La décision du Sénat de ne pas lever l'immunité parlementaire de Serge Dassault illustre à nouveau combien la République est malade de la Vème République. Malade d'institutions sclérosées et obsolètes qui sont la négation même de la démocratie.
Cette décision prise dans le secret le plus complet par une poignée de sénateurs prive la justice de moyens d'actions nécessaires à l'établissement des faits...
Plutôt que de répéter ce qu'ont publié et bien dit mes camarades des blogs 6.0 sur cette affaire [1] [2] [3] [4] [5], je vais tenter de traiter de l'insécurité qui règne dans cette Vème République où tous et toutes les citoyen-ne-s n'ont pas droit à la tranquillité publique, à la sécurité et à la justice. Une justice, d'après Pierre Joxe, dont le manque de moyens renforce les inégalités dont sont victimes les classes populaires.
La déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 qui compte parmi les textes les plus importants de la République et qui garantit l'égalité des droits est régulièrement piétinée selon la classe sociale du citoyen .
Il est reproché à la gauche [6] son désintérêt à la fois pour l'insécurité et pour la lutte contre la délinquance. Les médias dominants qui font leur miel des faits divers affirment de manière récurrente que la gauche s'est coupée des classes populaires parce qu'elle ne s'intéresse pas prioritairement à la sécurité des biens et des personnes. Elle est même taxée régulièrement de laxisme...
Certes la gauche privilégie la prévention à la répression.
Certes, la répression est un mal nécessaire quand tous les autres moyens visant à garantir la sécurité ont échoué, mais elle ne doit pas représenter l'essentielle de la politique visant à garantir la sécurité de nos concitoyens. C'est ce qui distingue fondamentalement la gauche de la droite, de l'extrême droite et de la drauche (PS-EELV-Parti radical de gauche).
Si à la dernière élection présidentielle, la gauche n'a pas instrumenté à des fins électorales la lutte contre la délinquance comme la droite, l'extrême droite et la drauche, c'est parce qu'elle sait que l'insécurité est d'abord la conséquence d'une société profondément inégalitaire.
Inégalitaires socialement de la naissance à la mort, certains héritant de tout et les autres uniquement de leur force de travail, il me semble inutile de disserter longtemps sur le fait que la République ne garantit pas le droit à une vie décente à toutes et tous. Certes, quelques uns issus des classes populaires échappent au déterminisme social, mais ils représentent une infime minorité, à l'instar de ces quelques élèves de ZEP, recrutés par Sciences Po Paris, très médiatisés pour prouver que le système de la méritocratie républicaine et de l'égalité des chances fonctionne relativement bien.
Les thuriféraires de la Vème République et les médias dominants mettent en exergue ces quelques exemples de réussite individuelle pour tenir un discours digne du darwinisme social, où chacun doit comprendre que la société capitaliste en mode néo-libéral récompense les meilleurs et les plus méritants.
Ce discours qui est repris de la droite à l'extrême droite en passant par la drauche n'encourage pas les politiques visant à lutter contre les inégalités sociale et l'insécurité sociale. Bien au contraire, en ces temps de crise (volontaire), l'ordre du jour est à l'éradication de la coûteuse solidarité solidaire c'est-à-dire de l'assistanat comme la dénomment les néo et socio-libéraux.
Or, les principales causes d'insécurité et de délinquance sont les inégalités et l'insécurité sociale.
A mesure que les inégalités relatives à l'emploi, aux études, aux revenus, aux soins, aux territoires, à l'impôt, à l'habitat, à la justice et à la culture deviennent la norme, les gouvernements successifs de droite et de drauche répriment toujours plus et exercent un plus fort contrôle social de la population, quitte à la fois à limiter les libertés publiques et à s'immiscer dans l'espace privé de chaque citoyen-ne-s.
Le tout répressif qui est à l’œuvre en France depuis les années Chirac et aux États-Unis depuis Reagan est un échec puisque les objectifs officiels ne sont jamais atteints.
