Le nouveau Code civil : le droit privé tchèque redessiné (IIe partie)
Le nouveau Code civil apporte des modifications dans la vie de tous les Tchèques. Cependant, personne ne ressentira son application au quotidien avec autant d’ampleur que le monde de l’entreprise. En effet, l’introduction du nouveau Code civil a entraîné la suppression du Code de commerce, dont la plus grande partie relève à présent de la gestion du nouveau texte. Regardons maintenant de plus près les changements les plus importants.
Le nouveau Code civil rompt enfin, après plus de vingt ans, avec la duplicité juridique d’un grand nombre de domaines. En particulier celui du droit des contrats qui, depuis 1992, relevait à la fois du droit civil et du droit commercial. Plus d’ambiguïté, donc, la réglementation étant unifiée et plus exhaustive. Mais est-elle aussi plus juste ? Voici les propos du co-auteur du nouveau Code civil, le juriste František Korbel.
« Je pense que le plus important en matière de contrats, c’est leur dé formalisation. Si, par exemple, vous et moi, nous nous mettions, avant le début de cette année, d’accord pour que je vous loue un appartement, pour que vous logiez, payiez le loyer, que je paie les impôts, etc., on pouvait avoir l’impression que tout était en ordre. Mais notre accord pouvait être déclaré comme invalide par les autorités. Il suffisait qu’il n’ait pas eu la forme écrite exigée ou que l’espace loué n’ait pas été homologué comme logement. Avec le nouveau Code civil, ce qui est déterminant, c’est ce que souhaitent les deux parties. Ni l’Etat, ni aucune loi ne peut déclarer leur volonté comme nulle. »
Une nouvelle notion mérite d’être évoquée, celle de la ‘responsabilité précontractuelle’. Un comportement malhonnête dans le monde des affaires peut désormais avoir des conséquences néfastes. En particulier si un tel comportement est motivé par la volonté d’accéder aux informations d’une autre entreprise ou encore d’empêcher qu’un contrat soit conclu par la concurrence. Précisons de l’avocate Květoslava Lamparová :
« Celui qui, de sa propre initiative, entame une négociation contractuelle, alors qu’en réalité il n’a pas l’intention d’aboutir à la signature d’un contrat, devient, selon le nouveau Code civil, responsable du dommage causé par la non-signature du contrat. »
Le contrat peut aussi être déclaré nul notamment s’il est en contradiction avec les ‘bonnes mœurs’. La loi viserait ainsi à protéger la partie la plus faible, plus vulnérable, typiquement le consommateur.
C’est ce qu’explique le spécialiste du droit commercial Bohumil Havel : « Si j’abuse de la perturbation d’esprit d’un individu ou que je profite d’une situation dans laquelle sa volonté est, d’une manière ou d’une autre, troublée ou altérée, et que je lui fais promettre quelque chose d’absolument inéquilibré, un tel contrat peut être invalidé dans sa totalité. La loi dispose ainsi d’un mécanisme de protection pour ce type de situations. » Mais si, d’un côté, le Code prévoit une plus grande protection des personnes plus ‘vulnérables’, certains critiques objectent, au contraire, qu’une plus grande libéralisation du droit profite aux plus nantis : moins de charges administratives laisse plus d’espace pour les fraudes et pourrait entraîner une plus grande charge de travail pour les organes de justice. Mais tout le monde aura-t-il les moyens de payer un avocat pour défendre ses intérêts ?
Il est impossible de mentionner ici tous les changements contenus dans les 3 081 articles du nouveau Code civil.
En tant que consommateurs, sachez que d’importantes modifications touchent notamment la notion de garantie.
Si vous êtes entrepreneur, prévoyez de grands changements concernant les sociétés par actions : une plus grande responsabilité des plus haut placés, une plus grande protection des actionnaires minoritaires, suppression des actions anonymes, etc. Le changement toutefois le plus souvent évoqué dans les médias est la simplification du processus de création d’entreprise. Précisions de l’avocate Dagmar Raupachová : « Une des plus grandes innovations est sans doute la réduction du capital social de départ nécessaire pour la création d’une SARL. (s.r.o., ndlr) qui passe de 200 000 CZK à 1 CZK. C’est vraiment un changement radical qui permettra de faciliter et d’encourager la création d’entreprises pour de nouvelles personnes, et notamment les jeunes. » Quant à la question initiale consistant à savoir si le nouveau Code civil apportera plus de justice, la réponse se fera sans doute attendre. Tout dépend des citoyens.
Soňa Jarošová
Pour aller plus loin: ici
+Elisa Viganotti