C’est un rituel
dont je ne me lasse pas. Peut-être le billet que je préfère écrire chaque
année. Celui dans lequel je clame toutes les raisons qui m’ont fait aimer le
cinéma au cours de l’année passée. Car il ne s’agit pas seulement de faire la
liste de ses films préférés. Résumer une année de cinéma à dix films, c’est
oublier les centaines d’autres qui sont sortis et que j’ai aimés. C’est oublier
ces instants de cinéma qui valent des dizaines de films, oublier que l’on peut
trouver des moment inoubliables, des acteurs et actrices formidables, des
séquences somptueuses, dans tant d’autres films que les dix, quinze ou vingt
dont tout le monde parle quand décembre arrive et qu’il est temps de se
souvenir d’une année de longs-métrages. La passion du cinéma m’habite trop pour
que je ne vous conte pas tous ces instants de cinéma qui ont fait bondir mon
cœur ou exploser ma joie en 2013. Que les films dans lesquels je les ai vécus
soient les meilleurs ou non. Que l’on risque de s’en souvenir dans cinquante
ans ou non.
Alors, pourquoi ai-je aimé le cinéma en 2013 ?
Parce que Carlos « Elvis » Gutierrez m’a donné des
frissons en jouant et chantant « Unchained Melody ».
Parce que Jonah Hill n’a pas les yeux en face des trous
dans « Django Unchained » et les dents trop blanches dans « Le
Loup de Wolf Street ».
Parce qu’en noir et blanc et muet, Blanche Neige n’a
peut-être que six nains, mais l’un d’eux est un chouette travesti.
Parce que les silences sont éloquents du côté de Kiruna.
Parce que j’ai vu « Voyage au bout de l’enfer »
et « Taxi Driver » sur grand écran, et qu’après cela il est difficile
de se contenter de peu. Surtout venant de Robert De Niro.
Parce que si l’on ne l’y reconnaît pas, James Spader est
tout de même irrésistible dans « Lincoln ».
Parce que j’ai vu le premier film saoudien de l’histoire,
et que ce n’est pas un homme qui l’a réalisé.
Parce que l’accident d’avion est électrisant dans
« Flight ».
Parce qu’Anne Hathaway chante ses rêves au milieu de la
misère.
Parce que j’ai jalousé Jérémie Renier dans
« Elefante Blanco ». Pas pour le col
du prêtre non (qui a deviné que c’était pour les corps-à-corps enflammés
avec la divine Martina Gusman ?).
Parce que même mineur, un film de Terrence Malick reste majeur.
Parce que faire le second couteau continue à aller comme
un gant à Luis Guzman.
Parce que James Franco est probablement l’acteur le plus
dingue du cinéma américain.
Parce qu’il y a un meilleur pote obsédé sexuel hilarant
dans « Les rois du curling ».
Parce que je ne suis pas tout à fait revenu des mondes
dans lesquels « Cloud Atlas » et « Le Congrès » m’ont
propulsé.
Parce que Gerard Butler devrait définitivement arrêter
les comédies romantiques et botter le cul des bad guys plus souvent.
Parce que j’ai encore la mâchoire décrochée par les images de Samsara.
Parce que Steven Soderbergh se transforme mieux en
Hitchcock en réalisant « Effets secondaires » qu’Anthony Hopkins en
se bardant de maquillage.
Parce que j’attendais de voir De Niro dans un rôle et une
performance à la hauteur de ce qu’il a été depuis trop longtemps. Merci David
O. Russell.
Parce que Jonathan Cohen est le second rôle le plus drôle
du cinéma français en ce moment, non ?
Parce que Joseph Kosinski aime décidément l’électro
française et qu’il en tire des choses formidables pour ses beaux films de SF.
Parce que « The Act of Killing » est révoltant
mais nécessaire.
Parce que Stephen Merchant drague les demoiselles
d’honneur de 6 ans et que Rafe Spall commente ses exploits sexuels conjugaux
avec ses beaux-parents.
Parce qu’Emmanuelle Devos reprend le train pour Calais.
Parce que je n’ai pas vu « Turf ».
Parce que Gong Er confesse à Ip Man « Je vous ai tout ce temps porté dans mon cœur »…
Parce que je suis allé voir « What Richard did » presque par hasard.
Parce que Sono Sion sait aussi faire d’excellents films
sans que Megumi Kagurazaka s’y dénude,
même si certains s’en plaindront assurément.
Parce que même quand Michel Gondry rate un film, il fait
rêver.
Parce que Sigur Ros et Syd Matters se font entendre dans
l’autrement raté « Upside Down ».
Parce que Matthew McConaughey n’est définitivement plus
un acteur de comédies romantiques.
Parce que Mama m’a bien fait flipper.
Parce que le distributeur de « Shokuzai » n’a
pas fait l’erreur de celui de « Gangs of Wasseypur » et a sorti les deux films dans la foulée l’un de
l’autre.
Parce que quand Spock court, sa coupe au bol flotte au
vent avec grâce.
Parce qu’il y a des hommes et des femmes qui regardent
« Shining » image par image pour voir si l’affiche de ski ne cache
pas un minotaure.
Parce que les Minions sont capables de sauver un film.
