à moins que ce ne soit les lignes d'un espace peint par Buren, est d'abord collé au sol.
Il est raide comme une momie, mais son coeur pulse encore.
Il deviendra insecte, se métamorphosera en aiguilles d'horloge ... c'est fou tout ce qu'on peut faire en restant cloué au sol. Ce "on" est abusif, je vous l'accorde, parce qu'il faut le corps en caoutchouc de Pierre Rigal pour y parvenir.
Avec lui le mot chorégraphie prend tout son sens : son corps écrit, trace, dessine ... et ses vêtements participent étrangement aussi à la calligraphie.
Il est la pièce majeure d'un plateau de jeu où la lumière ne parvient pas à le mettre en échec. S'il se réduit progressivement par le fait d'un trompe l'oeil quasi hypnotique c'est pour mieux renaitre ensuite.
Il vole sous la neige. Il flotte en lévitation. Que la lumière soit blanche, bleue ou rouge, elle caresse une sorte d'Ovni philosophique teintée de science-fiction qui se déroule comme un rêve.
Ce sont 45 minutes d'émerveillement à suivre les évolutions de
Pierre Rigal, à la fois artiste et athlète (avec notamment à son actif des performances en 400 mètres et 400 mètres haies). Le Théâtre du Rond-Point lui a consacré en 2012 un festival : "Rigal dans tous les sens".Érection
L'univers d'Aurélien Bory est bien présent. On retrouve l'illusion qui avait imprégné Géométrie de caoutchouc, le spectacle inaugural du Pôle Cirque d'Antony (92) il y a trois ans, et auquel avait participé Pierre Rigal.
ErectionConception, chorégraphie, vidéo et interprétation Pierre RigalConception et mise en scène Aurélien BoryAu Théâtre du Rond-Point, en salle Jean Tardieu (176 places)2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris9 janvier – 1er février 2014, à 20h30dimanche à 15h30 - relâche les lundis et les 19 et 26 janvierReprésentation supplémentaire le samedi 1er février 17h30