Retour sur une loi adoptée en 2013 dans la précipitation et dans la plus
grande discrétion et qui met en péril la notion même de ce qu’est le respect de l’être humain.
C’est dans la discrétion la plus totale qu’une proposition de loi
sur la bioéthique a été définitivement adoptée et promulguée au cours de l’année 2013. Jugez-en la chronologie : adoption en première lecture par
les sénateurs en pleine nuit du 4 au 5 décembre 2012, adoption en première lecture (et unique lecture) par les députés au début de l’été le 16
juillet 2013, avis de conformité à la Constitution par le Conseil Constitutionnel en plein été le 1er août 2013 et promulgation par le
Président François Hollande également en plein été le 6 août 2013.
Cette loi a été faite en catimini et à la va-vite, sans débat véritablement contradictoire : comme
proposition de loi, elle n’a pas été soumise à l’avis du Conseil d’État, et surtout, comme loi concernant la bioéthique, elle n’a pas suivi la procédure imposée par la loi n°2011-814 du 7 juillet
2011 qui prescrit un large début public avant de voter une loi sur un tel sujet.
Il serait intéressant d’ailleurs de connaître la notoriété d’une telle loi auprès des Français avec une si
faible publicité alors que l’enjeu est pourtant majeur. En effet, la loi n°2013-715 du 6 août 2013 relative à
la bioéthique autorise désormais l’expérimentation sur les embryons humains.
Certes, c’est un sujet très difficile à appréhender, qui nécessite de bien comprendre à la fois les enjeux
scientifiques sur les cellules souches et les problèmes éthiques que pose un tel domaine. J’en avais évoqué
quelques éléments dans deux articles, ici et là.
Je propose ici quelques éléments de réflexion, tant sur la forme (la procédure) que sur le fond sur cette loi
qui, désormais et à mon grand regret, fait partie de notre patrimoine juridique national.
1. La discussion de cette loi a respecté les procédures.
VRAI et FAUX.
Le Conseil Constitutionnel a rendu un avis favorable à cette loi, ce qui montre que la procédure a été
respectée dans les principes constitutionnels fondamentaux du vote d’une loi : « La loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la
Constitution. ».
Pour autant, l’adoption de cette loi n’a pas respecté la procédure de la loi du 7 juillet 2011 qui demande de
faire des états généraux sur toute question éthique : « Tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés
par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé doit être précédé d'un débat public sous forme d'états généraux. Ceux-ci sont organisés à
l'initiative du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, après consultation des commissions parlementaires permanentes compétentes et de l'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. À la suite du débat public, le comité établit un rapport qu'il présente devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix
scientifiques et technologiques, qui procède à son évaluation. En l'absence de projet de réforme, le comité est tenu d'organiser des états généraux de la bioéthique au moins une fois tous les
cinq ans. ».
Depuis le début des années 1990, les lois sur la bioéthique étaient alors révisées tous les dix ans et
donnaient lieu à de larges débats publics, et la dernière a eu lieu… en 2011.
Non seulement les états généraux n’ont pas été organisés, mais en plus, les rapports parlementaires ont été
bâclés, les commissions n’ont auditionné que des scientifiques partiaux parfois industriellement intéressés, et n’ont pas interrogé des personnalités éminentes comme le professeur Jacques Testart
dont la réputation et le désintéressement sont incontestables.
Le Conseil Constitutionnel a cependant raison (comme instance juridique la plus haute, il a de toute façon
toujours raison !) de considérer la procédure conforme, puisque la loi du 6 août 2013 a la même valeur constitutionnelle que la loi du 7 juillet 2011 : ce que l’on peut faire, on peut
le défaire par la loi. Il aurait fallu constitutionnaliser la loi du 7 juillet 2011 pour rendre obligatoire la mise en place d’un débat public sur les questions de bioéthique.
