Ca y'est. C'est fini. Mon CDD à la SNCF se termine tristement dimanche soir. Finies, les journées à répondre aux "il est où mon train ?" et "Où sont les toilettes dans la gare ?". Finies, les insultes gratuites, les bousculades, les gens de mauvaise humeur, le putain d'escalator qui tombe toujours en panne, travailler pour des usagers qui passent leur temps à dire que nous sommes cons et inutiles... Finies, le salaire chaque fin de mois, le travail de nuit dans cette grande gare vide, les balades sur les quais quand je m'emmerde, la satisfaction d'aider les gens, d'essayer de rendre ce moment désagréable que sont les transports en un moment un peu plus agréable. Fini... Oui, je suis triste. C'est loin d'être un travail facile, et pourtant je suis vraiment au bord du désespoir à l'idée de devoir m'en séparer.
Moi qui me pensais feignasse et avare de toute difficulté, je me suis trouvée une vocation qui est loin de mener aux métiers les plus faciles : l'accueil, LES GENS. C'est comme un coup de foudre, ça défie toute logique, ça ne colle pas avec ma personnalité solitaire et grognon, ça remet en cause les lois de la nature, mais je m'en fous, j'aime ça, j'aime ce métier que je ne pensais pouvoir effectuer que dans la douleur, la pénibilité et la retenue.
Dans l'intimité, je suis moi. Une rose, avec ses épines. Des belles épines qui piquent. Je ne suis pas forcément facile à approcher, j'ai du mal à m'ouvrir, me laisser toucher. J'ai souffert, attendu pour rien, espéré, j'ai aimé, j'ai détesté, je me suis renfermée. Mais une fois au travail, dans ma gare chérie, je suis comme une fleur qui s'épanouit au soleil. C'est cliché, mais c'est ça. Au contact des usagers, des plus sympathiques aux plus antipathiques, je me sens comme sur une scène de théâtre : je peux enfin me lâcher, sourire, parler, m'exprimer. Je parle d'une voix forte et claire, je sais être sèche s'il le faut, je rigole avec les plus gentils et je ne me laisse jamais déborder par le regard des autres, aussi méprisant qu'il soit.
J'espère réussir les tests de recrutement, qui me mèneront à un CDI. Je ne pense pas retrouver une entreprise où je pourrais vivre autant dans le mouvement, dans le passage, dans le contact humain. Des humains, il y en a partout, mais une gare, tout le monde y passe, et nous, nous les regardons passer toute la journée. C'est ça que je veux. Etre là où tout le monde est.
Souhaitez-moi bonne chance !