Oubliez la quenelle, certains pensent qu'il s'agit encore de cela. C'est en fait bien différent. Dieudonné pose la question, rituelle en France, des limites que la République s'autorise avec les appels à la haine.
Sur sa page Facebook, l'humoriste raille le "vent de haine" de "force 6 à 7" qui souffle sur lui. Il sourit, rigole, moque le front des antis. Il aurait pu dissiper un malentendu s'il y avait malentendu.
Il aurait pu, mais il ne le fait pas.
Il a des soutiens, car de gauche à droite, on n'aime pas les interdictions de spectacles. Ou l'on a peur de lui faire de la "pub". L'homme a déjà quelques millions de videonautes sur Youtube... Qui croit encore qu'il a besoin de cette publicité-là ?
Plus étrange, l'Etat se préoccupe enfin des 65.000 euros d'ardoise magique car impayée que doit "l'humoriste".
L'homme est soupçonné d'avoir organisé son insolvabilité. Dans un billet fort pédagogique, Alice Serrano de France Info détaille comment Dieudonné a transféré à une société détenue par sa mère et sa compagne, l'intégralité des bénéfices de ses activités - 230.000 euros de profit en 2012; une société qui emploi aussi son fils et sa fille, mais qui n'aurait aucun lien juridique avec l'humoriste. Une société dont le dernier chiffre d'affaire avoisinait les 2 millions d'euros annuels (2012).
L'association des filles et fils de déportés juifs de France a appelé à manifester devant le prochain spectacle, à Nantes ce jeudi, de Dieudonné. Lundi matin sur France inter, Arno Klarsfeld fait malheureusement le mauvais avocat, incapable de trouver les mots justes. Ils sont simples.
La manifestation sera sans doute inutile si le préfet finit par interdire le dit spectacle.
Cette semaine, Manuel Valls envoie justement par circulaire ses recommandations aux préfets pour interdire les spectacles de Dieudonné. Cette circulaire "permettra de prendre des dispositions pour empêcher la
banalisation des propos antisémites. (...) Les maires et les préfets pourront ainsi
prendre les décisions nécessaires avant la tournée de Dieudonné" dixit Matignon.
En fin de journée, la circulaire était enfin consultable. L'accusation d'antisémitisme est explicite. "Le message insoutenable que les propos de M. Dieudonné véhiculent est parfaitement compréhensible de la plupart des spectateurs". Et d'ajouter que le spectacle comprend "des propos antisémites et infamants à l’égard de plusieurs personnalité
de confession juive (...) et des atteintes virulentes et choquantes à la
mémoire des victimes de la Shoah".
Le ministre de l'intérieur rappelle donc aux préfets les pouvoirs dont ils disposent.