Le Journal des Poètes (n° 4 / 2013) publie l'un de mes textes, "Le milieu du monde", une sorte d'hommage à Kafka. On aimerait bien avoir en France l'équivalent de ce trimestriel poétique de Belgique, qui aborde sa 83e année.
Joseph K. avait rejoint le train Brest-Vladivostok dans une gare de la Mitteleuropa, une banale station ferroviaire dont le nom complexe et saturé de consonnes n’était pas resté dans sa mémoire. Il s’était endormi sur son siège peu après le départ ; le sommeil avait été long et profond car le jour était levé depuis longtemps quand il se réveilla. Il avait froid. Il était seul. Le train se trouvait arrêté en pleine voie, loin de toute zone habitée, probablement aussi loin de son point de départ que de son point d’arrivée. La neige tombait en abondance et avait recouvert tout le paysage alentour ; les rails avaient disparu sous la couche épaisse, et bientôt, s’il continuait à neiger avec cette régularité et cette intensité, le convoi lui-même ne serait plus perceptible. Remontant les voitures vers l’avant jusqu’à la locomotive, puis en sens inverse jusqu’à l’arrière du train, il ne vit personne, pas même le conducteur, pas même le contrôleur, et il n’y avait plus aucun bagage, à part son vieux sac à dos. Le wagon-restaurant était propre, rangé, vidé de tout aliment et de toute boisson, comme s’il n’avait pas servi depuis longtemps. Joseph K. se mit à errer d’une voiture à l’autre, seul dans ce train fantôme que ses fantômes eux-mêmes avaient déserté.
*
Signalons aussi deux publications récentes : deux textes dans Les tas de mots n° 14 et quelques blagues dans Fluide Glacial n° 451.
Le Journal des Poètes (n° 4 / 2013) publie l'un de mes textes, "Le milieu du monde", une sorte d'hommage à Kafka. On aimerait bien avoir en France l'équivalent de ce trimestriel poétique de Belgique, qui aborde sa 83e année.
Joseph K. avait rejoint le train Brest-Vladivostok dans une gare de la Mitteleuropa, une banale station ferroviaire dont le nom complexe et saturé de consonnes n’était pas resté dans sa mémoire. Il s’était endormi sur son siège peu après le départ ; le sommeil avait été long et profond car le jour était levé depuis longtemps quand il se réveilla. Il avait froid. Il était seul. Le train se trouvait arrêté en pleine voie, loin de toute zone habitée, probablement aussi loin de son point de départ que de son point d’arrivée. La neige tombait en abondance et avait recouvert tout le paysage alentour ; les rails avaient disparu sous la couche épaisse, et bientôt, s’il continuait à neiger avec cette régularité et cette intensité, le convoi lui-même ne serait plus perceptible. Remontant les voitures vers l’avant jusqu’à la locomotive, puis en sens inverse jusqu’à l’arrière du train, il ne vit personne, pas même le conducteur, pas même le contrôleur, et il n’y avait plus aucun bagage, à part son vieux sac à dos. Le wagon-restaurant était propre, rangé, vidé de tout aliment et de toute boisson, comme s’il n’avait pas servi depuis longtemps. Joseph K. se mit à errer d’une voiture à l’autre, seul dans ce train fantôme que ses fantômes eux-mêmes avaient déserté.
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Signalons aussi deux publications récentes : deux textes dans Les tas de mots n° 14 et quelques blagues dans Fluide Glacial n° 451.