Cela montre ainsi la grande hypocrisie des lois. Ou vacuité. Sans parler des lois jamais appliquées car aucun
décret d’application n’aurait jamais été signé, certaines lois peuvent ainsi poser des principes fondateurs qui seront violés seulement deux années après par un simple changement de majorité. Du
reste, en matière fiscale, les délais de remise en cause sont plutôt de l’ordre du mois, et parfois par la même majorité parlementaire, ce qui peut être normal puisqu’il s’agit là d’une politique
à courte de vue en fonction de la conjoncture économique. Tandis que les domaines éthiques n’imposent aucune urgence et obligent à toutes les prudences et responsabilités.
2. Il n’y a pas vraiment de problème éthique avec cette loi.
FAUX.
Personne ne peut affirmer que l’expérimentation sur les embryons humains ne pose aucun problème éthique. Quoi
qu’on en dise, l’embryon humain est une personne en devenir.
L’intérêt des cellules souches est qu’elles sont porteuses de toutes les potentialités d’organes d’un être
humain (j’y reviens ci-après). L’utilisation de cellules souches d’un embryon humain a donc pour effet de détruire l’embryon en question.
Cette autorisation de principe pose donc deux questions majeures :
1°. Peut-on accepter les opérations qui ont pour effet inéluctable la destruction d’embryons humains ? La loi sur l’avortement et
la loi sur la bioéthique qui permet la destruction d’embryons surnuméraires ont déjà répondu en partie à cette question (et ne sont pas, a priori, remises en cause par la classe politique).
2°. Peut-on accepter d’expérimenter sur des êtres humains, fussent-ils seulement en devenir ? Là, la législation avait répondu par
la négative, avec l’interdiction de tout trafic d’organes et l’interdiction de toute ablation sans nécessité médicale (même lorsqu’elle paraît nécessaire psychologiquement).
On voit bien l’esquisse du futur avec un tel nouveau principe : pourquoi ne pas expérimenter sur des
cobaye vivants ? sans forcément avec leur consentement ? pourquoi ne pas coupler cette idée avec l’euthanasie active au plus grand
profit de ce que certains appelleraient la science ou d’autre la culture de la mort ? etc.
3. La loi va permettre plus de projets de recherche sur les cellules souches.
FAUX.
La loi opère surtout un changement dans les principes, pas dans les faits : d’une interdiction avec
dérogations, elle pose une autorisation sous conditions. Et ces conditions sont à peu près les mêmes (je ne les détaillerai pas même si les rares différences peuvent être contestables).
L’Agence de la biomédecine (la référence dans ce domaine) a présenté qu’il n’y avait eu que 4 refus de
dérogation parmi les demandes de recherche sur les embryons humains en sept ans à comparer avec les 173 dérogations qui ont été délivrées pendant la même période. 98% projets de recherche n’ont
rencontré aucun barrage pour être mis en œuvre. La loi du 7 juillet 2011 n’a donc pas freiné la recherche en la matière et la loi du 6 août 2013 ne favorisera donc pas plus de projets ; les
projets scientifiques ne se décrètent pas dans l’Hémicycle.
4. La loi va sécuriser juridiquement les projet de recherche sur les cellules souches.
FAUX.
Comme dit dans le précédent point, les conditions d’autorisation, parfois ambiguës, resteront toujours à
l’appréciation du juge le cas échéant, et l’interprétation de ces conditions restera tout aussi floue que celle des conditions de dérogation d’auparavant puisque ce sont les mêmes.
La stabilité juridique n’est donc pas plus acquise avec cette nouvelle loi qu’avec l’ancienne loi ; le
juge aura toujours son mot à dire dans le cas où une affaire serait poursuivie en justice. Elle ne règlera donc pas l’absence de confiance que d’éventuels investisseurs étrangers pouvaient avoir
avant l’adoption de cette nouvelle loi.
5. Il y avait hypocrisie à interdire avec des dérogations, autant autoriser.
FAUX.
Si la loi du 6 août 2013 ne bouleversera pas concrètement la recherche française (contrairement à ce qui est
pourtant dit, voir plus loin), c’est parce qu’il y aurait une hypocrisie législative : l’interdiction avec dérogations n’interdirait rien, donc, autant autoriser sous les mêmes
conditions.
L’argumentation pourrait être retourné : s’il n’y a pas de changement concret pour les chercheurs,
pourquoi donc avoir voté cette loi ?
