Critique CinémaFrance ! ! !
Pour sa première réalisation, Stuart Townsend revient sur les émeutes ayant eu lieu au congrès de l'OMC à Seattle en 1999.
En novembre 1999, les médias transmettent des images de la ville de Seattle où des manifestants cassant tout sur leur passage, se livrent à un combat féroce avec les forces de l'ordre. Ça s'est ce que la télévision à bien voulu nous montrer de ces cinq jours d'émeutes qui ont embrasé « la cité d'émeraude ». Qui était ces gens ? Pourquoi se livraient-ils à de telles actions ? Comment en est-on arrivé là ? Des questions dont les journaux se sont bien gardé de répondre, préférant insister sur le spectaculaire des échauffourées, dénaturant ainsi l'action de ces protestants et occultant le vrai fond de l'évènement : les dérives de l'OMC. Cette organisation internationale s'occupant des règles régissant le commerce mondial qui au lieu de pousser ces différents membres à s'entraider, ne fait que repousser à chaque fois les inégalités entre l'hémisphère nord et le sud, privilégiant le libéralisme financier sauvage des entreprises exploitant impunément toutes les ressources ( humaines, naturelles… ) de la planète, sans se soucier des conséquences. Voilà ce que désiraient dénoncer ces altermondialistes, venu exprimer pacifiquement leur voix. Mais entre des anarchistes provocateurs, une police dépassée, des politiques timides et des reporters manipulés, la situation ne pouvait que dégénérer.
Pour son galop d'essai derrière la caméra, le comédien Stuart Townsend ( La Reine des damnés ) n'a pas choisi la facilité : histoires à personnages multiples, sujet politique délicat loin des considérations commerciales des grands studios hollywoodiens… La production de Bataille à Seattle a dû plus ressembler à une altercation avec le système qu'à une marche tranquille. C'est sans doute mieux comme cela.
Eloigné de la pression des pontes californiens, le film bénéficie de comédiens de choix ( Ray Liotta, Michelle Rodriguez, Connie Nielsen, Woody Harrelson, Charlize Theron… ) sans jouer la carte de la séduction du public. En conséquence il évite sagement les raccourcis scénaristiques réducteurs et le manichéisme commode dans ce genre de situation. Si la cible de Bataille à Seattle est ouvertement les gouvernements et ses bandits en col blanc, Towsend ajuste son tir, mettant en évidence les fautes et les responsabilités de chacun dans la dégénérescence du sommet mondialiste ( la crédulité des associations humanitaires, l'idéalisme aveugle des contestataires, la manipulation des journalistes… ). Parfaitement documenté, le réalisateur livre un récit précis et informatif ( l'introduction est d'une efficacité redoutable ) des différents engrenages qui ont menés au chaos total et construit une montée en puissance du drame qu'une mise en scène « caméra à l'épaule » tire vers le haut.
Mais à force de jongler avec plusieurs fronts, Towsend laisse tomber quelques balles (le membre de Médecins sans Frontières, Isaach de Bankolé) délaissées au détriment d'autres peu nécessaires ( le personnage tire larme de Charlize Theron ) . Bataille à Seattle y aurait grandement gagné, tout comme à supprimer quelques dialogues parfois trop didactiques l'empêchant de flirter avec la maestria d'un Bloody Sunday. Enfin, parmi le lot de premières œuvres engagées, on a vu largement pire.