L'émergence du crowdfunding n'est pas seulement un phénomène sociétal de retour aux sources, mais aussi une réponse aux obstacles existants au financement des startups. De fait, entre valorisation de la société et droits préférentiels des investisseurs, les jeunes entrepreneurs voient souvent des sources possibles de financement se tarir devant la complexité juridique et économique. L'émission d'obligations convertibles par exemple, de par la nécessité comptable d'une vérification du passif et de l'actif de la société, se voit ainsi souvent laissée de côté, malgré certains avantages intéressants. Pour réussir à dépasser ce phénomène de blocage presque systématique qui alourdit la capacité d'adaptation et la marge de manoeuvre des startups, l'incubateur The Family, en partenariat avec l'avocat Sacha Benichou et son cabinet SBAvocats, a ainsi mis en place un modèle d’investissement nommé MeetAIR, directement inspiré du système de Safe américain. Plus qu'un outil, le AIR, proposé en Open Source se veut un moyen de faire évoluer l'écosystème juridique en faveur de l'innovation, en visant à toucher le public le plus large possible.
Le Safe français
Initiateur du projet, Sacha Benichou, fondateur du cabinet SBAvocats rappelle que "malgré une capacité d'innovation forte, les startups très spécialisées comme dans le secteur de la biochimie se retrouvent bloquées en phase d'amorçage par leur besoin élevé de fonds propres." Les mécanismes existants permettant aux startups de se financer dans les premiers temps de leur existence sont ainsi coûteux et difficiles d'accès, et ce, aussi pour protéger les investisseurs qui ne peuvent se baser que sur des projections. Afin de dynamiser ces processus, a l'image de ce que l'incubateur Y-Combinator a mis en place pour ses startups, The Family propose ainsi l'Accord d'Investissement Rapide. Celui-ci consiste ainsi en l'émission de Bons de Souscription d'Actions (BSA) offrant à l'investisseur une décote proportionnelle lors de la réelle émission d'action. L'intérêt est ainsi de décaler la valorisation de l'investissement tout en offrant aux startups une assise financière sur laquelle évoluer. Comme nous le rappelle l'avocat si la façon dont l'outil à été conçu en fait un objet nouveau dans le cadre juridique, "L'utilisation du BSA est plus une astuce qu'un nouveau modèle, et en pratique les protections des deux parties du BSA existent déjà en droit français."
Open source
L'intérêt du projet porté par The Family tient surtout à l'approche développée plus que l’outil lui-même. L'Accord d'Investissement Rapide est ainsi complètement expliqué sur son site dédié, l'utilisateur pouvant en quelques clics télécharger en Open Source l'intégralité du package juridique. Cette approche, nous confie Sacha Benichou, tient à une volonté de changement structurel dans l'approche juridique de l'innovation. "Pour qu'un tel système tienne et dépasse l'épiphénomène ou le seul cadre de The Family, nous avons tous deux décidé de l'ouvrir au plus grand nombre, car seule une adhésion de masse, une réelle démocratisation, peut offrir une pression suffisante avec la force de l'état de fait." Si cette démocratisation en est encore à ses débuts, l'écosystème de l'innovation ne devrait cependant pas tarder à faire sien un outil qui favorise encore un peu plus l'émergence et surtout l'application économique d'innovations.