Elefante Blanco // De Pablo Trapero. Avec Ricardo Darin, Jérémie Renier et Martina Gusman.
Le réalisateur argentin Pablo Trapero revient trois ans après Carancho pour nous envoyer dans un bidonville de Buenos Aires, la ville qui l’a vu naître. Il prend
le regard extérieur d’un prêtre, Nicolas, incarné par Jéremie Renier. Cette histoire terrible vient également nous montrer ce qui se cache derrière les bidonvilles. Le film
n’évite cependant pas les facilités. En effet, alors qu’il aurait pu être un vrai brulot politique, le tout est assez nuancé. Ce qui est finalement regrettable. D’autant plus que Pablo
Trapero met tout cela en scène de manière très intelligente en nous plongeant avec calme dans un enfer de taules et de sang. Car Elefante Blanco ne cherche pas pour
autant à jouer la carte de la nuance sur l’horreur des bidonvilles, bien au contraire. Le sujet de ce film est assez délicat, du coup on aurait pu apprécier que le scénario soit plus surprenant
et peut-être même plus choquant. Je ne demandais pas un film violent pour le plaisir mais simplement qui n’édulcore pas l’horreur qui gagne ses quartiers.
Le "bidonville de la Vierge" dans la banlieue de Buenos Aires. Julian et Nicolas, deux prêtres et amis de longue date, œuvrent pour aider la population. Julian se sert de ses relations
politiques pour superviser la construction d'un hôpital. Nicolas le rejoint après l'échec d'un projet qu'il menait dans la jungle, où des forces paramilitaires ont assassiné les habitants.
Profondément choqué, il trouve un peu de réconfort auprès de Luciana, une jeune assistante sociale, athée et séduisante. Alors que la foi de Nicolas s'ébranle, les tensions et la violence entre
les cartels dans le bidonville augmentent. Quand le ministère ordonne l'arrêt des travaux pour l'hôpital, c'est l'étincelle qui met le feu aux poudres
Je trouve donc dommage qu’il n’y ait pas de vraie prise de risque dans ce film. Surtout qu’il tient avant tout grâce à la performance de ses acteurs, que cela soit Ricardo Darin,
Martina Gusman ou encore le français Jérémie Renier. Leurs prestations sont solides et offrent à des personnages parfois engoncés dans la mécanique du film un
peu plus de libertés. Etant donné que Elefante Blanco est assez linéaire, finalement on se retrouve avec un film bien moins émouvant qu’il n’aurait pu l’être. Notamment du point
de vue de ces enfants qui finissent par aimer vivre dans le bidonville alors qu’ils pourraient aussi tenter de s’en sortir. Elefante Blanco nous montre les deux visages des
bidonvilles. D’un côté la violence de ces quartiers dans lesquels tout le monde peut mourir pour rien et d’un autre côté la générosité des personnes vivants dans ces quartiers, de même que la
place assez prenante de la religion. Le film de Pablo Trapero pose pas mal de questions sur le Buenos Aires d’aujourd’hui mais malheureusement, et malgré une fluidité assez
étonnante, le film ne parvient pas à aller au bout de tout ce qu’il semble vouloir raconter.
L’erreur aura certainement été d’en faire parfois un peu trop ou de ne pas donner suffisamment d’importance à certaines explorations (notamment le prêtre se retrouve les yeux bandés et qu’il
découvre des lieux cachés du bidonville) ou encore à certaines émotions (au profit de la relation entre Nicolas et Luciana qui est loin d’être ce que Elefante Blanco a fait de
plus intéressant, et qui salie presque le film, vous comprendrez pourquoi en le voyant). Si la première partie du film cherche à plus ou moins exposer certains problèmes, la seconde partie est là
pour enclencher les hostilités et aller un peu plus loin. Finalement, ce film était certainement trop ambitieux pour Pablo Trapero et les scénaristes du film. Il y a de bonnes
choses mais ce n’est pas suffisant pour en faire un grand film. Du coup, Elefante Blanco apparait bien moins réussi que Leonera, film qui avait intégré la
compétition officielle du Festival de Cannes de 2008.
Note : 6.5/10. En bref, un film ambitieux mais pas totalement réussi car le sujet lui échappe par moment… Dommage. Cela reste cependant intelligent, bien mis en scène et brut.