Le Tournoi arrive pile à temps pour vous sauver d’un troisième weekend de soldes auquel vous destinait Madame. Vous êtes d’autant plus heureux que passer 5 weekends d’affilée le cul dans le canapé à regarder votre sport préféré n’est pas pour vous déplaire, cela ressemble même à votre vie rêvée. Asseyez-vous confortablement, détendez-vous, le spécialiste rugby va vous dire avec quelle équipe nous n’allons pas gagner le Tournoi.
Par Gilles Gros-Paquet d’Avants
1ère ligne
On a beau se rincer l’œil autant de fois que l’on veut, et au sens propre pour une fois, la liste des 23 sélectionnés indique toujours la mention suivante : Yannick Forestier. Il faut se rendre à l’évidence, notre première ligne est atteinte du syndrome de Barcella. Une définition s’impose :
Syndrome de Barcella, n.m. : série cauchemardesque de convocations en équipe de France d’un pilier gauche laborieux, ayant pour point de départ une sur-cotation due à une première sélection accidentellement concluante face à une nation du Sud amoindrie lors des tests de novembre. Sa cause, invariable, est un manque dramatique de densité à un poste qui fut autrefois tenu par Sylvain Marconnet ou Olivier Milloud. Le syndrome de Barcella tire son nom du traumatisme causé par les 20 sélections dont une en finale de coupe du monde d’un atroce pilier gersois dont la rumeur dit qu’il sévirait encore dans un club de retraite basque, participant activement à précipiter celui-ci en ProD2 entre deux blessures. Sa variante, la malédiction de Brugnaut, très rarement diagnostiquée, quasiment identique mais encore plus douloureuse, se distingue uniquement par l’absence de première prestation réussie.
Le poste de pilier droit est sujet au même problème de manque d’effectif. Face à la perspective de laisser Rabah Slimani prendre sa relève, Nicolas Mas a décidé qu’il ne prendrait sa retraite que lorsque Christian Califano accepterait de revenir en équipe de France.
Les bonnes nouvelles se font rares chez les talonneurs également. Benjamin Kayser est incertain pour le premier match face à l’Angleterre : il se serait coincé les cervicales à force de se retourner brusquement pour vérifier que William Servat ne revient pas pour lui prendre sa place.
2ème ligne
Tantôt capitaine quant Thierry Dusautoir déclare forfait pour cause de blessure annuelle, tantôt vaillant soldat quand celui-ci revient, Pascal Papé est décidément l’homme à tout faire de l’équipe de France. Sa technique de destruction des mauls adverses par étranglement du porteur de balle sera une nouvelle fois très utile. Et en plus il permet de remplir les quotas de rouquins imposés par les nations britanniques.
Yoann Maestri, à l’inverse, est homme à faire une seule chose : arriver à pleine vitesse pour mettre un coup de boule à un joueur à terre lorsque le maul est déjà gagné. Gratter des ballons au sol, faire des plaquages en avançant, c’est pas son truc. A force de frotter sa tête contre les cuisses de Fabien Barcella en mêlée, Yoann a peut-être hérité de son syndrome. Afin d’éviter que la contagion gagne le reste de la seconde ligne, il est urgent de mettre ce dangereux individu en quarantaine. Alexandre Flanquart en profitera pour essayer de lui montrer qu’un deuxième ligne moderne ne fait pas de courses en travers et ne tombe pas à genoux au moindre contact.
3ème ligne
Louis Picamoles.
