Je vous avais fait part de ma surprise en découvrant la tour de la maison De Castellane, au bout de cette fabuleuse Avenue de Champagne, au numéro 68, que j'ai aperçue vendredi soir illuminée dans le cadre de la manifestation Habits de lumière.
C'est en 1895 que le Vicomte Florens De Castellane construit sa Maison de champagne à Epernay.
Elle dispose de 9 kilomètres de caves et de bâtiments surmontés de cette tour, haute de 66 mètres, qui font désormais partie du patrimoine historique.
On raconte, mais je ne l'ai pas expérimenté, que la Tour De Castellane offre, après avoir gravi ses 237 marches, un panorama exceptionnel sur Epernay et sur les vignes de la vallée de la Marne.
Composé d’un harmonieux équilibre de briques rouges, de balustres en pierres de taille, de sculptures et décorations en émail, l’ensemble des bâtiments constituent une œuvre caractéristique de son époque, d'allure presque baroque aujourd'hui.
Il est possible que la visite que j'ai faite fut spéciale, puisque inscrite dans le cadre des habits de lumière. Vous trouverez tous les renseignements utiles pour préparer la vôtre sur le site de la maison.
En tout cas les caves d'Epernay n'ont rien à voir avec ce que l'on connait par ailleurs. C'est même un choc comparativement aux chais de calvados que j'ai visités cet été.
Elles se trouvent de part et d'autre de l'Avenue de Champagne. Contrairement à d'autres régions qui ont investi des caves existantes comme on l'a fait à Reims dans des crayères gallo-romaines désaffectées, l'homme a ici creusé un total de 110 kilomètres de galeries sous-terraines, contre 130 de voirie, ... histoire d'avoir un point de comparaison. Elles ne sont donc pas "très" anciennes. Moët fut le premier à oser creuser dans un immense terrain vague crayeux en 1743. Ce sont d'ailleurs les plus grandes avec presque une trentaine de kilomètres de galeries.
Pour De Castellane il fallut attendre un siècle de plus. Installée de l'autre coté de l'Avenue, en contrebas, la maison avait l'énorme avantage de bénéficier du chemin de fer mais la proximité de la Marne rendait les percements difficiles. Ce fut le même contexte pour Mercier dont les quais étaient de plain pied avec l'Orient Express.
Situées sous 10 à 30 mètres de sol calcaire, elles s'étendent sur
18 km chez Mercier, 28 chez Moët ... et seulement6 km chez De Castellane. Cela semble peu. Et pourtant tout m'a semblé démesuré chez eux. Peut-être parce que j'ai commencé par là.La visite s'effectue à pieds (en train chez Mercier). C'est l'occasion d'apprendre le processus de fabrication du célèbre breuvage. De comprendre les anciens modes de conservation ... jusqu'aux plus actuels. Le plus surprenant pour le néophyte c'est que tout se joue dans la bouteille (et non dans le tonneau). Or rien ne ressemble plus à une bouteille qu'une autre bouteille. Il n'y a aucun parfum résiduel dans l'air. Ce n'est pas dans une cave à champagne qu'on humera la part des anges !
Ici les bouteilles vieillissent au minimum trois ans sur lattes, et non pas 15 mois comme la réglementation l'impose. On ne parlera de millésime qu'après au moins 6-7 ans. Les bouteilles les plus anciennes sont de 1915, conservées dans l'oenothèque, derrières des portes cadenassées.
La plus remarquable est sans doute Nicole Clicquot, plus connue sous le nom de Veuve Clicquot, généralement représentée âgée, alors que lorsqu'elle prend la succession de son mari elle n'a que 27 ans. On lui doit des inventions capitales comme la table de remuage sur, dit-on, sa table de cuisine en 1864 qui alors n'était pas encore inclinée à 35°.
Les opérations de remuage s'organisent trois ou quatre mois avant la date prévisible de commercialisation. Elles consistent à rassembler le dépôt constitué par les lies inactives et à les faire migrer vers le col de la bouteille au contact du bidule (l'opercule conçu pour récupérer les lies).
Dans un premier temps les bouteilles sont inclinées à 35° environ sur un chevalet en chêne, ou pupitre (voir photo un peu plus haut), constitué de deux faces planes assemblées par des charnières à leur sommet. Chaque face est percée de six trous taillés en biseaux sur dix rangées soit 120 bouteilles.
En les tenant par le fond, le remueur imprime aux bouteilles un mouvement bref et sec de rotation sur elles-mêmes de 1/8e, 1/6e, ou 1/4 de tour, tantôt à gauche tantôt à droite. Il s'agit de décoller le dépôt alourdi par les adjuvants de remuage de la paroi du verre et favoriser son déplacement vers le col, sur la face interne du bouchon (ou bidule), sans le remettre en suspension (un repère à la peinture blanche lui facilite l'opération). Au fil des semaines, il les redresse peu à peu, pour les amener à la verticale, tête en bas, dans la position dite sur pointe.
Un "bon" remueur manipule 40 000 bouteilles par jour, mais il n'est pas exceptionnel de monter à 70 000, d'où l'intérêt des gyropalettes, inventés en 1975, qui effectuent ce travail mécaniquement.
La visite se termine par les dernières opérations précédant l'expédition. Le dégorgement (opération consistant à expulser le dépôt) a laissé dans la bouteille un vide qu'il faudra combler. De plus, l'acidité naturelle du vin et du gaz carbonique étant élevée, il est nécessaire d'édulcorer le contenu, selon que l'on désire obtenir un vin "extra-brut", "brut nature", "brut", "extra-dry", "sec", "demi-sec", ou "doux".
C'est le rôle que va jouer ce qu'on appelle la "liqueur d'expédition" (ou "liqueur de dosage") qui n'est autre qu'un mélange de sucre de canne très pur et de vieux vins de Champagne adapté à chaque cuvée.
On y voit moult déclinaisons de la célèbre étiquette à la croix rouge de Saint-André.
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