De: Vince Gilligan
Avec: Bryan Cranston(Argo,Malcolm),Aaron Paul(Smashed,Big Love),Dean Norris(Dôme,Cartel),Anna Gunn(Sassy Panks,Red State),Betsy Brandt(The Michael J Fox show,Parenthood).
Synopsis Allociné:Walter White, 50 ans, est professeur de chimie dans un lycée du Nouveau-Mexique. Pour subvenir aux besoins de Skyler, sa femme enceinte, et de Walt Junior, son fils handicapé, il est obligé de travailler doublement. Son quotidien déjà morose devient carrément noir lorsqu’il apprend qu’il est atteint d’un incurable cancer des poumons. Les médecins ne lui donnent pas plus de deux ans à vivre. Pour réunir rapidement beaucoup d’argent afin de mettre sa famille à l’abri, Walter ne voit plus qu’une solution : mettre ses connaissances en chimie à profit pour fabriquer et vendre du crystal meth, une drogue de synthèse qui rapporte beaucoup. Il propose à Jesse, un de ses anciens élèves devenu un petit dealer de seconde zone, de faire équipe avec lui. Le duo improvisé met en place un labo itinérant dans un vieux camping-car. Cette association inattendue va les entraîner dans une série de péripéties tant comiques que pathétiques.
Ma critique(SPOILERS):Depuis la fin de cette série,je suis atteinte du syndrome post Breaking Bad.En langage non médical,cela veut dire concrètement que tout ce que je vois depuis n’arrive à la cheville de la sublime série de Vince Gilligan.Ce qui devient assez problématique je dois l’avouer mais il faut dire que Breaking Bad a mis la barre très haute tout comme Lost l’avait fait en son temps.Le problème avec ce genre de série c’est que tout nous paraît fade et superficiel après.Après avoir eu de l’adrénaline à gogo et le palpitant au bord des lèvres durant cinq saisons.Bien sûr,il fallait que ça s’arrête pour ma santé mais pas seulement.Breaking Bad a fait depuis le début preuve d’honnêteté et de maîtrise envers ses fans et ses personnages.Aussi,je ne la voyais pas perdurer et aller contre son essence contre sa légitimité.
(Mon épisode préféré)
Breaking Bad c’est fini mais je fais encore durer le plaisir car je suis une grande nostalgique.Cette série est avec Lost une des plus grandes séries du monde entier;elle laisse un héritage conséquent et marque un tournant décisif dans l’univers des séries je pense.Bien que j’éprouve cela aujourd’hui,il m’a fallu du temps pour vouloir la regarder alors que tout le monde autour de moi ne jurait que par elle.Allez savoir pourquoi moi je ne voulais pas.C’est peut-être ce bout d’épisode que j’ai vu un soir sur Arte en zappant et çà m’a pas plu.C’est au cours de la sixième saison entamée que j’ai décidé de m’y mettre et à partir de là,plus rien n’a compté.J’ai bu j’ai mangé du Breaking Bad tous les soirs jusqu’à ce que je finisse tout.J’étais enfin prête à recevoir la claque qu’elle allait me donner,j’étais prête à écouter aussi.Et chose rare qui mérite d’être mentionnée,dans cette période breakingbadienne j’ai vu très peu de films car à ce moment là,je ne vivais que pour Walter White et Jesse Pinkman.
Je ne sais pas par où commencer tellement il y a de choses à dire.Je vais déjà essayer de commencer et on verra bien ce que ça donnera.
Avec le recul et malgré l’annonce de la maladie de Walter,je trouve que la première saison de BB est la plus légère la plus comique mais aussi la plus contestataire.Sur ce dernier point,c’est surtout à travers le personnage de Walter White qu’on trouve une certaine critique du système politique,économique et social américain.En effet,Walter brillant homme de sciences est obligé de cumuler deux emplois pour subvenir aux besoins de sa famille.Et pourtant,lorsqu’on lui annonce son cancer sa mutuelle ne prend pas en charge les frais d’hospitalisation et encore moins les frais d’un traitement qui pourraient le guérir.Au delà de çà,la père de famille est un mec bien le genre de mec qui paie ses impôts et qui n’a jamais de contraventions.Le genre de mec qui fait toujours attention et qu’il ne fait jamais ou presque d’écarts inconsidérés.Mais,on le sait que trop bien que Walter n’est pas le genre de personne qu’on admire et qui attire le regard et force le respect.Ça c’est plutôt l’affaire de son beau-frère Hank,qui est plutôt du genre à rouler des mécaniques et à être un brin macho.Non content d’être émasculer chez lui notamment par sa femme,il l’est aussi dans ses deux boulots que ce soit par ses élèves ou son patron du Car Wash.Et cerise sur le gâteau,il apprend qu’il a un cancer qui ne peut se soigner.Sa maladie va faire remonter à la surface plein d’amertume de regrets; et le passé.C’est un Walter très humain qui apparaît alors au spectateur,on s’attache considérablement à lui.On est en colère pour lui et avec lui.En colère de voir un système qui accable et ponctionne les honnêtes gens et qui d’un autre côté,encourage l’illégalité.