Sur le fond, l’interdiction permet de placer une barrière, une limite, un cadre, une bride, une garantie.
C’est une nécessité pour encadrer des actes qui se heurtent à des questions éthiques. Quelles que soient les autorisations nouvelles, il y aura toujours des demandes pour aller au-delà de ces
nouvelles limites. Or, c’est un terrain à pente très glissante où les considérations économiques risquent de l’emporter sur des considérations éthiques.
De même, l’idée de vouloir légaliser l’euthanasie active dans un cadre extrêmement strict est un leurre ou
une chimère : les limites seront repoussées sans arrêt, avec cet exemple qui vient du Sénat belge qui a voté l’euthanasie active même pour les enfants, sans condition d’âge ! De même,
le jour où l’on permettrait à un couple de femmes homosexuelles de bénéficier de la PMA, les couples d’hommes iraient réclamer le droit à la GPA (gestation pour autrui) par simple mesure d’équité
entre les sexes.
Casser une limite, c’est laisser repousser à l’infini les limites suivantes, c’est ouvrir la boîte de
Pandore.
6. Les embryons humains utilisés n’auraient jamais pu devenir des personnes humaines.
VRAI et FAUX.
Les embryons humains sur lesquels la loi vient d’autoriser l’expérimentation sont des embryons surnuméraires,
c’est-à-dire des embryons "produits" lors de tentatives de fécondation in vitro (le médecin prépare alors
plusieurs dizaines d’embryons pour augmenter les chances de réussite). Ceux qui ne sont plus utilisés dans un projet parental (par exemple, après une grossesse réussie) sont donc conservés et
stockés et constituent un réel problème éthique : on ne sait pas quoi en faire, ce sont des "personnes en devenir", sans projet de vie, ils pourraient éventuellement être implantés dans
l’utérus d’une femme tiers, peut-être même dans deux ou trois siècles. La loi autorise après accord des "parents" biologiques (des géniteurs) de les détruire après un délai donné.
Les deux issues étaient donc dans le champ du possible : l’implantation (même tardive) dans un utérus
avec gestation jusqu’à en devenir une personne (comme vous ou moi), ou au contraire, la destruction pure et simple. La loi du 6 août 2013 propose donc une troisième voie, l’expérimentation, en
clair, du bricolage sur du vivant humain.
7. Il est normal de donner aux scientifiques les moyens dont ils ont besoin pour atteindre leurs
objectifs.
VRAI ET FAUX.
Il est normal que les scientifiques puissent être dans le meilleur environnement possible (matériel,
juridique) pour accomplir leurs recherches et permettent des progrès notables à la société, mais cela dans un cadre bien défini, que les politiques doivent choisir eux-mêmes, indépendamment des
chercheurs. Un cadre notamment éthique qui évite tout abus sur le respect de la personne humaine.
A contrario, le gouvernement trouve normal d’autoriser la recherche sur les cellules embryonnaires alors
qu’il refuse que les scientifiques et industriels aient le dernier mot sur un sujet éthiquement moins sensible, les gaz de schiste. Pourtant, ces gaz de schiste ont le potentiel de bouleverser
complètement la géopolitique mondiale de l’énergie. Qui a dit que l’écologie ne devait pas s’appliquer aux humains ?
8. L’expérimentation sur les embryons humains est compatible avec une méthode scientifique
rigoureuse.
PAS VRAIMENT.
On aurait pu croire (c’est la principale raison de cette loi) que l’expérimentation sur les embryons humains
avait au moins une raison scientifique, qui a une finalité thérapeutique. Le problème, c’est que ce type d’expérimentation ne se base pas sur une méthode scientifique fiable telle qu’on peut
l’attendre dans des recherches extrêmement complexes.