Parce qu’une poignée de personnages qui parlent au bord
d’un lac comme dans « Ma meilleure amie, sa sœur et moi », ça peut
être enthousiasmant à regarder.
Parce qu’on ne voit pas assez Kevin Costner dans « Man of Steel ».
Parce que les répliques fleurs bleues de « L’homme
aux poings de fer » en font presque un nanar sympathique.
Parce qu’un chewing-gum suffit à rendre Scarlett
Johansson vulgaire. Tout en restant sexy.
Parce que le face à face entre Jordan Belfort et l’agent
Denham dure de longues minutes jubilatoires.
Parce qu’il y a un an, je ne connaissais pas Vincent
Macaigne, mais qu’aujourd’hui je n’envisage pas de ne pas aller voir un film au
générique duquel il figurerait.
Parce que Legolas revient dégommer de l’orque.
Parce que Robert Redford n’a besoin que de quelques mots
pour nous scotcher et nous renverser.
Parce qu’Olaf le bonhomme de neige rêve de l’été.
Parce que Sam Rockwell est irrésistible quoi qu’il fasse.
Parce que même mineur, un film de James Gray reste
majeur.
Parce que je n’avais jamais vraiment apprécié Emmanuelle
Seigner jusqu’à ce que je la voie dans « La Vénus à la fourrure ».
Parce que je n’ai pas pu retenir mes larmes devant
« Il était temps ».
Parce que j’entends encore chanter Llewyn Davis, quelque
part dans un coin de Greenwich Village.
Parce que « La Stratégie Ender » est à la fois
le film le plus étrange, le plus culotté et le plus raté qu’ait produit
Hollywood cette année.
Parce que ça faisait longtemps que Thierry Lhermitte ne
m’avait pas fait autant rire. Merci Bertrand Tavernier.
Parce que même mineur, un film de Bong Joon-ho
reste majeur.
Parce que je n’ai plus besoin de faire le rêve d’être un
astronaute. J’en fus un pendant 1h36 grâce à Alfonso Cuaron.
Parce que « Lettre à Momo » a fait souffler un
vent d’émotion dans la salle.
Parce que je savais qu’un jour, David Gordon Green mixerait
à la perfection l’humour de ses buddy movies et la délicatesse de ses drames naturalistes.
Parce que je ne m’étais pas retrouvé en retard et au
premier rang depuis des années. Mais que ça ne m’a pas empêché d’apprécier
« Omar ».
Parce que j’ai redécouvert le plaisir d’aller au cinéma
le matin le weekend pour ne pas avoir à me battre avec les spectateurs qui
parlent pendant le film. Surtout les spectateurs de films d’horreur.
Parce qu’il y a un beau plaisir enfantin à découvrir la
traversée des États-Unis filmée par Jean-Pierre Jeunet.
Parce que le Louxor a rouvert ses portes.
Parce que j’ai aimé un film d’Arnaud Desplechin. Et ça ne
m’étais jamais arrivé.
Parce que les reprises de Robert Charlebois et… Niagara
me trottent encore dans la tête bien après avoir vu « Gabrielle ».
Parce que 2013 était une fois n’est pas coutume un bon
cru pour Hong Sang-soo.
Parce que le dernier plan de « Prisoners » ne
me quitte pas.
Parce que j’ai aimé un film d’Abdellatif Kechiche. Et bah
ça aussi je crois bien que ça ne m’était jamais arrivé.
Parce que le Festival du Film Coréen à Paris s’est installé au Publicis, et que Plastic
Man était assis au premier rang presque tous les jours.
Parce que Daniel Brühl était parfait en Nikki Lauda.
Parce que je ne pourrai plus entendre la magnifique
chanson de Dead Man’s Bones sans imaginer Laëtitia Dosch roulant à scooter dans
les rues de Paris.
Parce que « Les Miller, une famille en herbe » et
« C’est la fin » m’ont fait hurler de rire. Littéralement.
Parce que « The Conjuring » aussi ça m’a bien
fait flipper.
Parce que « Oh Boy » m’a pris par surprise et
m’a rendu à fleur de peau sur la fin.
Parce qu’un film a rarement aussi bien porté son titre que la balade sous le cercle Arctique qu’est « La Grâce ».
Parce que j’ai déjà vu « Ugly », « Blue
Ruin », « On the job », et d’autres excellents films de 2014.
Parce que j’ai lancé des petites cuillères sur l'écran de cinéma du Nouveau Latina.
Parce que j’ai vu Tony Leung Chiu Wai s’approcher
de Faye Wong à son comptoir et retirer sa casquette au son de « California
Dreamin’ » des Mammas & Pappas. Avec quelques années de retard...
Parce que je n’ai pas dérogé à la traditionnelle journée
du Ninja à Panic Cinéma.
Parce que personne ne le sait, mais le film d’horreur
« You’re next » est génial.
Parce que j’ai enfin vu sur grand écran « Vacances
Romaines », « As tears go by », « L’ultimatum des trois mercenaires », « Une place
au soleil », « Les sept samouraïs », « Un, deux,
trois », « La Belle et la Bête »…
Parce que j’ai découvert Maud Wyler et Nimrat Kaur, et j’espère qu’elles continueront à faire battre mon cœur sur grand écran dans
les années à venir.
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