Depuis la crise de 2008, le gouvernement britannique et d’autres pays de l’OCDE mettent l’accent des politiques publiques sur les entreprises à forte croissance. Ils y ont vu un remède pour la création d’emplois qui manquaient visiblement dans les économies en pleine dépression. Ces entreprises constituent le fer de lance de toute expansion. Mais les plus récentes recherches montrent qu’il n’existe pas de lampe d’Aladin ou de baguette magique pour détecter parmi les entreprises qui naissent celles qui seront à forte croissance, encore moins de mesure pour planificateur étatique permettant de les multiplier. Sauf une, identifiée par l’IRDEME, mais encore non reconnue par les chercheurs : les faire financer par des entrepreneurs qui ont déjà réussi.
Par Valérie d’Emploi2017.
Définies par l’OCDE comme les entreprises de plus de dix salariés ayant connu une croissance annuelle de plus de 25% sur trois années de suite (ce qui fait plus de 72% sur toute la période), les HGF sont reconnues comme une catégorie économique très importante pour les politiques publiques. L’OCDE et Eurostat ont élaboré différents outils qui permettent de les suivre dans le temps au niveau européen. Au Royaume-Uni, plusieurs organismes gouvernementaux et indépendants ont publié des études qui soulignent leur importance cruciale pour la reprise de l’économie britannique.
Le dernier rapport1 de l’institut de recherche britannique indépendant NESTA (National Endowment for Science, Technology and Arts), paru en janvier 2014, est consacré au rôle des politiques publiques sur les HGF.
Ce rapport est très intéressant car il constitue une bonne synthèse de tous les efforts entrepris pour augmenter le nombre ou accélérer le développement des HGF, il constitue aussi une bonne critique des conclusions parfois une peu simplistes du passé, qui prétendaient donner les clés pour identifier les HGF, l’idéal dont rêve tout planificateur.
Il passe en revue plusieurs des initiatives britanniques non seulement l’Enterprise Investment Scheme dont le plafond a été relevé à 1 million de livres par contribuable, mais aussi le « Seed Enterprise Investment Scheme » qui permet une déduction d’IR de 50% pour un investissement dans une start-up (de moins de 25 salariés) , l’ouverture du London Stock Market à un « High Growth Segment », la création d’un « Growth Accelerator Program » destiné à attirer le maximum d’entreprises à se développer au Royaume-Uni (déjà 7.000 entreprises en ont bénéficié) avec un budget de financement de 200 millions de livres, plus récemment le « FutureFifty » cherchant à connecter les champions avec toutes les ressources disponibles.
La synthèse des recherches scientifiques sur les HGF qui est ensuite présentée, met en doute le bien-fondé de ces efforts en montrant que les HGF échappent à tout système de repérage. D’où cette affirmation : « This means that HGFs are something of a ‘moving target’, making them a difficult cohort of businesses for policy makers to target ».
Ou sous une forme plus scientifique : « a major conclusion of the empirical research in this area concluded that the ‘stochastic part of the variation by far outweighs the systematic part. In other words, explained variance in growth research is notably low’ (McKelvie and Wiklund, 2010, p. 277). »
Si tous s’accordent pour reconnaître que les HGF ont un rôle majeur sur la croissance, ils reconnaissent aussi que leur repérage est virtuellement impossible : « In other words, there is no single ingredient or ‘magic bullet’ behind those firms which achieve a period of rapid growth. Unfortunately, this diversity makes it particularly difficult for policy makers to easily identify HGFs and to design and target appropriate interventions. »
Il nous semble que dans ces conclusions désabusées, les chercheurs britanniques ont manqué qu’il n’existe pas en effet de recette magique pour identifier une HGF pas plus qu’il n‘existe de signes extérieurs pour savoir sous quel arbre se cachent des truffes, mais qu’en confiant la tâche de les découvrir à des chiens truffiers, en laissant investir des entrepreneurs investissant leur propre argent, et non pas des organismes publics, on pourrait accroître sensiblement l’efficacité des investissements.
C’est du moins ce que semblent montrer les comparaisons effectuées par l’IRDEME entre les investissements des gazelles britanniques et françaises.
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Sur le web.
- Ross Brown, Colin Mason, Suzanne Mason, « Increasing ‘The Vital 6 Percent’ : Designing Effective Public Policy to Support High Growth Firms », Nesta Working Paper 14/01, January 2014. ↩