Pour au moins deux raisons :
1°. La méthode n’est pas conforme à un principe absolu dans la recherche médicale, à savoir, expérimenter d’abord sur l’animal avant
d’expérimenter sur l’homme. Or, beaucoup de projets de recherche sur les cellules souches embryonnaires se sont développés immédiatement sur les embryons humains, sans passer par le stade sur
l’animal : « Ceci ne semble pas émouvoir ni les chercheurs, ni les parlementaires, les recherches revendiquées à partir d’embryons humains ne
font pas suite à des connaissances nouvelles qu’il faudrait vérifier ni à des démonstrations d’efficacité d’une innovation chez l’animal. Ainsi cette prétention à utiliser d’emblée du matériel
humain échappe au pré-requis de l’expérimentation animale, lequel est justifié scientifiquement mais aussi éthiquement puisque c’est une règle affichée en recherche médicale depuis l’après
Deuxième guerre mondiale.. » (Jacques Testart le 28 mars 2011).
2°. En corollaire, la méthode uniquement sur des embryons humains n’est pas fiable statistiquement. Car il n’y a pas assez de "matériau"
de recherche pour pouvoir s’assurer que les méthodes soient reproductibles. Il n’y a pas assez d’embryons humains surnuméraires disponibles et fiables pour avoir une vision statistique pertinente
et significative de ces recherches : « Les recherches réalisées sur quelques embryons humains disparates n’auront jamais la pertinence
scientifique de celles qu’on peut mener chez l’animal. » (Jacques Testart le 28 mars 2011). Cela appelle évidemment à une évidence : la nécessité de produire des embryons
surnuméraires à finalité de recherche et sans projet parental (ce que même la nouvelle loi interdit toujours).
9. Les recherches sur l’embryon humain permettront de grands progrès thérapeutiques, par exemple sur
les personnes atteintes de maladies neurodégénératives.
PROBABLEMENT FAUX.
Là où cette recherche était autorisée depuis plusieurs années, les projets s’enlisent dans des difficultés
majeures. Les espoirs thérapeutiques sont aujourd’hui quasiment nuls, en raison des problèmes de rejet immunitaire et des développements de tumeurs.
C’est sur ce point crucial (celui de l’utilité scientifique) que la loi fait énormément défaut : ni
respect éthique, ni espoir scientifique. Les auteurs de la proposition de loi avait pourtant présenté leur texte le 1er juin 2012 ainsi, en méconnaissant la réalité scientifique :
« La recherche sur les cellules souches embryonnaires est porteuse d’espoir et ne cesse de susciter l’intérêt des chercheurs en raison de leur
potentiel thérapeutique considérable. ». Ce potentiel s’est considérablement réduit depuis plusieurs années.
10. L’autorisation va permettre un rattrapage de la recherche française dans ce domaine.
FAUX.
Comme expliqué dans le point précédent (et le point suivant), la technologie est déjà largement dépassée.
Comme souvent, la loi est largement en retard d’une "guerre". Au contraire, en focalisant les moyens de recherche sur l’expérimentation sur les embryons humains, la recherche française
renforcerait son retard en insistant sur une technologie largement dépassée et peu opérante.
En effet, depuis décembre 2007, le véritable espoir thérapeutique réside dans le développement des cellules
reprogrammées (iPS : induced pluripotent stem cells) qui sont issues de cellules d’adultes (cellules matures) qui peuvent être ainsi reprogrammées génétiquement par deméthylation des
histones pour (re)devenir pluripotentes. La recherche n’a donc plus, ici, pour conséquence la destruction d’un "être". Elle est donc éthiquement concevable et satisfaisante, et technologiquement
performante (la loi du 7 juillet 2011 insistait aussi sur le fait que les solutions "alternatives" qui ne posaient pas de problème éthique devaient être privilégiées).
C’est une technologie qui a maintenant démontré de bons résultats (pas de problème de tumeurs par exemple) et
ce n’est pas un hasard si le Comité Nobel a récompensé ces travaux en attribuant le 8 octobre 2012 la récompense suprême, à savoir le Prix Nobel de Médecine, au professeur japonais Shinya
Yamanaka (51 ans), ce qui a même valu au récipiendaire sa nomination par le pape François à l’honorable Académie pontificale des sciences le 9 novembre 2013.
Ce n’est pas non plus un hasard si le gouvernement japonais a décidé au printemps 2013 d’investir massivement
dans cette technologie.
11. Les découvertes sur les cellules iPS n’auraient pas pu se faire sans expérimentation sur les
embryons humains.
