M.Hollande
est d’une « inquiétante légèreté » dit le Monde. Effectivement,
M.Sarkozy semblait croire à sa politique et être affecté par son insuccès. M.Hollande,
lui, connaît l'idylle au milieu du chaos. Alors, que penser
de sa dernière décision ? Choix réfléchi ?
Offre contre demande
Premier moyen d'aborder la question. M.Hollande avait (grossièrement) deux options. Agir sur l’offre,
ou sur la demande. En admettant que la France n’ait plus les moyens de la
seconde, elle pouvait chercher à s’entendre avec l’Allemagne pour qu’elle
relance sa consommation, donc nos exportations. D’où cercle vertueux. Les
entreprises font des bénéfices, elles embauchent, le chômage baisse, les impôts
rentrent, la dette fond, et l’Etat peut réduire les charges sociales. Politique
keynésienne, généralement associée à la gauche.
M.Hollande en appelle à l'offre. Il réduit les charges
sociales. L’amélioration de la compétitivité des entreprises devrait entraîner
celle de leurs affaires, des embauches… Même phénomène que précédemment.
Une politique déflationniste
Comment départager ces deux options ? L'entrepreneur embauche quand son avenir est prévisible. Sinon, il économise. (Comme nous, au fond.) En outre, nous dit-on, le système éducatif ne fournit pas la main d’œuvre dont a besoin l’entreprise. Elle a besoin d’immigrés. Si vous étiez dirigeant, que feriez-vous ? Il y a une autre façon de voir la question. Le monde, et particulièrement
l’Europe, est en danger d’une déflation disent
les économistes. C'est à dire ? Une spirale de contraction, prix, emploi, marché. M.Hollande a choisi une politique de réduction de coûts, une politique déflationniste. Deuxième façon de voir le problème.
La France de Dickens
Troisième acte de la discussion. Lorsqu'elle a été appliquée, quels ont été les résultats de cette politique ?
M.Sarkozy a réduit la TVA de la restauration. Notre taux de chômage a-t-il baissé ? Et
l’Allemagne de M.Schröder, l'exemple type ? Inégalités sans précédent. En dépit de sa prospérité
apparente, le pays souffre. Surtout, il est possible qu'en démolissant son système d’assurance social, l’Allemagne
ait acquis un avantage sur le reste de l’Europe, dont elle a aspiré le marché. Parasitisme ? En
faisant de même, nous pouvons récupérer un peu de ce qu’elle nous a pris. Bien
sûr. Mais à force d’action et de réaction, on risque de se retrouver dans la
situation des années 20. Plus aucune protection sociale, et un peuple fort
méchant. Le danger est ici ? Cette politique pourrait
réussir à court terme, en nous balançant dans un cercle vicieux ?
Or, nous sommes proches des années 20. Le service public a
été privatisé. Une grosse partie de la population a un statut précaire
(intérimaires, autoentrepreneurs, intermittents du spectacle, enseignants
vacataires, chômeurs, stagiaires... mais aussi PME sous-traitantes). Ce qui empêche
tout ce monde de ressentir les conséquences de sa situation, c’est l’Etat. Non
seulement il paie pour notre santé et notre chômage, mais encore il tient une partie de nos entreprises à bouts de bras, par son CIR et ses commandes.
Si, à court ou moyen terme, le pari de M.Hollande ne fonctionne pas, l’Etat sera
surendetté. Il devra liquider notre système de solidarité. Pour savoir ce que cela signifie, relisons
Dickens ?
Méritons-nous un mauvais sort ?
Ce qui précède fait une hypothèse implicite : la décision de M.Hollande doit être jugée en fonction de ses impacts économiques. Et si elle obéissait à d'autres critères ? Il est injuste que le pauvre soit nourri par la
solidarité nationale lit-on dans la presse anglo-saxonne. C’est une vieille
idée protestante, qui plaît au possédant. Le pauvre est maudit par
Dieu, et le riche récompensé pour son mérite. Depuis quelques temps, la
population s’est convaincue de ce principe. Elle pense qu’il y a des
criminels, des parasites, qui causent la faillite du système. Il faut les
punir. Et ce, sans comprendre que le parasite, c’est elle ! Le
message de The Economist et d’autres est simple bon sens : pourquoi
vouloir faire le bonheur d’autant de crétins ? Vas-y Hollande, tu as
réussi, profite de la vie, et laisse crever cette racaille !
Cependant, l’espèce humaine est conditionnée par son
environnement, dans d’autres circonstances, elle pourrait être aimable. Elle l’a
prouvé par le passé. Nous sommes donc en face d’un choix. Voulons-nous demeurer déplaisants ou devenir sympathiques ?