Demis
François Trinh-Duc, à l’annonce de sa sélection dans le groupe de 30 : « Mon sourire ? Ça va être compliqué de me le décrocher ! »
Il a raison François, c’est compliqué de décrocher un sourire. Surtout le sien. On a l’impression de ne jamais l’avoir vu triste. Il peut serrer 23 mains et entendre 23 fois d’affilée « Sorry, good game » après une défaite honteuse, et c’est arrivé 5 fois en 7 matchs face aux rosbifs, qu’il a toujours cette tête d’enfant de publicité Nutella qui est tout sourire au moment de se resservir une rasade de cholestérol qui le tuera bien avant l’âge de la retraite. Personne n’essaiera donc vainement de décrocher ce sourire. En revanche, comme lui expliquera Courtney Lawes dès le premier retour intérieur, une mâchoire se décroche en entier avec une facilité surprenante. A moins bien entendu que Jean-Marc Doussain ne soit titularisé à la mêlée pour le protéger, ce qui serait au passage une évolution assez remarquable des attributions du numéro 9.
Centres
Depuis la disparition tragique des jambes de Ô Yannick Jauzion, survenue entre 2007 et 2009 selon les estimations des spécialistes, l’équipe de France se cherche un premier centre capable de souvent franchir les défenses adverses et de toujours faire jouer ses coéquipiers à sa suite. Marc Lièvremont, entre autres hallucinations, avait cru découvrir ce successeur tant attendu en la personne improbable de Fabrice Estebanez. Plus lucide, Philippe Saint-André sait bien que Mathieu Bastareaud ne pourra réaliser que la première moitié de la mission, à savoir faire exploser la zone du 10 adverse. Ce sera déjà pas mal, et si cette tête à percussions d’Owen Farrell est encore titulaire à l’ouverture samedi, on pourrait assister au spectacle le plus jouissif que le rugby ait jamais offert.
Il faut garder une chose à l’esprit : il peut parfois arriver que le numégro 12, dans un moment d’égarement, oublie de foncer au tas ou fasse une passe pour faire plaisir aux nostalgiques du Frèncheu Flèrre, qui selon nos comptes ne sont plus que deux, Jacques Verdier et sa grand-mère, si l’on considère que Pierre Villepreux est mort depuis longtemps et que le personnage qui squatte rugyrama.fr et y répand impunément des idées aussi rouillées que les genoux de Damien Traille est un fantôme qui cherche désespérément la machine à voyager dans le Temps d’Avant. Dans l’hypothèse fantaisiste où le ballon parviendrait jusqu’au second centre, ce dernier aura pour objectif de mettre un terme à la folle envolée de trois passes. Le spécialiste maison s’appelle Wesley Fofana. Sa mission ? Fofaner.
Fofaner, v. : attitude consistant à conserver le ballon en toutes circonstances, quand bien même la configuration forcerait le plus égoïste des David Marty à daigner faire une passe même moche, quand bien même se présenterait un 8 contre 1 en bout de ligne, pour à la place marquer un splendide essai en solitaire.
Exemple : « Ah putain c’est pas possible de fofaner comme ça, on dirait un croisement entre Florian Fritz et Jamie Roberts à qui on aurait coupé les mains. »
Exception : on ne peut en aucun cas dire d’un joueur qu’il fofane si le joueur à qui aurait du être adressée la non-passe est Thierry Dusautoir, sujet notoirement atteint du syndrome du Bégaiement des Mains (on pourrait enchainer sur la définition, faudra penser à faire un dictionnaire médical de ce sport).
Ailiers
La particularité de la sélection française de cette année 2014 est qu’elle ne comporte pas d’ailiers. Si vous avez pris la peine de lire le paragraphe précédent et que vous ne présentez pas de trouble majeur de la compréhension écrite, vous aurez compris que leur présence dans l’équipe est largement superflue. Ainsi, les économies réalisées par la suppression du poste « Maquillage et Gel Cheveux pour Yoann Huget » devraient soulager le budget de fonctionnement de l’équipe de France, qui est déjà largement mis à mal par la consommation phénoménale de fricadelles-frites de Vincent Bienbaty.
Arrières
Il devrait en revanche y a voir un arrière, au cas où nos adversaires aient l’étrange idée d’exploiter nos points faibles dans la couverture du terrain ou de faire un concours de rouflaquettes. Brice Dulin et Maxime Médard ont donc tous les deux leur chance.
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