Je parlais de ce film il y a quelques jours avec des personnes qui, ne l’ayant pourtant pas vu, lui reprochaient d’interpréter le personnage de Jean sur un registre où il semble se contenir. Comme si c’était un défaut de jouer avec « trop » de retenue !
Si je suis le raisonnement de ces gens là, Bourvil s’est fourvoyé dans le Cercle Rouge …
Jean est électricien. Je les entends penser qu’il n’est qu’un "manuel". Il aurait pu, on le comprend à demi-mots, devenir musicien mais la vie en a voulu autrement et il semble ne pas souffrir de la modestie de sa position sociale.
Le coup de foudre provoqué par sa rencontre avec Aurore (Jasmine Trinca) passe presque inaperçu. La pudeur avec laquelle cet homme exprime ses sentiments est extrêmement touchante. Rien que la petite phrase, d'apparence si banale, j'aime bien ta chemise ... résonne comme une déclaration. Il vit en couple avec Dolorès (Virginie Ledoyen), laquelle par contre entend bien faire valeur ses droits par tous les moyens. Et lorsqu’il faut assumer … il assure.
Le sujet du triangle amoureux n’est pas nouveau. C’est son traitement qui est ici un peu différent. Le trio vit le drame sans un cri, et bien malin le spectateur qui peut affirmer lequel souffre le plus.
A ceux qui pointent la banalité (hélas) de la femme trompée on répondra qu’il est plutôt original qu’elle ne soit jamais dans la position de la femme bafouée. La légitime se glisse dans la peau d’une manipulatrice aussi facilement qu’elle enfilerait une combinaison de cuir noir.
Très vite l’atmosphère exhale un parfum de thriller, catalysé par la lecture gourmande du roman de Patricia Cornwell, "Trompe-l'œil" de Patricia.
La progression dramatique englobe les personnages apparemment secondaires, comme celui de Claudine (Ariane Ascaride) dont le poignet est évocateur d'un passé douloureux ... La vie du père fait soudainement écho à la situation présente. On devine que l’histoire pourrait se répéter.
Les pins maritimes aux troncs tourmentés, presque entrelacés, composent un écrin romantique qui s’accorde avec la mélancolie de certains passages musicaux.
Une autre vie est un éloge à la vertu. Emmanuel Mouret pose la question de la raison et du pardon, ce qui n’est pas fréquent par les temps qui courent. Le seul reproche que je lui ferais tient à sa construction avec un enchainement de flashbacks qui nous égarent un peu et dont je n’ai pas compris l’utilité.