out le monde a vu au moins une fois un politique nous dire que « tout ce qui est excessif est insignifiant ».
Il semblerait, aujourd'hui, que les mêmes, où leurs collègues, aient oublié leur sentence et laissent l'excessif, voire l'insupportable, devenir norme sans qu'ils y trouvent rien à redire.
Les fondamentaux du pays ne sont pas pris en compte.
La France est un pays pauvre si l'on regarde le niveau des salaires, des retraites et le nombre de chômeurs. Hors, nos représentants répètent que les mêmes coûtent bien trop cher.
La milice patronale dénommée Medef a réussi à déréguler (détruire, en bon français) l'ensemble de la législation du travail et de l'emploi avec la complicité active, et sans doute rémunérée (cf IUMM), d'un bon nombre de représentants du patronat peuple. Le pays est redevenu une espèce de jungle où chacun s'échine à écraser le voisin pour garder son obole, ou recherche désespérément un piston vers l'emploi qui n'existe plus.
Les institutions, au sens large – police, justice, école, santé...- n'écoutent plus le citoyen, sommé de se taire et d'obéir à des règles qui le spolient et à des procédures qui l'exaspèrent. Qu'elles soient mairies, mutuelles, hôpitaux, académies ou commissariats, elles n'acceptent aucune critique et dénient le droit au citoyen lambda de participer à leur fonctionnement, réservé à une poignée d'élus locaux ou nationaux, s'appuyant sur des services administratifs et des procédures plus propres à écarter le citoyen et lui couper tout recours qu'à le satisfaire.
Le gouvernement réagit également a contrario des fondamentaux du pays, avec le souci de faire adhérer le grand public à des mesures qui, peu ou prou, satisfont les intérêts d'une minorité déjà dorée. Ce, sous le contempteur médiatique, de plus en plus puissant, de plus en plus propagandiste, au service qu'il est du patronat et de la finance créant toujours plus de ces organes médiatiques en laisse, avec l'aval empressé d'institutions souffrant évidemment des tares énoncées plus haut, le CSA et autres CNIL .
Ainsi nous avons un gouvernement satisfait d'être surveillé, entravé, privatisé. Il mène une politique qui ne heurte jamais « l'opinion ». Laquelle opinion n'est quasiment toujours que celle de l'idéologie conservatrice, censitaire et totalitaire d'une poignée d'hommes organisés en classe consciente, exploiteuse, déterminée et intelligente. Elle martèle son message comme ses exigences via les micros et stylos de créatures « journalistiques » et de pseudos débats publics.
Sur le modèle intemporel qui se résume par « il faut que tout change pour que rien ne change » ce conglomérat objectif d'adversaires de la démocratie créent des émotions, des points de fixations de l'attention populaire qui n'ont à voir que de très loin avec les fondamentaux et leur traitement éventuel. Il fut une époque, on appelait ça les jeux du cirque. Il s'agit de contourner le regard populaire qui se fait, malgré le rideau fumée général et permanent, de plus en plus acéré.
Selon le principe du sacrifice, on désigne les monstres qui menacent la cité et on organise la cérémonie pour les brûler au pied de l'indignation publique. La rotation des freaks est de plus en plus rapide, comme la fabrication des icônes populaires de la musique, du livre ou du sport. C'est d'ailleurs une des raisons qui fait qu'elles bénéficient, tous genres confondus, de traits communs quant à leur format et mise en avant.
Contrairement à ce qu'énoncent certains penseurs adoubés par l'appareil médiatique, la société n'est pas désorganisée, privée de stabilité en n'offrant qu'une vie naufragée à tous ses membres. Depuis cinquante ans au moins l'économie a réussi à détruire ainsi la vie et le sens pour l'immense majorité des gens, mais pas pour tous.
Ceux qui sont « en charge » comme dirait nos amis roses, n'ont pas de problème d'identité, de destin individuel ou de mobilité sociale ascendante. Ils ont le pouvoir et maîtrisent leur avenir. Vous les voyez évoluer au plus haut depuis cinquante ans. Le gouvernement, les responsables de partis, les dirigeants patronaux, les responsables médiatiques – directeurs de chaînes, d'unités de programmes...-, ou sondagiers sont toujours en place, au cœur du dispositif.
Ils tiennent depuis une génération les rênes de notre avenir, jouissent de privilèges toujours en augmentation et d'une dynamique ascendante de leur carrière, comme de leur rémunération, qui n'est jamais contrariée. Toujours plus, pour eux.
Face à ce théâtre d'ombres, la population vacille car ses yeux s'ouvrent. Bien des choses lui semblent confuses mais le décor et la dynamique générale laissent une empreinte tout à fait nette. En jeu, la question du pouvoir. La démocratie repose sur un paradoxe : dénier le Pouvoir tout en l'exerçant. Il semble que ce ne soit pas possible aujourd'hui. Il semble également que cela a à voire avec les forces marchandes et que la rupture d'équilibre est générale. Elle atteint même les individus dans leur psyché, enchaînée aux fumées permanentes et pailletées qu'on diffuse autour d'eux, aux psychotropes et de plus en plus incapables d'extirper leur vie, leurs pensées de cet espèce de décor truqué universel dans lequel ils sont enfermés.
Au-delà du modèle économique alternatif, c'est la question anthropologique qui est posée à la gauche et à toutes les forces progressistes, aujourd'hui. Comment sortir de l'homo économinus et refaire une société d'hommes en abandonnant derrière nous les désirs et les rêves de l'individu, pseudo de l'être humain dans la société truquée ?