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En 1976, je suis partie en Israël pour la première fois pendant les vacances, et c'est là, que confortablement installée devant la télé j'ai vu les images époustouflantes de Nadia Comaneci, la petite gymnaste roumaine de 14 ans. Ses dix et ses médailles d'or. Elle avait presque le même âge que moi et sa prestation m'a profondément marquée. Je n'ai jamais fait de gym pour l'imiter, mais je me suis précipitée sur "La petite communiste qui ne souriait jamais" de Lola Lafon dès sa sortie. Pour voir ce qu'elle avait fait de mes souvenirs. Et j'ai été très, très heureusement surprise.
La romancière retrace le destin de la petite fée du communisme, entrecoupant son récit de conversations imaginaires avec Nadia. Et ses lecteurs suivent, fascinés, les entraînements à la dure – la gymnaste n'hésitait pas à se malmener physiquement pour arriver à ce qu'elle voulait - sa montée inexorable vers le succès. Et l'éblouissement de Montréal. Sa chute ne sera pas due à une perte de talent. Mais bien plutôt parce que même les fées de 14 ans grandissent et deviennent femmes et se retrouvent encombrées par leur corps alourdi. Et là alors que Nadia Comaneci avait été portée aux nues chez elle, en Roumanie, et dans le monde entier, les critiques ont plu, cruelles et misogynes. La femme avait fait disparaître la fée, le charme était rompu. A 28 ans la gymnaste, ancien étendard du régime communiste, finira par fuir aux Etats-Unis pour commencer une nouvelle vie. La plume de Lola Lafon se fait sensible et lyrique quand elle raconte les prestations de Nadia, soudain plus dure pour souligner ce qu'on lui a fait endurer, au physique comme au mental. Je lui donnerais bien un dix, moi!
La petite communiste qui ne souriait jamais, Lola Lafon, Actes Sud