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AuDen : "la Bretagne est mon point d’ancrage"

Publié le 17 janvier 2014 par Swann

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La première fois que mon chemin croise celui d’AuDen, c’est aux Francofolies de la Rochelle. Je ne le connais pas. On m’a juste dit "tu verras, c’est bien". "C’est bien" était un euphémisme. C’est une grosse vague que j’ai pris en pleine face lorsque je l’ai entendu. C’était au théâtre Verdière – le cadre était déjà somptueux -, il était accompagné de deux musiciens ce jour-là. Le concert était trop court mais suffisamment intense pour tomber sous le charme de ses chansons aux inspirations folk. AuDen, c’est Adrien à l’état civil. Un breton de 26 ans. Sa plume est poétique, ses mélodies soignées. Elle sont mélancoliques mais jamais mélodramatiques. Pour lui, les mots ont une importance. Il me semblait donc logique de lui soumettre à une interview différente des autres. Ici c’est de mots qu’on parle, parce que tout part de là.

La mer

Ma muse. C’est souvent comme ça que je la qualifie parce que c’est ma première source d’inspiration. C’est moi, ma vie, tout simplement.

L’amour

Je ne peux pas dire que c’est ma muse, parce que ce n’est pas ça… Disons que tout est affaire d’amour.

La mélancolie

Hugo disait que "la mélancolie, c’est la joie d’être triste". Je le rejoins totalement. Je trouve qu’il y a quelque chose de beau dans la tristesse. Dans les chansons aussi. Dans les mots employés, dans les accords qui vont avec. Après, il y a des chanteurs qui chantent des choses très tristes sur des mélodies très punchy comme Stromae…

Le folk 

Ah le folk ! C’est mon premier amour. C’est une institution musicale pour moi. Mon adolescence a été rythmé par la découverte de la planète folk avec ses chanteurs comme Bob Dylan, Joan Baez, toutes les légendes. C’est la musique qui me parle. Le songwriter seul à la guitare, c’est ce que j’aime.

*Aparté numéro 1

Tu penses que tu es un chanteur folk ?

J’ai l’habitude de dire que je fais du post-folk parce que je pense faire un folk un peu plus contemporain. Mes bases viennent du folk, dans le fingerpicking, dans ma façon de jouer. C’est ma trame de fond.

Et un chanteur folk, est-ce que c’est juste un mec avec sa guitare ?

Wow, c’est quoi un chanteur folk ? Tu me poses une colle…Quand on dit chanteur folk, on a tout de suite l’image des grands de ce monde, comme Bob Dylan. (silence)… Je crois que c’est trop tôt pour le savoir. J’ai besoin d’une carrière pour savoir ce qu’est un chanteur folk. *

Le français ?

C’est une chance. Ma chance. Je suis un enfant des poètes français… Quand je dis un enfant, ce n’est pas parce que je ne me considère pas comme poète, c’est juste que je suis un enfant de cette culture-là. Et on a de grands auteurs. Hugo, Baudelaire… Dernièrement, je suis allé plus loin. J’ai lu une phrase de Victor Hugo qui disait "je serai Chateaubriand où rien du tout", du coup je me suis plongé dans Chateaubriand. Sa tombe est en face de la plage du Sillon, tu le savais ? Pour revenir au français, disons que c’est mon moteur, je n’ai jamais voulu écrire dans une autre langue, ce serait mentir.

La poésie ?

Ça fait partie de moi, c’est une thérapie, un exorcisme, c’est la seule façon pour moi de tirer une part de bonheur dans la tristesse quand je couche des maux sur le papier. C’est une façon de me guérir… La tristesse est ce qui me parle le plus, mais je ne suis pas un gars triste ou mélancolique, j’ai le goût des belles choses…et des fleurs comme disait Bertrand Belin !

*Aparté numéro 2 :

Quand Musset dit "les chants les plus désespérés sont les plus beaux", tu es d’accord avec lui ?

Complètement. C’est le cœur qui est touché en premier quand j’écoute des chansons tristes ou du folk.*

La Bretagne

C’est comme la mer, c’est ma terre natale, j’y ai vécu jusqu’à mes 24 ans -j’en ai 26- j’ai toujours été casanier, je n’ai pas vraiment eu le loisir de voyager beaucoup… la Bretagne, c’est une partie de moi qui restera toujours. C’est mon point d’ancrage.

Paris

Je l’appelle la ville sans pardon… Je n’y ai toujours pas de repères et bizarrement ça influe sur mon comportement, sur ma façon d’être avec les gens… Disons qu’il est encore trop tôt pour que je trouve un qualificatif à cette ville parce que je m’y cherche encore.

