Fin 2013, à l’heure où les promesses de jours meilleurs se vomissent en même temps que le mauvais champagne, à l’heure où les opérateurs téléphoniques assurent quelques bonus à leurs actionnaires sur le dos de vœux groupés à peine sincères, je profitais de la solitude hivernale d’un cabanon du grand Nord canadien pour prendre mon élan. Et nous passâmes une nuit fantastique, loin des ragots et de la fureur de la ville avant qu’il ne regagne sa forêt enneigée et sa vie de bohème, être cornu, libre et caressant. Comment après ça revenir aux dures réalités d’une nouvelle année où dès le premier jour la Sncf, la Poste et les manufactures de tabac commençaient à ponctionner nos étrennes pour des trains qui n’iraient pas plus vite, des lettres surtout destinées à payer nos impôts (on a les sms pour les proches désormais) et des cigarettes pas plus cancéreuses qu’avant. Le coût de la vie, nous dit-on depuis qu’on sait qu’on peut prendre le contribuable pour un con au sortir des fêtes. Comme si la vie avait un coût. Comme si l’être humain qui n’a déjà rien demandé en venant au monde devait payer son droit de passage sur cette planète, pour supporter en plus un boulot misérable, côtoyer des collègues racistes ou homophobes et vivre dans une famille de cathos intégristes ou de militaires de carrière. Voilà donc à quoi en est réduit la condition humaine en 2014 après quelques millions d’années d’évolution où l’on se rapproche toujours plus du batracien malgré l’invention ces dernières années du réchaud à gaz, de la démocratie, de la guillotine, du rayon laser ou des dosettes Nespresso.
Ainsi donc, au moment où le français qui aime les traditions peaufinait son taux de cholestérol, l’assemblée nationale vint glisser au pied du sapin une nouvelle loi qui devrait permettre à l’armée de prendre le contrôle de tous les Internet alors que tout un chacun fustige la grande Amérique et où la presse a bien d’autres sujets à défendre (les achats en ligne, la pénurie de moules dans le bassin d’Arcachon, les premiers flocons en Savoie, le traîneau du Père Noel…). Comme un petit apprenti taliban, le citoyen lambda sera donc épié en permanence, sorte de Truman Show grandeur nature qu’un certain George Orwell décrivait en 1948 dans ce que l’on appelait alors un ouvrage de science-fiction : « 1984 ». Il ne faudra plus dire ni Mohamed, ni attentat, ni Afghanistan, ni chatte, ni Dieudonné. Edward Snowden et Julian Assange auront beau s’époumoner, la liberté individuelle n’est pas soluble dans le monde moderne. Ainsi en 2013, l’Afrique, du nord, du milieu, du centre et des côtés aura encore du lutter entre 6 dictatures, 8 coups d’Etat et 10 enlèvements pour se refaire une image de marque, obligeant le touriste du club Med à passer ses vacances en Grèce. Au Sud par contre, après des mois de suspense, Mandela s’en est allé, dernière figure légendaire d’un monde qui n’a plus de héros ailleurs que dans le sport.
En Europe, la vieille France a pu laisser libre cours à son passé intégriste en fustigeant le mariage gay alors que sortaient « La Vie d’Adèle » et « L’Inconnu du Lac », jolis doigts d’honneur dans le rectum des frigides Barjot et Boutin, baudruches obsolètes d’une droite qui se voudrait extrême et ne s’en remettra qu’à l’ineffable Don Quichotte-Sarkozy, attendu en 2017 sur son petit poney pour attaquer les moulins politiques de son cœur. Et pendant que la super cool NKM nous rejoue le fameux « Métro-boulot-clodo » la clope au bec, Hollande bande mou et n’a plus que quelques vannes à sortir pour faire oublier que la courbe de sa popularité est inversement proportionnelle à celle du chômage. Mais tout n’est pas si grave, les magasins de bricolage pouvant rester ouverts le dimanche. En Russie, les attentats ne terniront pas l’image du sympathique Poutine, qui dans un élan de générosité incontrôlé, libère des opposants et des Pussy Riot, aime la presse et les pédés et voudrait inciter les dirigeants mondiaux à venir poser leurs culs mous sur les estrades de Jeux Olympiques d’Hiver clinquants et obscènes, plus chers que ceux de Londres et que la dernière Coupe du Monde réunis !!! Soit 50 milliards qui n’iront pas au peuple (c’est ainsi que fonctionne le communisme depuis Lénine) mais devrait permettre au monde entier de s’esbaudir devant le saut à ski et des parties de curling à suspens. Une pensée cependant pour le sympathique Mikhaïl Kalachnikov, inventeur de ce très beau fusil qui porte son nom, et mort sans avoir touché un rouble grâce à ça (c’est ainsi que fonctionne le communisme depuis Staline). Parti à 94 ans comme Mandela, il semblerait tout de même que l’héritage de l’un soit un peu plus présent, voire utile, dans les révolutions et les guérillas du monde entier que celui de l’autre. Même s’il n’a pas été chanté par Johnny Clegg.
2013 enfin, année de la pouffe. La TNT aura fini de labourer les espaces laissés vacants par TF1 dans les cerveaux des téléspectateurs. De télé crochets insipides en émissions de télé-réalité infâmes, l’intérêt seulement éveillé par l’épaisseur d’un string et la grosseur d’un sein en silicone. La nabillisation des esprits aura donc fait son œuvre auprès d’une jeunesse qui ne voit même plus l’intérêt d’avoir son BEP Coiffure alors que la célébrité leur tend les bras, ou le majeur. Lady Gaga, Miley Cyrus, Britney et autres con-sœurs auront tout fait pour exciter les acheteurs étalant leur vacuité et leur insipidité télévisuelle censées compenser leur manque de talent. Sans résultats. Le consommateur est finalement moins con qu’elles.
La lumière sera venue d’ailleurs, alors que l’on attendait plus rien. Obama serre la pince de Raul Castro, président de Cuba, ce dangereux pays qui fait rien qu’à vouloir envahir les Etats-Unis depuis 50 ans. On se prend alors à rêver du premier Mc Donalds au cœur de La Havane, le cœur léger. Au Vatican, après avoir réhabilité les homos, le Pape François envoie bouler Satan et les histoires pour enfants comme Adam et Eve ! Un peu de sérieux que diable ! En 2014 il serait bon que quelqu’un de sensé dise enfin la vérité à une foule goguenarde qui gobe les blagues du nouveau testament et les hosties comme un jeune les ecstas dans une rave, les dommages sur le cerveau étant à peu près les mêmes. Vas-y François, fais tout péter, tel un John Mc Clane en soutane, il n’y a plus que toi qui puisse ramener tout ce peuple à la raison !
A l’heure où il est de coutume de se cogner des Ferrero rochers, Michael Schumacher est tombé sur un plus dur que les autres. Le skieur moyen prend conscience que la vie est courte et la pétanque moins dangereuse, même si moins branchée dans les rues de Courchevel. Et puis il était si gentil, pourquoi lui ? Au moins pendant ce temps-là on ne parle plus de la Syrie. Les soldes arrivent et l’avenir sera forcément radieux, c’est une amie qui lit dans les boules qui me l’a dit. Il faudra simplement un peu plus de courage, de persuasion et d’innocence pour le croire et prendre enfin son élan. 2014, viens,je n’ai pas peur de toi.
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