(Mon plan préféré)
Ce cancer va donc remettre en perspective ce qui est essentiel pour Walter,sa famille.Mais,il va aussi remettre en question son couple et plus largement sa place en tant que citoyen et en tant qu’homme dans la société et dans sa famille.Au départ,l’annonce de sa maladie va l’anéantir mais peu à peu,il va se rendre compte que c’est ce qu’il veut ou c’est ce qu’il est déjà,mort.Et peut-être qu’à ce moment là,le Walter que nous connaissons nous ramène à nous mêmes.A nos peurs,à nos doutes et à nos rêves brisés.Comme si nous aussi,nous avions laissé passer notre chance d’être vraiment heureux,de n’avoir pas dit merde quand il l’aurait fallu.Oui,cet être de regret cet être qui a passé sa vie à aplanir les angles pour les gens qu’il aimait,cet être toujours solide et à vouloir faire plaisir aux autres avant lui,nous ressemble étrangement.Walter croyait faire au mieux pour tout le monde mais le voilà condamné et à un carrefour important de sa vie alors que va t-il choisir?Lui ou les autres?Il n’aura de cesse de proclamer que ses actions sont pour sa famille et dans un sens,je pense que c’est vrai.Mais plus tard,il avouera qu’il l’a fait égoïstement,pour lui et pour lui seul chose qu’il n’avait pas faite depuis des lustres.Sans oublier non plus,le pouvoir que le rôle de cuisinier lui conférait.Néanmoins à son insu,il va découvrir qu’il est « condamné à être libre »(et de répéter les mêmes erreurs) et de ce fait,ce n’est ni son cancer ni ses concurrents son pire ennemi mais lui-même.Et pire encore,il découvrira que ce n’est pas être libre qui est le plus difficile mais de prendre des décisions( bonnes ou mauvaises) en son âme et conscience et de les assumer.Et ce Walter si charmant et si touchant,va se transformer peu à peu en extrémiste de la vie.Fier de son produit et de lui-même,il va perdre le sens des réalités et s’effacer au profit de Heisenberg.Ce double machiavélique de lui coiffé d’un ridicule couvre-chef et de lunettes de soleil.Ce Heisenberg est l’homme qu’il n’a jamais été,un homme « fort,courageux ».Au début,il aura besoin de revêtir tout la panoplie pour être un bad guy mais peu à peu Heisenberg s’exprimera à travers les traits bien sages de Walter White.Alors le chapeau et les lunettes ne seront que symboliques et constitueront le signature du grand H.Ce dont souffre Walter,est appelé en psychologie : trouble de la personnalité narcissique.Cela a presque toujours pour origine un événement traumatisant(le cancer pour W)et qui se manifeste par un comportement mégalomane(« Said my name »),un besoin d’admiration et un manque d’empathie.En fait,on peut comparer Walter/H à Narcisse qui tombe amoureux de son propre reflet dans le lac et qui en est prisonnier.Le lac de W/H sont les miroirs,on le voit pratiquement que de cette façon dans la dernière saison mais souvent ces miroirs sont souvent brisés ou plongés dans l’obscurité.Autre chose qu’il est assez frappant chez ce « duo »c’est le fait qu’à chaque fois qu’il supprime un concurrent,Walter/H leur pique un vice ou une habitude.A Krazy 8,il prendra l’habitude du sandwich sans croûte;de Tuco,la folie et le mauvais goût;et enfin de Gus,son sens du commerce et de la manipulation surtout en utilisant des enfants.