Le voyage

Le voyage est un des thèmes principales de mon album puisqu’il parle d’évasion, d’une envie de se barrer. Quand je dis que je suis casanier c’est parce que je voyage beaucoup dans mon for intérieur. Je rêve de voyage, malheureusement je n’ai pas le temps, j’essaie de combler par les mots.

Dominique A

Je pense que je suis moins apte à en parler qu’un garçon comme François Mary qui l’écoute beaucoup et ça se sent dans sa façon d’écrire. C’est quelqu’un que j’admire beaucoup, de par sa démarche et par son personnage. Je pense que c’est quelqu’un qui faut que l’on compte parmi nos plus grands auteurs de ces dernières années. Je l’ai connu sur le tard, on m’a dit beaucoup de bien de la Fossette, moi je l’ai découvert seulement avec le dernier album, j’ai trouvé que c’était un gars très fort. J’aimerais bien travailler avec lui…

* Aparté numéro 3 :

on est beaucoup à avoir découvert Dominique A sur le tard…

C’est assez fou… comment ça se fait ? Parce que cet album ne comporte pas des tubes…Est-ce que c’est l’album le plus accessible ? Accessible, je ne dirai pas ça parce que c’est hyper chiadé et pas très populaire…*

Bon Iver

Ah Bon Iver ! Avec Sigur Ros, ce sont des gens qui ont bouleversé ma vie. Quand j’ai entendu les premières chansons de Bon Iver je me suis pris une grosse claque et c’est quelqu’un qui ne me quitte jamais. Il a tellement innové que grâce à lui j’ai redécouvert une partie du folk et une partie de l’électronique. Il fédère beaucoup de monde avec des chansons très simples mais tellement complexes à la fois. Je pense que ce mec-là tient du génie. Je l’écoute tous le temps, j’ai même besoin de l’écouter et c’est un des rares artistes qui attisent encore ma curiosité. Je trouve qu’il a fait un travail de fou avec Volcano Choir, on retrouve sa patte. En peu de temps, ce mec est devenu une vraie référence. Pour moi, il a juste bouleversé ma vision de la musique et il a totalement influencé ma musique.

La chanson française

J’en ai très peu écouté. Ma famille n’était pas un public averti. J’ai découvert Gainsbourg vers 17 ans… Je ne me sens pas très apte à en parler parce que je n’ai pas brassé tout l’éventail de la chanson française. Je connais les grandes chansons mythiques. En tout cas, je trouve que quand les mecs sont bons, quand le texte est maîtrisé, quand les mélodies sont belles tu atteins un espèce de statut, t’effleures la première classe. Quand chaque mot a un sens c’est beau. Quand c’est très mal fait, c’est inaudible. Je ne peux pas écouter de la chanson française si ça ne me fait pas rêver.

Aparté numéro 3 :

Qui te fait rêver ?

En chanson française actuelle ? François Marry… Et, je suis aussi complètement admirable du minimalisme de Bertrand Belin. Il écrit un texte de dix lignes pour une chanson qui fait quatre minutes et pendant ces quatre minutes, il arrive à suspendre le temps. Par exemple, sur "Neige au soleil", le refrain c’est "tu cours, je cours, tu cours devant" et il répète ces mots, c’est tout…

La scène

La suite logique de l’album. En studio, j’ai le loisir de me cacher, je peux prendre mon temps. Je peux revenir sur les choses, avec la scène c’est pas possible, c’est une mise à nu. T’as quarante minutes, tu donnes ou tu ne donnes pas. Et en même temps, c’est un ascenseur émotionnel, tu passes par des millions d’état, ça a le don de me terroriser autant que ça me pousse. C’est encore un terrain inconnu à conquérir. J’avais très peur sur mes débuts, en même temps je ne cherche pas à ne plus avoir peur.

2014

C’est mon année ! C’est l’aboutissement de quatre ans de travail. C’est comme une pomme et je croque dedans.

Un rêve

Travailler avec Bon Iver ? (rires) Le rêve, c’est ce que je vis en ce moment, tout simplement. Quand j’étais jeune, j’ai rêvé de ça. D’être sur un label, d’être accompagné, de pouvoir être entendu, j’ai rêvé de pouvoir faire ce que je veux faire. J’ai réalisé il y a deux jours que ça faisait deux ans que je me levais sans contrainte d’horaire, que je fais mon métier et que lorsque j’ai envie d’arrêter, je m’arrête. C’est pas ça le rêve ?

Propos recueillis par Sabine Swann B.

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A savoir :

En concert le 29 janvier à l’Olympia (P. Lapointe) au Café de la Danse le 7 avril.

E.P déjà disponible, premier album à paraître le 24 mars.

Merci à Nina V.


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