Il y a des voisins charmants, d’autres encombrants… Des voisins qui vous racontent leur vie, comme ça, sans raison, ou d’autres qui vous apportent des légumes de leur jardin, par pure gentillesse…
Les voisins, il est parfois difficile de faire avec, mais encore plus difficile de faire sans…
Je l’avoue, j’ai de la chance, j’ai toujours eu d’excellents voisins… Certains sont même devenus des amis…
J’ai quand même un voisin un peu particulier… Enfin, pas le voisin de la maison juste à côté, mais suffisamment proche pour être néanmoins qualifié de voisin… Ce voisin, je l’ai gardé, même après mon déménagement, il n ‘y a pas si longtemps… D’où l’intérêt de changer de nid, sans trop s’éloigner quand même…
Ce voisin est adorable, parait-il… Du genre voisin idéal… Souriant, avenant, ouvert à la discussion, et plein d‘humour… Cela me contrarie fort, (vraiment très fort…) parce que moi, ce voisin en question, je ne l’ai jamais rencontré, jamais… Pourtant, ce n’est pas faute de passer près de son cottage, d’aller boire un café dans son repaire, ou de tendre l’oreille, pour connaitre mieux ses petites habitudes…
Cela amuse beaucoup mon homme, ce petit jeu de mon éternelle question: "tu as rencontré le voisin ??? " Non, parce que le pire, c’est que moi, je me donne un mal d’oiseau, à essayer de croiser sa route, alors que mon andalou, sans aucun mal, tombe dessus, de temps en temps…
Et puis, il n’y a pas longtemps, j’ai eu droit à la petite question qui fâche : "mais tu lui dirais quoi, si tu le rencontrais ? "
Grosse angoisse… Que lui dire, effectivement, en pareille circonstance ???
Le problème, c’est que mon voisin, Phil, est du genre connu… Ce n’est pas vraiment un problème au fond, parce que des voisins connus, j’en ai plein, mais c’est toujours plus délicat à aborder, un voisin connu, lorsque l’on a aucune envie de passer pour une pie curieuse… Mon si discret voisin, je l’aime depuis longtemps, même avant que nous devenions voisins… Mais ce n’est pas parce que j’ai plein de trucs de lui, dans mon ipod violet, que cela me donne de l’imagination, pour l’aborder avec tact et intelligence…
De quoi lui parler, donc, à ce voisin qui m’intrique par son invisibilité ?
Après multiples réflexions, j’ai bien eu quelques petites idées :
- lui proposer de profiter de ma carte de rabais personnel chez Jumbo, dans le cas où il serait intéressé par l’achat d’une nouvelle tondeuse… (pitoyable…)
- lui offrir les services de mon chien, dit "chouchou les grandes pattes", pour creuser une nouvelle piscine… Non, parce que c’est vrai, je vous l’assure, ce n’est pas un chien, que j’ai, c’est une armée de taupes… (navrant…)
- lui apporter mon aide juridique, pour se protéger des paparazzis indésirables (il n’y en a malheureusement aucun en vue…)
- lui parler musique… C’est une bonne idée, ça, de lui parler musique, technique, tablatures… Sauf que si mon andalou, excellent guitariste, n’est pas à mes côtés à ce moment là, je risque un grand moment de solitude…
- lui avouer que mon homme a comme référence musicale, son copain Peter Gabriel, au registre (selon lui…) beaucoup moins "commercial", mais que moi, c’est lui, Phil, que je défend toujours… (affligeant…)
- lui confier que je trouve son petit grain de voix absolument sexy… (ça fait proposition indécente…)
- l’inviter à la fête des voisins, en lui proposant de venir déguster l’une de mes délicieuses tartes, en en lui précisant que mon oiseau rare, chante à tout bout de chant champ que je suis "la reine des tartes" ! (consternant…)
- lui demander carrément un autographe… Le genre de truc qui ici ne se fait pas, et dont, d’ailleurs je serai bien incapable…
- lui parler de la météo, de mes géraniums, de mon envie folle de palmier, de mes erreurs, parfois, en matière de tri dans le composteur, de la vie, de l’amour, de mon cancer, de mon addiction à tout ce qui contient de l’amande, du prochain match de hockey que je me réjouis d’aller voir, de mon restaurant préféré, ou de tant d’autres banalités à pleurer…
Finalement, tout bien réfléchi, un voisin invisible, c’est carrément rassurant !… Pas de conversation à soutenir et aucune crainte de passer pour une harpie inquisitrice…
Tant pis, peut être qu’un jour, qui sait, sans y penser, il sera là, devant moi, et je ne le verrai même pas, perdue dans mes pensées, et une chanson de lui à mes oreilles…