Ce processus de copycat est un exemple d’incapacité pour Walt d’ » accepter et d’assumer sa liberté et par conséquent d’être responsable de lui-même. Il préfère être en mesure de projeter la responsabilité de sa situation sur quelqu’un « .D’autre part,le comportement de Walter pourrait s’expliquer par l’absence du père qui n’est d’ailleurs jamais mentionné dans la série à part la mère.On remarque aussi qu’il admire souvent des figures masculines notamment Gus qu’il prend pour modèle.Son père l’a t-il abandonné tout bébé et est-ce pour çà qu’il prend tant à cœur ses responsabilités de père et d’époux?Et est ce aussi pour çà qu’il tente d’incarner tant bien que mal une figure paternelle pour Jesse ?
(ma scène préférée)
Les apparences jouent en la défaveur de Jesse du moins au début.Petit merdeux et dealer à la sauvette,il est immature insouciant et a peu d’ambitions dans la vie.Mais,si on gratte un peu la surface on découvre un jeune homme en pleine quête identitaire,quête qu’il tente de cacher avec des vêtements trop larges pour lui et un langage à la dure précédé d’un « Yo » qui le définit.A sa façon lui aussi il se révolte peut-être pas de la bonne façon mais avec les armes qu’il a en sa possession.Cela me fait penser au film sur Huckleberry Finn dont Elijah Wood a le rôle-titre.A un moment,il dit au vieux Jim qu’il est plus facile de faire le mal que le bien alors il choisit de faire ce qui est plus facile.Je crois qu’il en va de même pour Jesse bien que je ne pense pas que la lâcheté explique tout.Dans un épisode centré sur lui-même,on peut le voir au sein de sa famille;et découvrir l’enfant qu’il était.Ses parents l’ont peut-être trop idéalisé là où lui il aurait eu besoin d’encouragement,d’amour et de confiance.Il dit également que ces professeurs ont toujours cru qu’il n’était bon à rien et qu’il a fini par le croire,et l’être.Quand je pense à Jesse,je pense à un jeune homme perdu et désenchanté.Un jeune homme qui n’a pas envie de trimer comme mascotte pour une poignée de dollars alors que dealer est si enrichissant et « facile ».Peut-être que tout comme Walter,produire de la meth lui permettait de prouver à tous ses détracteurs qu’il avait bien des couilles.Mais contrairement à son coéquipier,Jesse va se réveiller et payer au prix fort sa naïveté et son empathie.Mais,peut-être que c’était un mal pour un bien car sans Walt dans sa vie,il n’aurait pas pris conscience qu’il avait à perdre et qu’il était quelqu’un.Malgré tout ce que W/H lui a fait,ce dernier lui a donné un semblant de famille,d’amour et d’amitié.Et sans çà,il n’aurait jamais rencontré Jane ni cru en un possible « nous » entre eux.Jane est la rencontre la plus importante,la plus belle et la plus déterminante dans la vie de Jesse.Elle va lui donner l’opportunité de croire en lui,d’espérer mieux et de s’ouvrir enfin à la vie.Mais,Walter n’est pas loin et voyant son ami heureux alors que lui il est en train de tout perdre,il veut garder son fils adoptif pour lui.Et malgré toutes les crasses que lui fera W,Jesse ne pourra pas le trahir car il a été un jour son meilleur ami et ce qui se rapproche le plus d’un foyer.
Bon,je pourrai continuer comme çà encore longtemps vu la complexité et la dualité des personnages mais il faudrait peut-être que je parle aussi des performances des personnages principaux et secondaires.On ne présente plus Bryan Cranston qui trouve encore une fois le moyen de s’illustrer d’une façon spectaculaire dans une autre série.Il faut dire que les rôles de déjanté lui vont à ravir et qu’il a pour sûr un incroyable talent pour les interpréter.Néanmoins,celui qui m’a le plus impressionné est Aaron Paul jusque là inconnu du bataillon pour moi.Il a été magistral dans la peau de ce jeune Jesse mal dans sa peau;le rôle était taillé pour lui.Tout passe par son regard de noyé et son aura,son attitude shakespearienne.Jesse/Aaron dégage un truc de fou quand il est à l’écran et livre une performance extraordinaire.Quant au reste du casting,il est aussi soigné que le principal bien que je regrette que certains personnages n’ont pas été très développé comme Walter Junior par exemple.Le personnage de Skyler m’a tantôt touché tantôt énervé.Elle-aussi, je pense aurait mérité plus d’attention.Hank est quant à lui peut-être le troisième personnage le plus important de la série et à juste titre.Pour autant,j’ai un regret en ce qui concerne sa femme,Marie.Elle aussi avait beaucoup de démons à combattre et tout n’a pas toujours été expliqué.Pour les méchants,je ne parlerai que de Gus car c’est le méchant le plus rusé de la série et le plus sournois aussi malheureusement.Giancarlo Eposito a réussi la prouesse de faire croire au spectateur que son personnage n’était qu’un honnête citoyen conduisant un break familial.Qui aurait des soupçons sur quelqu’un qui conduit un break familial?!
