Par Gaspard Hohenfels.
Un article de Marché Gris.
Nul besoin d’être un spécialiste de la politique pour faire ce triste constat : malgré une majorité socialiste aux abois et ne sachant plus à quel marronnier du progressisme se vouer, la droite française est aujourd’hui en bien piteux état.
Après la défaite – d’aucuns diraient l’humiliation – de 2012, l’UMP et ses alliés centristes peinent à se présenter comme une alternative crédible. Et la rivalité Copé-Fillon n’a rien fait pour améliorer la réputation du premier parti d’opposition, transformé en une grande cour de récré pour hiérarques capricieux.
Il est bien sûr difficile, après 10 ans de majorité au Parlement et 17 ans de Présidence à l’Élysée, de réapprendre le langage et l’attitude d’un parti d’opposition crédible. En outre, la droite contemporaine s’est souvent construite sur des rivalités parfois très brutales, de la lutte entre giscardiens et chiraquiens jusqu’à la plus récente affaire Clearstream.
Pour autant, la droite est tenue de rafraîchir réellement son discours si elle veut reconquérir le pouvoir ; en particulier compte tenu du potentiel électoral du Front National relooké par Marine Le Pen. Un tel renouvellement s’est déjà produit ailleurs.
Aux États-Unis, dans les années 80, le parti républicain a opéré un retour – certes ambigu – au libéralisme classique, s’appuyant sur le renouveau intellectuel et médiatique du courant conservateur. Aujourd’hui, le vieux 33-tours reaganien ne séduit plus l’électorat, comme l’a montré la défaite de Mitt Romney face à Barack Obama en novembre 2012. Mais ce qui s’est produit une fois peut se produire à nouveau : on voit émerger un mouvement de républicains de tous horizons, conscients des limites du vieux parti de droite et travaillant à une nouvelle forme de conservatisme réformiste.
Plus globalement, le « consensus de Washington » qui a guidé la conception des politiques publiques dans de nombreux pays depuis une vingtaine d’années est aujourd’hui sérieusement remis en cause. Critiquant une approche uniforme des problèmes économiques et sociaux, et rappelant la nécessité de faire vivre les promesses sociales du libéralisme, The Economist appelait de ses vœux un nouveau et véritable progressisme dans un article devenu un morceau d’anthologie du centrisme et du pragmatisme.
Compte tenu de la crise économique et sociale qui traverse notre pays depuis plusieurs années, l’opposition ne peut se contenter de réclamer des réformes sans proposer aussi des réponses spécifiques aux difficultés de la société française (éducation, logement, pauvreté, vieillissement de la population…).
Pour ce faire, elle doit manœuvrer sur l’étroite ligne de crête, prise entre une gauche qui persiste à voir la dépense publique comme une réponse universelle aux problèmes sociaux et une mouvance populiste appelant à un retour massif de l’État dirigiste dans la vie économique et sociale du pays. Ce n’est pas gagné, mais ce n’est pas perdu non plus.
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