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« Vendre les médicaments en GMS ne fera pas baisser les prix»

Publié le 23 avril 2008 par Mcabon

Réseau Santé propose ses services en tant que centrale de référencement, voire d’achats, de structure de conseil pour près d’un tiers des 1.100 officines bretonnes. Bernard Moyon, son dirigeant, revient dans cette interview sur l’offensive menée par les grandes surfaces et en particulier Leclerc, sur la possibilité d’y vendre les médicaments déremboursés.

Michel-Edouard Leclerc souhaite vendre des médicaments déremboursés dans son enseigne. En quoi est-ce inquiétant selon vous ?

Nous avons l’impression de revenir 20 ans en arrière. En 1988, sous la pression de Leclerc et de Mammouth, le gouvernement avait permis aux grandes surfaces de vendre les laits maternisés. Déjà on nous annonçait que les prix seraient inférieurs à ceux des pharmacies. Et ce alors que nous les vendions presque à prix coûtant, une tradition depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. Des enquêtes récentes (nous avons fait constater les prix par huissier) montrent que ces laits sont aujourd’hui plus chers dans les GMS que dans les pharmacies. Voilà la dure réalité des chiffres. Leclerc réalise des campagnes de communication massives qui sont mal vécues par la profession, accusée sans qu’elle ait les moyens financiers pour répondre avec la même ampleur. Les médicaments ne sont pas des produits comme les autres. Ils nécessitent une expertise particulière afin d’éviter d’éventuels effets négatifs. L’assurance-maladie dépense chaque année 2,2 milliards d’euros en raison d’un mésusage des médicaments.

Leclerc pose cependant une question pertinente, celle du prix des médicaments…

Le prix des médicaments est fixé par l’Etat qui l’impose aux laboratoires et aux pharmaciens. Quand les médicaments cessent d’être remboursés leur prix augmente inévitablement. Pour plusieurs raisons, primo parce qu’ils changent de taux de TVA, deusio, le déremboursement entraîne une chute des ventes que l’industriel cherche à compenser par une augmentation des prix en les ramenant au niveau du marché européen. Il faut que Monsieur Leclerc comprenne que libéraliser c’est accepter une augmentation importante des prix des médicaments.

L’Union européenne demande avec insistance à la France de libéraliser ce marché. Comment allez-vous réagir ?

Nous demandons aux pharmaciens membres de notre réseau de se mobiliser pour sensibiliser leur clientèle à ces évolutions. De plus, nous cherchons à développer des services supplémentaires, de conseils grâce à la proximité. La santé n’est pas une marchandise. La France se doit défendre cette vision. L’Union européenne s’attaque en ce qui concerne les pharmacies à trois piliers fondamentaux de notre système, la propriété, qu’elle veut voir ouverte à des actionnaires classiques non-pharmaciens, le monopole de distribution, brèche dans laquelle veut s’enfoncer Leclerc, et la répartition démogéographique. Nous sommes dans la situation des stations-service il y a une vingtaine d’années. Elles couvraient le territoire et aujourd’hui ont quasiment disparu. Une pharmacie dans un patelin c’est aussi important qu’un service public, c’est un service public.

Propos recueillis par Mikaël Cabon, à Brest

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