(Mon paysage préféré)
Dans un registre plus technique cinématographiquement parlant,Vince Villigan m’a bluffé par la maitrise de sa caméra et de son décor.Peu de séries accordent de l’importance à la forme alors que chez lui,la forme et fond sont tout aussi importants voir complémentaires.La manière de filmer évolue en même temps que les enjeux de l’histoire.Dans les premières saisons,le créateur s’attarde sur des intérieurs domestiques et familiaux.Sur ce qui est rassurant,connu et intime.Puis peu à peu,il utilise des plans rapprochés notamment des gros plans pour accroître le désespoir de ses personnages et renforcer la proximité entre ces derniers et le spectateurs.Ce qu’il adore aussi c’est les contre-plongées ce qui crée parfois des illusions optiques comme avec la table en fer forgé transparente de Jesse.Celle-ci reflète un Jesse déformé presque irréel.Et puis,cette façon de filmer dans le vif,dans l’instant notamment pour les moments de transe;et avec un filtre jaune à la façon d’un Soderberg.Néanmoins,c’est la saison 5 qui est la plus emblématique car c’est là où on constate une vraie rupture.Rupture qui coïncide en même temps que la violence et la gravité du ton augmentant crescendo.Une musique angoissante fait aussi son apparition,les scènes se déroulent beaucoup dans des clairs-obscurs.Walter/H n’est presque plus filmé directement mais à travers des surfaces réfléchissantes comme des miroirs.Le désert d’Albukerque est plus agonissant plus oppressant que jamais alors qu’auparavant,on appréciait le paysage tel un tableau.De plus,Vince Gilligan joue beaucoup avec l’environnement comme le poteau de la nouvelle cuisine de Skyler qui cache bien son jeu.Mais surtout en amoureux du cinéma qu’il est,il arrive avec arrêt de caméra à retranscrire les moments les plus emblématiques de la série et à faire renaître pour le coup un personnage mythique,la caravane.
(Deux personnages zombiesques dans cette scène)
Il faudra aussi retenir son goût de la mise en scène notamment à travers ses introductions toujours impeccablement soignées et orchestrées.Elles sont souvent le fil conducteur et annonciateur de l’épisode ou de la saison en surfant sur la technique des flashforwards.Mais Dieu merci,pas de scénario et de mention « Three days ago » et de traditionnels scénarios rocambolesques qui finissent généralement en eau de boudin.Non,un nounours borne et rose flottant dans une piscine et son œil manquant qui reste pris dans le moteur de la piscine,c’est percutant,simple et çà ne s’oublie pas.Et,je crois que c’est l’un des leitmotivs du créateur de la série,faire le moins possible ou tout du moins le strict nécessaire.Je le disais plus haut,beaucoup de choses sont abordés plutôt superficiellement pourrait-on penser dans un premier temps.Mais,le génie de VG est de dire beaucoup de choses en n’en disant le moins possible.Au spectateur de se questionner,de trouver les réponses et de regarder là où le réalisateur veut qu’on regarde.Prenons l’exemple de Hank et Marie,leur maison respire le silence,le silence des enfants qu’ils n’ont pas.Et,que penser de Marie et de son obsession pour le violet?Saviez-vous que le violet est une couleur qu’on associe à la mélancolie et à la solitude?Et qu’elle a des vertus apaisantes et qu’elle refrène certaines angoisses et colères ?
(Ma réplique préférée)
J’aimerai avoir la bonne conclusion mais c’est impossible tant il y a de choses à dire et tant je n’aime pas les fins.Je croyais vouloir celle de BB parce que c’était trop intense par moment trop violent aussi mais une fois que c’était fait,j’ai ressenti comme un grand vide.Comme si au fond Jesse et Walter avaient vraiment existé et qu’à présent,ils n’étaient plus.Je me suis demandée comment c’était possible,moi qui avait côtoyé leur existence durant 62 épisodes.Moi qui avait ri et pleuré à leurs côtés durant cinq saisons.Et lorsque j’aurai fini cette chronique,ce sera presque définitif mes adieux.Alors merci Breaking Bad pour tout ce que tu nous a donné et à la prochaine parce que j’ai pas envie de dire au revoir !
19 sur 20
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