Cosider Group est l’une des plus grandes entreprises nationales publiques du BTP en Algérie, dirigée depuis quelques années par M. Lakhdar Rekhroukh. Le groupe est en passe d’atteindre 100 MDA de chiffre d’affaire annuel. Nous sommes allés à la rencontre de ce champion national pour en savoir davantage sur les évolutions futures de son marché. En dépit de la rude concurrence internationale qui règne sur le marché du BTP en Algérie convoité de partout, le groupe se démarque déjà en se constituant régulateur et en rempart à ses concurrents nationaux publics et privés par le prix, son volume d’affaire, le nombre de filiales, soit au nombre de 13 dans divers domaines de la construction, aussi bien de la construction routière, des ouvrages d’art, que de la pose du pipe, en passant par Alrem, une unité de modernisation des matériels et grand employeur national (25 000). En dépit de sa position de leader mondial dans la pose du pipe, notamment du 48 pouces de diamètre, de l’exclusivité nationale à pouvoir maîtriser la technique de la réalisation des tunnels autoroutiers, métros aux multiples contraintes, pour M. Rekhroukh, celles-ci tombent dans le domaine du courant.
«Boulimique», voulant tout réaliser est le maître mot pour le qualifier. Il souhaite relever d’autres défis en développant d’autres activités, notamment dans le secteur du transport qui
pèsera dans l’avenir. Même s’il a été talonné dans certains projets, l’avenir est au vert pour Cosider au vue de son plan de charge sur les cinq prochaines années.
Suivons-le.
BTP Algérie : Cosider, acteur majeur, chef de file des entreprises nationales dans le BTP, l’est-il toujours et selon quels paramètres il occupe ce positionnement ; est-ce par rapport à sa certification, la taille des projets… et, si possible, avec chiffres à l’appui, en tant que numéro 1 face aussi bien à une concurrence nationale qu’internationale ?
M. Lakhdar Rekhroukh : Effectivement, par rapport au chiffre d’affaire (CA), Cosider est depuis un certain temps leader dans le secteur du BTP à l’exception d’une ou deux entreprises de l’Afrique du Nord, à savoir égyptienne ; sinon de manière générale, c’est la plus grande en Algérie et l’une des plus grandes en Afrique. Elle l’est de par le volume de ses activités et aussi les montants de ses projets. Cosider maintient ce positionnement depuis les années 2000, grâce à son chiffre annuel, la qualité de ses réalisations et sa certification.
On est parmi les premières entreprises en Algérie certifiées dans le BTP. Nous avons initié nos certifications depuis les années 1990, notamment avec la filiale Canalisations qui intervient dans la pose des pipes où les normes exigées sont draconniennes. Nous le sommes aussi par les évolutions de chaque filiale, car c’est bien beau d’être acteur de premier plan, mais il est difficile de le rester. Donc, de ce point de vue, nous sommes en constante progression d’une moyenne annuelle de l’ordre de 15%. On a enregistré des évolutions pour certains exercices de l’ordre de 25%, voire 30%. Nous avons clôturé l’année 2012 avec un CA de 74,4 MDA de dinars et nous comptons dépasser les 100 milliards de dinars en 2013. Maintenant, si vous insinuez en volume, c’est-à-dire au plan de charge, le carnet de commandes du Groupe Cosider est de 500 MDA.
Justement, quel est le créneau le plus porteur en ce moment selon, évidemment, les secteurs ?
Actuellement, toutes activités confondues. Le plus gros plan de charge au niveau de l’entreprise est le volet transport, soit les lignes ferroviaires. Et même si celui-ci n’a pas pesé sur les exercices 2012 et 2013, il sera prépondérant sur les années à venir.
Sur combien d’années, et pourrait-on savoir dans combien de projets allez-vous intervenir ?
Les projets des voies ferrées tournent autour de 4 ans, c’est cela la norme, et bien sûr pour ceux dépassant les 100 km par projet.
Pour notre plan de charge, nous avons globalement à réaliser plus de 700 km de voies ferrées qui sont en chantier, certains sont bien entamés, d’autres en phase de démarrage. Je peux vous citer quelques-unes notamment celles de M’sila-Bougzoul, Laghouat-Djelfa, Djelfa-Bougzoul, Bougzoul-Ksar elBoukhari, Béni Mansour-Béjaïa et, en cours de négociations, Berrouaghia-Chiffa.
Aussi, nous avons en cours le métro d‘Alger sur le trançon El Harrach-Aéroport d’Alger et Aïn Naâdja-Baraki
On parle beaucoup de retard ; à quel pourcentage êtes-vous avancé sur les projets énumérés ?
On vient de démarrer la partie Bougzoul-Ksar el-Bboukhari, et concernant M’sila-Bougzoul, les travaux de génie civil sont quasi terminés et bientôt on commencera la pose des voies ferrées. Le reste est en cours de démarrage suivant le planning des travaux.
Nous avons également six barrages en construction au terme du programme 2011. Deux à Souk-Ahras, un à Damous, un à Msila et un à Laghouat. Une bonne partie a vu son lancement en 2012. Et en plus de 33 000 logements majoritairement sociaux, nous avons quelque 6 000 logements en négociation en termes de prix et de délais.
Et la qualité ?
La qualité ne se négocie pas, il faut respecter les règles de l’art. Ce qui se négocie, c’est la qualité des finitions. 4 m2 de faïence dans une cuisine dans un logement social, ou une cuisine totalement faïencée, dans le cas du logement promotionnel, les pré-installations ou équipements de commodité, tout cela se discute, car ça a un prix.
