L'utilisation de campagnes de marketing viral sur les réseaux sociaux est étroitement liée à des produits ludiques et ne saurait déployer la même efficacité sur des produits utilitaires.
Le marketing viral utilisant la légitimité du lien interpersonnel comme argument de vente, vient de connaître un fort regain d'intérêt avec le développement des applications ludiques sur les réseaux sociaux. Ce sont ainsi FarmVille et CityVille, deux applications présentes sur Facebook qui, en quelques semaines seulement ont pu via une campagne intense de marketing viral, faire grimper leur nombre d'utilisateurs à quelques 100 millions dans le monde. Une équipe d'universitaires allemands de l’Ecole de Finances & Management de Francfort et de l'Université Goethe a donc voulu analyser plus de 700 campagnes virales différentes sur le réseau social afin de démontrer la spécialité de la technique. Et si une campagne virale peut s'avérer fort utile pour des produits ludiques tels que FarmVille, le message induit par ce type de marketing se révèle inverse dans le cas de produits utilitaires.
Jeux c/ Services : adéquation nécessaire du moyen au contenu
Parmi différentes campagnes analysées, une certaine typologie apparaît entre les celles ayant généré une importante réussite d'une part, et de l'autre les campagnes s'étant avérées inefficaces, voire en creusant auprès du public cible dommageables pour la marque et le produit. De fait, l'équipe de Francfort a ainsi pu observer que les seuls produits ayant vu leur popularité augmenter grâce à cet outil étaient des applications ludiques et des jeux. A leur différence, les produits utilitaires, et plus particulièrement les services comme l'assistance juridique ou comptable, semblent en avoir souffert. En effet, dans l'univers offert par la plateforme Facebook, le ludique et le divertissement priment. Or, cette constatation n'est pas seulement un état de fait mais est aussi reconnue par les utilisateurs qui visent le réseau social avec ce but en tête. Dès lors, si des recommandations personnelles ou des messages d'amis invitant à continuer ou a partager du divertissement s'avèrent particulièrement légitimes pour le consommateur alors que l'intrusion du sérieux, de l'utilitaire décrédibilise fortement le message. Selon les résultats avancés, on constaterait même une réduction de 75% de l'efficacité de la campagne dans ce cas. S'appuyant sur les thèses de socio-psychologie, l'équipe universitaire met ainsi en avant l'orientation hédonique de Facebook comme impactant directement la perception des informations s'y trouvant. Ainsi la présence d'informations sérieuses va apparaître au consommateur déplacé, induisant une certaine suspicion à l'égard du produit.
La charge symbolique de l'outil et le besoin de remise en contexte
Les faits et opinions avancés dans cette étude ne sont pas particulièrement originaux dans le contexte de la théorie du marketing et de la communication. Cependant, en s'appuyant sur un phénomène qui a vu son importance croître exponentiellement sur une courte durée, les chercheurs remettent l'importance du contexte au coeur de l'approche marketing. Si les campagnes virales ont pu apparaître comme un outil peu coûteux et surtout à même d'atteindre un public très large, l'incapacité à prendre en compte les caractéristiques spécifiques des utilisateurs de réseaux sociaux s'est révélée fortement handicapante dans leur exploitation. Si le réseau social peut toujours représenter une opportunité pour les produits utilitaires, la dimension automatique des campagnes de marketing viral sape la légitimité inhérente au bouche à oreille. Peut être dès lors une campagne marketing plus spécifique, qualitative plutôt que quantitative, est elle à envisager sur de tels produits.