Il est difficile, impossible, dérisoire de tenter d'échapper aux problèmes de couple de François Hollande. L'homme a tout fait pour que cette affaire reste privée. Mais chaque jour apporte son lot de futilités, de commentaires supplémentaires sans information nouvelle, sur une affaire personnelle dont pourtant tous les sondages tendent à prouver qu'elle indiffère les citoyens.
C'est l'une des révélations/confirmations de ces dernières semaines: la presse sombre et s'étonnera plus tard qu'elle ne soit plus crédible. Un sondage riche d'enseignements, heureusement commentés par quelques persévérants, révèle combien la France craque devant l'avenir, à cause de la crise du modèle, des incertitudes en tous genres. Et pourtant, on ne compte plus le nombre de ces éditorialistes qui alimentent encore notre actualité de faux rebondissements.
L'affaire Gayet leur a fait tourner la tête. Ecrire comme Closer, baver comme Voici, la tentation était trop grande pour ces habitués de la chose politique, trop restreints dans leurs pratiques historiques. Cette affaire Gayet était comme un moment grisant, un "guilty pleasure" d'éditocrates coincés.
Le comble du ridicule était atteint, dépassé, écrasé par l'actuelle épouse de l'ancien directeur de campagne de Nicolas Sarkozy - campagne victorieuse, 2007- Caroline Roux. Cette journaliste officie sur Europe 1. Sa vie privée ? Son compagnon s'appelle Laurent Solly. Sa spécialité ? Le commentaire sur les tactiques et non les pratiques, la forme plutôt que le fond, la surface contre les convictions. Mercredi 22 janvier, la dame revient sur l'affaire Gayet, évidemment. "Le leitmotiv dans les couloirs de l’Elysée ? Y penser toujours, n’en parler jamais". Elle a appelé un "conseiller intime du chef de l'Etat" (et oui, elle a des sources!), qui pourtant lui assure que cela ne la regarde pas. Mais elle insiste, elle veut son sujet, elle l'a: le cas Trierweiler serait "un sujet tabou à l'Elysée".
Nous sommes en 2014, la presse s'effondre, en direct et inconsciente.
Christophe Barbier, autre intime des grandes sphères, le "pote de Carla", celui des couvertures sur ces "immigrés-qui-nous-volent-et-nous-font-peur", le même dérive aussi, sans surprise."Quelles seront les conséquences électorales de la mue opérée par François Hollande tant dans sa gestion du privé que du public?" On se pince pour le croire. Barbier convoque Georges Feydeau, le vaudeville et la Belle Epoque. Il faut faire sérieux, même quand on plonge sa plume dans les poubelles de l'actualité. Il fait mine de prendre du recul, "une psychologie de bazar envahit l'analyse politique et cherche le chef sous le casque".
Europe1, encore, reçoit mercredi Bernadette Chirac. Cette dernière reste discrète et compatissante. Mais il faut qu'on nous force et caricature ses propos. Même les Echos, quotidien conservateur et plutôt retenu, force le trait et le texte, une pleine page sur une si courte intervention qui n'a pourtant rien délivrée.
Le Figaro la joue "sérieux", une pleine page, un long billet, tout en conditionnel, ce 22 janvier. En titre, "Inflation de rumeurs autour de l'affaire Hollande-Gayet". En illustration, trois portraits de près, Ségolène Royal et Valérie Trierweiler, séparées par ... Julie Gayet. L'article est de François-Xavier Bourmaud. L'homme écrit plutôt des billets sérieux et de fonds, contrairement aux deux précédents. Mais là, c'est raté. On fait les poubelles. On n'apprend rien, sauf le pire des ragots. Pire encore, le Figaro suggère à François Hollande de "réagir": "Plus le président tarde à parler, plus les vraies-fausses infos prennent de l'ampleur. (...) Avec le black-out décrété par le président de la République sur les évolutions de sa vie privée, les rumeurs en tous genres se sont multipliées. " Le même journal publie aussi un article sur cette publicité qui "s'empare aussi de l'affaire Hollande-Gayet". Il fallait faire sérieux.
Comme souvent, il ne fallait lire qu'Acrimed, le site critique des médias, qui résumait sobrement.
"Pourtant, même traitée avec toute la hauteur de vue dont sont capables les « grands journalistes » face à « l’évènement », rien ne pouvait justifier que cette « affaire », qui n’a comme conséquences politiques que celles que lui confère sa médiatisation massive, interrompe le traitement « normal » de l’actualité et occulte pendant plusieurs jours d’autres informations devenues, d’un coup, secondaires."Forcément, on réfléchit à l'époque d'avant, la première saison de Sarkofrance. Le Bling-bling y était affiché, revendiqué, exhibé. Avant que quelques communicants ne tentent, trop tard, de calmer le "Patron" qui croyait pouvoir exercer ce pouvoir de façon si décomplexée. L'homme, comme d'autres avant lui, a "ouvert les vannes".