Cela dépend de comment est-ce qu’on définit la qualité ; est-ce celle de la réalisation ou du standing ? Évidemment, la qualité de réalisation ne se négocie pas et c’est dans la réalisation qu’on est exigeant ; il y a des règles de l’art à respecter, mais le standing ça se négocie.
Nous concernant, notamment sur les gros œuvres, nous n’avons jamais eu de problèmes. D’ailleurs, vous devez le constater : Cosider est réputée pour sa qualité de réalisation et la résistance de ses ouvrages. Pour preuve, le séisme de 2003, le groupe Cosider a été mis au devant de la scène pour la qualité de ses réalisations et la résistance des ses ouvrages.
Vous voulez dire que vous avez anticipé et respecté des normes sismiques compte tenu de l’aspect géologique de la région algéroise ?
Il se trouve qu’Alger est dans une zone sismique. Il y a des études qui sont faites avant toute réalisation et il faut respecter les qualité et norme des bétons utilisés, etc. Il y a des études d’exécution à faire qui précèdent tout projet de réalisation où tous les paramètres sont normalement pris en compte. C’est une exigence nationale, et elle est soumise au contrôle technique.
Maintenant, s’il y a des constructions qui ont fait l’objet d’études, sachant que celles-ci ont été adoptées par le contrôle technique et qu’elles se sont avérées bonnes, donc il faut voir ce qui ne va pas au niveau des réalisations. Au plan études, il y a un fait national qui n’est pas le propre de Cosider. Il y a des études d’exécution à faire ; elles sont contrôlées. Il faut plutôt regarder ce qui se passe pendant la réalisation. En tout cas, nous à Cosider, nous respectons nos engagements de qualité.
En effet, Cosider a conquis ce capital expérience à construire dans la qualité grâce à son riche plan de charge, ses partenariats ou à la base par précepte même de l’entreprise publique ?
La qualilté des constructions est le fait d’abord d’une gestion qualifiante d’une entreprise, de la qualité de son mangement, c’est cela aussi qui impulse l’exigence de la qualité au sein-même de l’entreprise ; la qualité de l’ouvrage passe par la qualité de gestion de l’entreprise-même. Il faut d’abord qu’elle soit une entreprise économique et assurant son développement, sans cela, elle ne pourra pas faire dans la qualité. Il faut que l’entreprise ait une démarche qualitative qui passe aussi par le développement de la ressource humaine, et nous concernant, nous avons axé nos efforts sur ce point-là.
Justement, vous avez le titre aussi d’une entreprise grand employeur national, d’où puisez-vous cette ressource humaine étant donné que certaines entreprises par défaut vivent cela comme un frein à leur développement, et comment réussissez-vous là où les autres sont en panne ? Est-ce que vous êtes de l’avis qu’il y a problème de formation ?
Cosider est un gros employeur en Algérie ; il comptait 25 000 employés en 2012 ; un chiffre appelé à augmenter compte tenu du plan de charges, et il faut gérer cette masse de travailleurs. Vous dites qu’il y a un problème de ressource humaine qualifiée qui se pose aux autres. Me concernant, je me pose la question suivante : est-ce réellement un problème de formation ou d’intérêt ? La formation à mon sens n’est qu’une partie du problème, car nous concernant, nous avons été confrontés en 2001, lors de la réalisation des 9 000 logements AADL, mais nous avons contracté un partenariat entre le ministère de la Formation professionnelle et le ministère de l’Habitat pour prévoir des cycles de formation pour répondre aux besoins qui se font sentir dans le bâtiment. Aujourd’hui, nous n’avons pas vraiment beaucoup de problème, nous assurons en continu des cycles de formation de mise à niveau. Sur les gros œuvres, le problème ne se pose du moins pas pour nous.
Nous avons acquis la maîtrise et l’expertise et nous la préservons. La problématique de ressource humaine ne se pose que pour les corps d’état secondaires, mais nous maîtrisons la situation, nous avons axé des efforts particuliers. Notre personnel est formé régulièrement, on le fait généralement en partenariat avec le ministère de la Formation professionnelle qui assure des formations à la carte. Aujourd’hui, il y a tellement de flexibilité sauf si les gens ne veulent pas ou sont désintéressées. On vous permet même d’ouvrir des cessions pour un projet avec des cycles définis au préalable à la période souhaitée de l’année. Maintenant, au plan qualité, le secteur de la formation doit évoluer avec son temps et cela doit se faire en partenariat pour faire évoluer la qualité de la formation.
Chez Cosider, on pense qu’il faut asseoir une autre politique pour les corps d’état secondaires ; si jusque-là on a soustrait les travaux auprès de la petite PME qui vient réaliser, mais ne disposant pas de moyens de former son personnel, et généralement, c’est à ce niveau que se pose le problème de qualité. A Cosider, on pense qu’il faut aller vers le tâcheronnat. Un personnel de Cosider formé, informé et responsabilisé nous permettra d’améliorer qualitativement les œuvres ; on lui donnera le travail à la tâche et on gérera la formation, car en sous-traitance, on ne peut pas se substituer à l’employeur (PME) qui ne dispose pas suffisamment de moyens et, donc, on ne peut pas non plus former à sa place son personnel. Il y a un problème d’intérêt, et pour cela il faut intéresser les jeunes.
Acteur de premier plan en Afrique, à quand l’exportation de votre savoir-faire vers le continent ?
Au niveau national, on possède des références qu’aucune autre entreprise n’a encore réalisées ; autrement dit, elles ne maîtrisent pas encore les techniques utilisées dans certains ouvrages complexes. Et puis, il y a tellement de défis à relever en Algérie que nous ne regardons pas encore ailleurs. Cela n’est pas totalement à écarter, si certaines complexités viennent à être levées, telles que les systèmes bancaire et douanier.
Karima A.
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