FAUX.
C’est factuellement faux. Shinya Yamanaka s’est d’abord basé sur des embryons de souris et a pu reproduire
des cellules pluripotentes à partir de cellules de souris adultes. Il a ensuite directement travaillé sur des cellules humaines matures pour les reprogrammer, sans passer par des embryons
humains.
De même, l’argument qui vise à vouloir faire en parallèle la recherche sur les cellules souches embryonnaires
et la recherche sur les cellules pluripotentes (iPS) pour comparer les résultats et modéliser n’a plus trop de raison d’être puisque la technologie iPS "fonctionne" beaucoup mieux que les
cellules souches d’embryon humain. Les expérimentations sur les embryons humains n’ont donc pas atteint les résultats escomptés par les chercheurs qui, eux, sont déjà passés à une technologie
bien plus performante (et bien moins dangereuse éthiquement).
Pourquoi la France resterait-elle encore dans des domaines que les chercheurs étrangers ont déjà
quittés ?
12. Le débat sur l’expérimentation des embryons humains a été politisé.
FAUX.
Au contraire, il n’a pas été assez politisé, au contraire du débat sur le mariage gay (trop politisé à mon goût). Cette loi n’a pas suscité un clivage droite/gauche. D’ailleurs, des parlementaires de l’opposition n’ont pas hésité à voter
favorablement à cette loi tandis que des personnalités (non parlementaires) connues pour être de gauche s’y sont fermement opposées.
Cela fait partie des débats comme sur la peine de mort ou sur l’euthanasie active, qui font appel à la conscience des individus et pas à l’esprit éventuellement partisan
des responsables politiques.
13. Ceux qui s’opposent à l’expérimentation sur les embryons humains sont exclusivement des
religieux.
FAUX.
Certes, l’Église catholique s’est beaucoup exprimé sur le sujet pour s’y opposer fortement.
Par exemple, Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, spécialiste des questions de bioéthique pour la
Conférence des évêques de France, expliquait le 9 juillet 2013 : « Le principe d’interdiction de recherche sur l’embryon humain alerte sur
l’existence de cet écosystème humain. Ne pas le respecter se retourne toujours, à plus ou moins longue échéance, contre nous. Le science ne peut guider les choix politiques. ».
Le père Brice de Malherbe, directeur du département d’éthique biomédicale au Collège des Bernardins, disait
de son côté, le 10 juillet 2013 : « Certains veulent donc aller plus loin et sacrifier totalement l’embryon humain à la passion intellectuelle
de certains chercheurs et aux espoirs commerciaux de quelques industriels en faisant appel à ce qui devient chez nous une obsession de la santé parfaite. (…) Résister à ce discours séducteur
nécessite un sursaut de la conscience. Conscience des politiques bien sûr, et certains s‚y engagent courageusement, conscience des scientifiques mais aussi conscience de chacun de nous. Quel
effort déployons-nous pour nous informer alors que les technologies actuelles de l’information nous facilitent la tâche ? Sommes-nous prêts à plus de tempérance en matière de santé ?
Sommes-nous prêt à des renoncements pour préserver une société solidaire ? Pour citer un exemple : sommes-nous prêt à remettre en cause la logique des techniques de fécondation
artificielle à l’origine des 170 000 embryons congelés stockés en France aujourd’hui ? ».
Mais les croyants ne sont pas les seuls à s’y opposer. C’est plus une conception de la société qui est en
jeu. Un conception laïque, civile, épris des valeurs républicaines et de respect à la personne humaine.
Une personnalité comme le professeur Jacques Testart, qui n’a jamais caché son athéisme (ni son
altermondialisme), est sans doute la personne en France qui est la plus rigoureusement opposée à l’expérimentation sur les embryons humains. Il a montré sa détermination en prônant un moratoire
des expérimentations dès les années 1980, brisant en cela sa propre carrière de chercheur. Il expliquait même dès le 1er septembre 2011 : « Les pressions des praticiens l’ont largement emporté sur celle des catholiques. » et il mettait en garde car maintenant, « on peut fabriquer des enfants privés d’origine, ou triés dans l’éprouvette, mais aussi utiliser les embryons humains comme un matériau expérimental
ordinaire ».
