Pire que l’épidémie de gastro, voici venue la fièvre acheteuse. Chaque année, la même rengaine : frappant ses victimes par millions à grands renforts de 60, 70 puis même 80%, les soldes font chauffer la carte bleue jusqu’à décimer la moindre trace de bon sens qui viendrait prévenir un achat inutile. Plus, plus toujours plus ! "Limitless", en un mot. Cédant volontiers à la pression consumériste et à l’euphorie de la promo, des millions de Français partent en croisade pour quérir le Graal dont ils se sont pourtant passés pendant tant d’années. D’optionnel, il leur est devenu indispensable, quitte à se taper la cohue dès l’entrée de la boutique et même poser leur dernier jour de congé, histoire d’être le premier dans les starting blocks. On ne plaisante pas avec le rabais, surtout en période de crise. Un vrai bal populaire.
Force du marketing créateur de besoins, même les plus réticents finissent par se plier à la tyrannie d’une consommation frénétique. Non pas pour activer le circuit de la récompense, plutôt de peur de se sentir "hors-jeu". Si personne ne souhaite passer à côté d’un bon plan, le danger de l’achat compulsif n’est jamais bien loin une fois mêlé à l’hystérie collective. Je suis donc j’achète, sur un coup de tête et parfois même par principe, pour que la voisine ne devienne pas l’heureuse héritière du dernier modèle. Mécaniquement, sans même prendre la peine de penser.
Entre compétition malsaine, folie dépensière et inutile, les soldes révèlent au grand jour les pires frasques de l’humanité, à coups de cadis bondés aux frontières de la boulimie. Économiser en dépensant : en voilà un beau paradoxe. S’il n’y a rien de honteux à vouloir profiter d’une belle promotion, encore faut-il le faire intelligemment pour ne pas retrouver sa propre matière grise au rabais. Prêt à porter, prêt à jeter.