L’amour est un crime parfait,

Par La Nuit Du Blogueur @NuitduBlogueur

Note : 3/5 

Les frères Larrieu ont toujours réalisé à deux et semblent faire de ce nombre leur chiffre fétiche. Après avoir fait deux films avec Sabine Azéma (Peindre ou faire l’amour (2005) et Le Voyage aux Pyrénées (2008)), L’Amour est un crime parfait est leur deuxième projet avec Karin Viard après Les Derniers jours du monde (2009), et leur quatrième collaboration avec Mathieu Amalric (La Brèche de Roland (2000), Un Homme, un vrai (2003), et Les Derniers jours du monde (2009)). Leur dernier film est également leur deuxième adaptation. Le précédent, Les Derniers jours du monde, était tiré de l’oeuvre éponyme de Dominique Noguez. L’Amour est un crime parfait est lui adapté du roman Incidences de Philippe Djian paru en 2010.

© Gaumont Distribution

Le récit s’attache à Marc, professeur de littérature à l’Université. Il vit isolé dans la montagne avec sa sœur Marianne et y ramène régulièrement des élèves draguées aux soirées étudiantes. 

Marc aime quatre choses dans la vie : les femmes, la littérature, les cigarettes et sa sœur avec laquelle il entretient une complicité ambiguë. Mais alors que sa dernière conquête est portée disparue tout son petit monde commence à s’effriter. 

Jean-Marie et Arnaud Larrieu sont restés très fidèles au roman en adaptant à la perfection les personnages imaginés par l’auteur. 

Bien que la relation de Marc et Marianne soit moins développée que dans le livre (support oblige), les réalisateurs sont parvenus à exprimer la dimension malsaine de leur parenté par certaines scènes et détails savamment dosés et placés. Mathieu Amalric est idéal pour interpréter le prof séducteur et mélancolique, fasciné par le renouveau du printemps, par le plaisir d’une fumée chaude de cigarette contre le froid sec de l’hiver et à la fois poursuivi par de vieux démons et une migraine quotidienne. 

L’ensemble du casting est alléchant : on y trouve Denis Podalydès, Sara Forestier et Maïwenn qui tient là un de ses meilleurs rôles. Loin des critiques propres aux adaptations, les personnages de L’Amour est un crime parfait correspondent précisément aux physiques imaginés lors de la lecture du roman Incidences

© Gaumont Distribution

Les frères Larrieu s’accordent tout de même certaines libertés dans le but de mieux s’approprier le récit : le personnage de Myriam change de prénom pour Anna, les circonstances de la fin du film ne sont pas identiques à celles du roman (mais l’effet narratif et esthétique reste fidèle), et la saison du récit est légèrement différente. A travers des transformations scénaristiques, ils parviennent à exprimer dans leur mise en scène l’univers de l’oeuvre de Philippe Djian. 

Dans leurs longs plans en mouvement sur les routes enneigées et dans leurs cadrages maîtrisés sur les formes extraterrestres de l’Université, toutes en courbes et transparence, transparaît l’esprit feutré du style d’Incidences. L’ambiance anxiogène palpable du roman flotte sur le film dans la rigueur de la mise en scène et du choix de la musique. Caravaggio (non, ce n’est pas le peintre Caravage) réalise une bande originale électro aux tons modernes et mystiques comme l’environnement où évolue Marc. Piégé par son amour des corps jeunes et voluptueux, il flaire la manipulation en chaque personne et les nappes de Caravaggio synthétisent sa paranoïa. 

La parenté du film au roman va jusqu’à nous faire ressentir une certaine stérilité due à l’aspect psychologique très prononcé. Si celle-ci muait vers la séduction à l’écrit, la durée plus réduite du support cinématographique ne parvient pas au même résultat final. La stérilité du genre perdure et maintient hélas le spectateur à distance. Le revers de médaille d’une adaptation réussie. 

Marianne Knecht

Sortie en salles le 15 janvier 2013