Du reste, ce n’était pas un hasard si la loi du 7 juillet 2011 avait maintenu le principe d’interdiction
alors que même les parlementaires de la majorité de l’époque étaient prêts à voter l’autorisation, car cette loi, à l’époque consensuelle, a résulté d’un grand débat public initié en 2009 et qui
a fait évoluer la réflexion, débat qui n’a absolument pas eu lieu pour la loi du 6 août 2013 et qui n’est que le résultat d’une majorité politique qui ne vaut même pas 20% de satisfaction dans
l’opinion publique. C’est bien le Comité d’éthique (laïc) et pas une Église qui avait rappelé que l’embryon humain « doit bénéficier du respect lié à sa qualité ».
14. Cette loi fait écho à d’autres lois sociétales prévues par les socialistes depuis mai
2012.
PROBABLEMENT.
Comment ne pas mettre en lien la loi du 6 août 2013 et la volonté du gouvernement de proposer la PMA
(procréation médicalement assistée) à l’ensemble des couples y compris homosexuels ? Rappelons que jusqu’à maintenant, et pour éviter toute forme d’eugénisme (en cas de fécondation in vitro,
il est très facile de sélectionner les "bons" embryons), la PMA n’est autorisée qu’aux seuls couples victimes d’une infertilité physiologique (la PMA est une thérapie, pas juste une méthode pour
avoir des enfants).
Or, la plupart des personnes qui seraient membres de couple homosexuel ne seraient pas infertiles au sens de
la loi actuelle (qui n’évoque pas "l’infertilité sociale" que je dirais "naturelle" des couples homosexuels). La PMA pour tous, c’est en clair
proposer la fécondation in vitro pour tout le monde, même ceux qui sont fertiles, comme mode de procréation ordinaire. On imagine donc que cela va renforcer le risque eugéniste et surtout, mais
peut-être est-ce voulu ? cela va "générer" la production supplémentaire d’embryons humains surnuméraires que la loi du 6 août 2013 permettra de manipuler ensuite à des seules fins
d’expérimentation…
Marchandisation de la personne humaine : attention, danger !
De même, déjà citée ci-dessus, un projet de loi sur l’euthanasie active renforcera le lien marchand entre
corps et argent.
Et avec toujours les mêmes arguments qui rejettent le débat en simplifiant à outrance, en caricaturant
jusqu’au mensonge, en clivant inutilement une société à la cohésion sociale très fragile, et enfin, en méconnaissant la réalité.
Ainsi, si l’on est contre le mariage gay, on serait homophobe ; si l’on est contre l’euthanasie active, on voudrait que les malades souffrent atrocement ou bien meurent de manière
"indigne" ; si l’on est contre l’expérimentation sur les embryons humains, on refuserait toute
avancée pour guérir les maladies neurodégénératives. Ce qui est évidemment faux !
Qui a dit que socialisme ne rimait pas avec ultralibéralisme ? Tous ces projets, qui déréglementent ce
qui fait l’essence même de la personne humaine, vont en somme dans le même sens, la marchandisation de la chair humaine… Aux citoyens d’en prendre conscience et de réagir !
Aussi sur le
blog.
Sylvain
Rakotoarison (30 janvier 2014)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
L'avis conforme du Conseil Constitutionnel du 1er août 2013 (texte intégral).
La marchandisation de l'humain.
François Hollande.
Revenir à quelques valeurs...
La mort pour tous ?
L’embryon humain et ultralibéralisme.
Mariage des couples homosexuels.
Bientôt la PMA ?
Bientôt l’euthanasie et le suicide
assisté ?
Documentation sur la proposition de loi sur les embryons humains
(Sénat).
Ne pas voter Hollande pour des raisons morales.
En quoi le progrès médical est-il amoral ?
ADN, pour ou contre ?
Robert Ewards couronné avec trente ans de retard.
Trente années de bébés éprouvette (fécondation in
vitro).
Le fœtus est-il une personne à part entière ?
Les transgressions présidentielles.
Cannibales et
marchands à la recherche de l’embryon (27 avril 2009).