Comme au cinéma Éric Bonnargent
Janet Cardiff & Georges Bures Miller, The Paradise Institute, 2001
Après la nuit (Tapage nocturne) et le football (Temps additionnel), c’est au cinéma que les Éditions Antidata consacrent ce nouveau recueil de nouvelles. Tête d’affiche, Éric Pessan signe « Tout est mieux sans toi », un texte dans lequel un auteur assiste au tournage de l’adaptation de son dernier livre, un roman autobiographique racoleur dont il a honte. Ni Vincent Lindon, ni Isabelle Carré ne parviendront à empêcher le narrateur de considérer cela comme un désastre. « L’erreur a été commise il y a bien longtemps, l’erreur a été engendrée par la colère qui me poussait à écrire et par l’orgueil qui m’a fait confier le manuscrit à un éditeur. » Si des cascadeurs sont mis en scène par Malvina Majoux, ce sont surtout les acteurs qui sont à l’honneur. Laurent Banitz montre comment la vie d’un vieil hardeur nostalgique du porno à l’ancienne bascule suite à un coup de fil d’Alain Resnais, Gilles Marchand rend un magnifique hommage à André Wilms, cet immense comédien que tout le monde connaît sans savoir qui il est, alors que dans un texte surréaliste, Christophe Ségas retrace la carrière dramatique d’un crabe domestique. Pascal Pratz et Ludmila Safyane, eux, s’intéressent aux cinéphiles, à la manière dont les salles obscures peuvent bouleverser un destin. Si, comme le rappelle J.-F. Dormois dans une nouvelle noire, la réalité ne fonctionne pas comme un film, la plupart des gens se font des films pour échapper à un quotidien trop difficile à supporter, comme le montrent Stéphane Monnot, Karine Médrano et Murielle Renault à propos du chômage, du deuil et de la jalousie. La noirceur des cœurs est également mise en perspectives dans une nouvelle de Stéphane Le Carré qui rappelle l’univers de Cronenberg. Que ce soit par le choix des textes ou par la mise en page soignée jusque dans les moindres détails, Version Originale est un bon et beau livre qui satisfera les amateurs de littératures et de cinéma.Article paru dans Le Matricule des Anges. Septembre 2013
Version originale Collectif Antidata, 175 pages, 11,50 €