La scène n’a duré qu’une petite minute. Elle n’a donc pas permis à Geneviève de rejoindre François. Il est parti depuis quatre minutes quand elle arrive sur le pont. Elle n’a que faire des panneaux car elle fait toujours ce qui lui plaît. Elle papillonne et ne s’attache pas à donner une signification à ce qui n’en a pas. Cela ne l’empêche nullement de s’évader comme elle semble le faire ce matin.
Sa démarche laisse imaginer qu’elle est en joie. Elle est légère, presque aérienne. Si on ne savait pas que la belle se dirige vers son travail, on s’attendrait à ce qu’elle danse, soudain, qu’elle déploie ses bras, dans un mouvement ample et souple, prenne position, monte sur pointes, grand balancement, entrechat, contretemps, élan (pas chassés), grand jeté, appuis terminés par un fouetté tournant.
Il n’en est rien ; Geneviève n’offrira même pas une arabesque et laissera juste cette impression de grâce désinvolte à Paris, à qui elle donne toutefois son merveilleux sourire.
Elle a déjà disparu, mais l’atmosphère garde la trace de son passage comme si elle était suivie d’un immense voile diaphane et brillant. La lumière est plus douce et chaleureuse, l’air d’une pureté vertigineuse. L’eau du canal s’agite, redemande à voir sa sirène, tandis que la végétation semble oublier que l’automne avance vers l’hiver. Geneviève relance la vie. Elle possède un pouvoir certain sur les éléments.