Le gouvernement maladroit
"Il ne s'agit pas de patrons, il s'agit d'entreprises"
Michel Sapin était ce jeudi soir sur France 2 pour tenter de (nous) convaincre sur ce socialisme de l'offre. Le ministre du Travail peinait. Il était certes convaincant pour expliquer que les cotisations familiales n'avaient techniquement rien à voir avec le travail, à l'inverse des cotisations retraite, ou chômage. Mais le raisonnement était court. On pourrait l'appliquer aux cotisations maladie.
"Le bateau doit accélérer"... Le ministre multiplie les métaphores nautiques ou pire encore. Michel Sapin s'enferme. Le chroniqueur économique François Langlais balance ses tableaux illustrés pour minorer l'effort de compétitivité. Une Peugeot 208 à 12.300 euros coûterait 12.200 euros de moins... seulement. Exemple biaisé pour résumer une réforme.
Ce plateau télé, un temps dérangé dans sa complaisance superficielle, par un Olivier Besancenot en mode Duracel, ratait l'essentiel: la précarité. Que dit-on sur la précarité ?
Rien, pas grand chose.
Arnaud Montebourg, son collègue du redressement Productif, a fixé la barre plus haute. Il veut deux millions d'emplois créés sur 5 ans.
Les éditocrates satisfaits
Est-ce un objectif politique ? Un à un, ils cèdent pourtant.
"C'est donc par une baisse des prestations sociales que les 50 milliards d'euros d'économie vont se faire?" Christophe Barbier, le patron de l'Express, s'inquiète à peine. Il cherche le scoop, la confirmation. C'était une autre "révélation" de cette nouvelle année. Les éditocrates néo-lib en tous genres pouvaient-ils jouir en toute plénitude ?
Le matin même sur France Culture, Brice Couturier applaudissait au virage social-libéral, et priait, dans son éditorial matinal, pour cette victoire d'une gauche qu'il qualifiait de "moderne".
Plus loin, dans les colonnes du Point, on pouvait lire Franz-Olivier Giesberg se régaler. Jeudi soir sur France 2, dans cette même édition de Des Paroles et des Actes, il délire gentiment dans l'enthousiasme: "C'est un grand discours qui sera demain dans les livres d'Histoire!" Dans les colonnes du Figaro, on est troublé. Au Monde, on cherche les différences entre Hollande et Sarkozy en matière économique. Le journal oublie la politique sociale. Sarkozy avait lancé l'offre raisonnable d'emploi, la suppression de l'exemption de recherche d'emploi pour les ré-retraités, les contre-parties horaires au RSA, etc.
Chez Marianne, les critiques sont de mises. Jack Dion s'indigne contre le "néolibéralisme de démission". Le Monde Diplo est tout aussi sévère. Politis est sans surprise sur la même longueur d'onde.
La gauche déboussolée... ou pas.
La droite se déchire. L'UDi va soutenir, l'UMP se divise. Hollande fait du Sarko, comment s'opposer en restant crédible ?
Pire, les sondages s'accumulent. Le pacte de responsabilité est "plébiscité" dans les sondages. On connaît les limites de l'exercice. D'après un sondage CSA réalisé pour Les Echos, Radio Classique et l’Institut Montaigne, voici donc 69% des sondés qui adorent le Pacte de responsabilité. D'autres, publiés avant la conférence, donnaient les mêmes résultats.
Malgré les marges d'erreur, les mêmes tendances sont observés parmi les sympathisants (autodéclarés) de gauche. A gauche, donc, il parait que le Pacte séduit. En fait, la fiabilité des contreparties aux réductions de cotisations des entreprises est l'élément clé.
Surprise ?
Pour Hollande, la
Sa majorité parlementaire est en passe de rester solidaire. L'aile gauche du PS a prévenu qu'elle ne désavouerait pas le gouvernement sur le seul pacte de responsabilité.
Une autre victoire ?
C'est là le paradoxe. Hollande rétrécit son positionnement politique, accumule des soutiens inespérés, sans pour l'instant déstabiliser ou remanier son propre camp.
A suivre.
Crédit illustration: DoZone Parody