Exposition I Ponte City autopsie d’un rêve architectural

Publié le 30 janvier 2014 par Generationnelles @generationnelle

Si le quartier de Soweto incarne la lutte des Noirs sud-africains, il est d’autres lieux qui ont été aussi témoin ( et qui sont encore) du triste passé du pays de l’Apartheid : Ponte City. On avait pu voir la silhouette de cette tour à la Maison Rouge qui rendait hommage aux artistes d’Afrique du Sud. Le BAL lui consacre une exposition orchestrée par les photographes Mikhael Subotzky et Patrick Waterhouse.

Bâtie à la fin des années soixante, ce monstre de béton armé était conçu pour la classe blanche dominante. Si les populations de couleur y avaient leur place, c’était en tant que domestiques. Un texte dans l’exposition explique d’ailleurs qu’un contentieux avait opposé la ville de Johannesburg aux architectes quant à leur localisation dans le bâtiment. Ces derniers tenaient à ce que les domestiques ( que l’on devine issues des classes noires) soient logés au rez-de-chaussée « afin qu’ils ne causent aucune nuisance visuelle ou sonore ».

Ce symbole de la domination blanche s’effondre avec l’arrivée de la démocratie en 1994. On fuit le bâtiment réinvesti par des migrants et la population noire. Le quartier de la tour devient dans l’imaginaire collectif le théâtre du crime. Rachetée en 2007, un projet prévoit de la faire renaitre de ses cendres. Mais le crack boursier de 2008 met un terme à ce projet.

Pendant 5 ans, Mikhael Subotzky et Patrick Waterhouse ont arpenté les 54 étages de Ponte City. De ce périple, ils ont ramené nombre de clichés, mis en parallèle avec des publicités racoleuses, à des années lumières de la réalité. Mais aussi des effets personnels abandonnés, des coupures de presse, des papiers administratifs. Parmi ces trésors, des cassettes d’Aretha Franklin, des certificats d’études etc.

Une accumulation qui restitue l’état actuel de Ponte City, abandonné par certains et habité par d’autres. Car ce sordide tube est animé par quelques vies. Vies  à qui Mikhael Subotzky et Patrick Waterhouse ont tiré le portrait.

Bref une très belle exposition qui nous donne le sentiment d’y être. On peut presque sentir les gravas toujours présents dans le ventre du monstre de béton armé. À voir absolument.