Cette année, je rentrais très tôt en hibernation, aux alentours de Mabon, et depuis ma relation avec le « Divin » (quelque soit le visage ou la
numération que ce « Divin ») s’est prise dans une toile de glace, immobile et froide. Maintenant que le printemps est là, je cherchais un moyen de réchauffer un peu tout çà.
J’en ai entrevue un, en feuilletant un vieux numéro du National Géographic France : le « Spécial Inde » de Mars 2005. Le premier
article, « Inde à Paris », commence par la description d’une fête traditionnelle à Ganesh, qui se tient en septembre dans le XVIIIème arrondissement. Des noix de coco sont
jetées sur le sol dans un grand fracas, pour « conjurer le mal » ; on conduit la divinité sur un char couvert de fleurs et de fruits (pour celles et ceux qui veulent plus
d’information sur cette fête : http://www.templeganesh.fr/fetegan.htm ). Plus loin, la journaliste raconte comment dans le temple on
s’occupe de la statue du Dieu : « chaque jour, la divinité à tête d’éléphant est soigneusement baignée de lait, de miel et d’eau safranée avant d’être habillée d’étoffes chatoyantes par
le brahmane. Les offrandes de bananes et de noix de coco s’amoncellent devant l’autel pour être bénites. Dans l’assistance, une femme donne le biberon à son enfant. A l’aide d’un peu de poudre
noire, elle dessine un poutou –une tache ronde- sur le front de son bébé. Le voilà sous la bénédiction des divinités. De son côté, le brahmane s’est mit à psalmodier des mots que je ne peux
saisir -…- Où quelle soit, la puissance envoûtante des Indes reste vivace. Et vivante. » Bon maintenant quel rapport entre ce texte et la résolution de ma « crise de
foi » ???
Je me rends compte que je surintellectualise foi et pratiques. Derrière chaque Déesse, je colle un archétype ; à chaque évènement, son acte
manqué ou réussit qu’il faut interpréter. Je dis parfois, en rigolant à moitié, que je fais de la psycho-magie. Par exemple, je considère que la psychosomatisation –que je m’autorise à sortir du
cadre médical pour l’élargir à une définition du type « comment notre cerveau donne corps à nos états internes (émotions et croyances) »- est une chose exceptionnelle et pas simplement
une curiosité neuronale. Quant aux divins, j’intègre tous ces panthéons (c’est la partie « la Déesse et le Dieu en nous ») comme étant des facettes exprimés des milles et un état
de la conscience (et peut être subconscience et associés). Cette façon de procéder à des effets pervers : éloigner les Divinités en diminuant leur impact sur la réalité à l’extérieur de
moi-même, en les réduisant à des mythes qu’il faut disséquer avec l’œil froid du scientifique, en les privant de leur vie propre. Bien sûr, il y a la Nature au dehors, incroyablement riche et
mouvante ; mais une fois de plus je n’arrive pas à La considérer comme leur manifestation. Les Dieux et les Déesses que j’invoquais derrière la moisson, l’Hivers ou les floraisons, n’étaient
que des masques, des interprétations psychologiques de processus biologique. Entre parenthèses, je n’ai curieusement pas du tout cette difficulté avec des créatures élémentales –ondines,
effrits, gnomes et sylphes- et même le petit peuple, lutins, poulpiquets et fées des bois- avec lesquels j’ai beaucoup d’affinité.
Pourquoi les Divinités me posent-elles tant de problèmes ??? Peut être parce que j’ai oublié : 1. le plaisir de se laisser porter par
le rite, 2. que je suis bien peu de chose et que le monde s’étend bien au-delà du champ d’action de ma conscience et de celle de mes congénères sapiens : bref « les Divinité hors de
nous ». Et cela m’a demandé un gros effort pour revenir sur quelque chose d’aussi simple, d’aussi basique que cela. Je ne pense pas que pour un Celte, Dagda n’était qu’un symbole de la
« force guerrière masculine » sur lequel il fallait longuement réfléchir pour intégrer ces aspects et résoudre les situations du quotidien (par exemple une hache arrivant
droit sur vous ou une machine à café en panne). Non, il me semble que c’était une Personne, pas une construction intellectuelle.
Ce qui m’a touché dans la description de l’article, c’est justement l’amour sincère porté au Dieu Ganesh, tranquillement assis en tailleur à
suçoter ses friandises. Ganesh existe quand on le baigne tous les jours de lait et de miel. Peu importe si tous les aspects historico-symbolico-psyco-chamalo sont consciemment perçus et
disséqués. Le Dieu n’est pas seulement un fragment allégorique invoqué en fonction de besoins (prières individuelles) ou des fêtes saisonnières (rites sociétaux) – c'est-à-dire l’intermédiaire
symbolique par lequel je passe parce que mon cerveau est trop étriqué pour aller de lui-même à la source des choses-. Non ! Ganesh (ici) et tous les autres (partout)
peuvent exister bien plus que cela. Bref, j'ai du mal à exprimer ma foi. Sans doute un reste de mon éducation protestante lourde à digérer (où il est préférable de croire sans comprendre) et du
milieu scientifique (où les croyances mystiques sont souvent synonyme de naïveté) dans lequel j'avolue aujourd'hui. A écouter autour de moi, je ne serai pas un cas isolé. Dans l'immédiat,
solution à mon problème -qui n'était finalement pas si compliqué : recreer des rites au quotidien pour retisser des liens plus sains avec les Divinités.