En l'espèce, les politiques répressives visent à enfumer et à imposer aux classes populaires et moyennes des politiques économiques et sociales contraires à leurs intérêts puisqu'elles favorisent les inégalités sociales et les privilèges de l'oligarchie. Elles ouvrent également de nouveaux marchés, en particulier les secteurs qui étaient du ressort des monopoles publics, ainsi que celui très juteux des entreprises spécialisées dans la sécurité. Au bout de cette logique comme aux États-Unis, même des soldats sont fournis à l'armée par des entreprises privées sous contrat avec l’État.
Ainsi, le néo-libéralisme ou son frère jumeau le social-libéralisme supprime ou rend exsangue les services publics dans les lieux où la population en a le plus besoin, y compris la police ou la gendarmerie... Les pouvoirs publics préfèrent "communiquer" en embarquant les CRS dans des opérations coups de poings sous les objectifs des médias dominants. L'effet est spectaculaire. Il fait figure d'exemple et il permet d'arrêter quelques délinquants lampistes, mais en définitive, il n'est d'aucune efficacité en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance organisée.
Par conséquent, hormis surpeupler les prisons et embastiller une partie de la population, cette politique répressive ne vise qu'à imposer un ordre social profondément inégalitaire, qui parfois tolère divers trafics pour éviter quelque explosion sociale dans les quartiers les plus pauvres.
Le tout répressif s'adresse uniquement aux classes populaires, voire moyennes, les plus frappées par l'insécurité sociale et les plus susceptibles de basculer dans la contestation sociale, voire dans l'illégalité pour survivre.
Dès lors, faut-il s'étonner que des travailleurs qui luttent pour sauver leur outil de travail soient traités comme des délinquants, arrêtés par la police, poursuivis en justice et subissant l'acharnement du parquet (gouvernement) parce qu'ils refusent de faire ficher leur ADN, tandis que la délinquance en col blanc bénéficie de passe-droits ?
Quels dirigeants de banques ont été sanctionnés par la justice après la crise financière? Combien d'entre eux l'ont été pour avoir facilité l'évasion fiscale ou le blanchiment de l'argent sale ? Combien de patrons ont été condamnés pour avoir enfreint la législation relative au repos dominical ? Et combien pour avoir causé des accidents du travail et des maladies professionnelles en ne respectant pas sciemment les normes légales ? Combien de politiciens corrompus sous les verrous ou inéligibles à vie ?
La République est prompte à poursuivre et à condamner les citoyen-ne-s issu-e-s des classes populaires et moyennes, alors qu'elle est laxiste avec l'oligarchie et le patronat. Sévérité pour les uns, mais élasticité avec les autres à base d'arrangements, de négociations et même de nouvelles règles sur mesure assorties d'une amnistie !
Cette République inégalitaire et insécuritaire, c'est la Cinquième, comme l'illustre la non levée de l'immunité parlementaire de S. Dassault, un héritier milliardaire qui doit sa fortune à l’État et qui dénigre des services publics dont lui et ses proches n'ont pas besoin...
Aussi, il me semble que l'avènement de la Sixième République est nécessaire tant la Cinquième République est à bout de souffle. La Sixième République devra éradiquer les injustices et les inégalités pour réduire l'insécurité, y compris en combattant sans faiblir la délinquance des classes patronales et oligarchiques. Seule la République sociale peut assurer l'égalité des droits, dont le droit à la sécurité pour toutes et tous.
Notes
[1] La République en lambeaux !
[2] Serge Dassault: un seul coupable, la Ve République.
[3] Dassault vient d’acheter le Sénat… et vous ne le saviez pas ? #démocratievolée
[4] Pour la suppression du Sénat.
[5] En protégeant Dassault, le Sénat fait le jeu du Front national
[6] à ne pas confondre avec la gauche de droite c'est-à-dire la drauche qui est aux affaires avec Hollande, Ayrault, Moscovici, Hamon, Duflot...