Quatrième de couverture :La Langue d’Altmann est le premier livre publié par Brian Evenson, en 1994, alors qu'il était encore membre de l’église mormone. On comprend vite à sa lecture pourquoi une congrégation aussi stricte a préféré prendre ses distances avec l’écrivain… Dans La langue d’Altmann, tous les thèmes chers à Brian Evenson sont déjà présents : le motif du double, les liens parent-enfant, le fanatisme, le rapport au meurtre, etc. On y retrouve aussi cet humour noir, héritier de Kafka et de Beckett, dont Evenson, en grand maître de l’absurde, use avec un talent étonnant. Que ce soit en quelques lignes – comme avec la percutante Tragique histoire abrégée du Barbier d’Auschwitz – ou dans le format d’une novella – L’affaire Sanza, un mini-polar riche en énigmes et revirements qui n’a rien à envier à Thomas Harris… –, Brian Evenson sait varier les styles et les approches, tour à tour faulknérien, borgésien, kafkaïen… Un paysan qui découvre sa fille morte et l’enterre sans même en parler à sa femme, un couple inquiétant qui cherche à se débarrasser de chatons et peut-être d’autre chose, un père qui semble pousser ses proches au suicide les uns après les autres, une confrérie assiégée qui s’élimine elle-même… À chaque fois, dans une langue impeccable et corrosive, Evenson sonde l’âme humaine, abandonnée à son mystère ou à sa vacuité. Les personnages qu’il met en scène nous frappent par la force absurde de leurs convictions et errements, nous rappelant que ce qui constitue peut-être l’humanité est avant tout l’aveuglement.
«La Langue d'Altmann m'a bouleversé par sa puissance, par sa langue, son style inhabituel, par sa violence et la force de ses mots. J'admire ce livre ! » Gilles Deleuze
« J'avais eu raison de tuer Altmann, pensai-je. Entre tuer et ne pas tuer Altmann, j'avais choisi la première solution et ce choix, en fait, était le bon. Nous passons notre vie à faire en permanence des choix. Il existe des gens, comme Altmann, pour lesquels, quand vous leur avez tiré une balle dans le crâne, vous savez que vous avez agi correctement. Ce sont les gens comme Altmann qui font que tout le reste a un sens, pensai-je, alors que des gens comme Horst, une fois tués, ne font qu'ajouter à la confusion. Le monde est peuplé d'Altmann et de Horst, les premiers, il convient de les truffer de plombs à la première occasion, les autres, on doit peut-être les tuer, peut-être pas : qui le sait ? »
La Langue d'Altmann est une plongée dans un univers absurde et cruel, régenté par un Dieu aveugle, où les hommes n'ont de cesse d'explorer à leur corps défendant les limites de l'inhumanité. Avec ce premier livre publié en 1994, Brian Evenson se pose d'emblée en grand architecte du bizarre.