La République des Enfants

Publié le 30 décembre 2013 par Copeau @Contrepoints
Publié Par h16, le 30 décembre 2013 dans Édito

La fin du mois de décembre et le début de janvier sont généralement dédiés à la famille et aux enfants. Ces derniers, avec Noël, les étrennes et, en début d’année, le tirage des rois, sont à l’honneur, et l’objet de petites et grandes attentions. Et ça tombe bien, nous allons en parler puisque ce petit billet est l’occasion d’évoquer, une fois encore, les politiciens.

Car c’est bien d’enfants qu’il s’agit ici si l’on devait juger les politiciens moyens non aux intentions qui les animent et aux discours dont ils nous abreuvent, mais aux actes qu’ils commettent et aux résultats qu’ils obtiennent. Bien sûr, je pourrais ici profiter de cette fin d’année pour passer en revue ces principaux faits saillants et montrer la puérilité de nos hommes et femmes de pouvoir. Mais l’exercice pourrait être assez long, tant cette année n’a pas dérogé à la règle générale d’une habituelle avalanche de billevesées.

Je me contenterai donc, en bon feignant, des derniers faits que l’actualité nous offre dans son foisonnement habituel.

Par exemple, comment ne pas trouver particulièrement puéril le déni compact et obstiné de toute réalité de François Hollande devant les chiffres catastrophiques du chômage ? La semaine écoulée, le Président de la République s’est entêté à nier l’évidence, parfaite représentation d’un enfant pris dans la nasse serrée de ses propres mensonges. Pourtant, la réalité est là, indubitable : le chômage continue de croître.

Par exemple, comment ne pas trouver enfantin les changements d’envies, d’opinions et de méthodes que le gouvernement espère nous faire croire pensés ? À la suite des contorsions statistiques rigolotes de Hollande sur le chômage, il était particulièrement savoureux de voir Ayrault lui emboîter le pas, pas gêné le moins du monde de mettre en pratique les mêmes méthodes douteuses que ses prédécesseurs de l’opposition quelques années plus tôt, méthodes qu’il avait bien entendu fustigées avec ce petit sens de l’a-propos que seul un enfant ne voyant pas plus loin que le bout de son nez est capable d’avoir dans de telles situations. Rappelez-vous, en effet, ce que le même Ayrault déclarait, au sujet des chiffres du chômage, lorsque Sarkozy était encore président :

Alors qu’il y a quelques générations, il était techniquement et politiquement bien plus complexe de renvoyer aux auteurs leurs petites phrases assassines par un effet boomerang bien dosé, la médiocrité de l’actuelle génération de politiciens, doublée de la mémoire Internet inaltérable, provoque maintenant du LOL à pas cher et, pour l’observateur extérieur avec un tant soit peu de recul, une bonne dose d’effarement. Tout comme des enfants trop jeunes pour comprendre, les politiciens ne connaissent pas la honte et ne sont jamais embarrassés de présenter leurs pires turpitudes à la face du monde tant que cela peut faire braquer les projecteurs sur leur petite personne.

Et on pourrait croire qu’il s’agit d’un jeu de massacre réservé à l’actuelle majorité. Il n’en est rien : les gamineries et la puérilité de la droite sont exactement semblables. On pourrait s’attarder à loisir sur les déchirements ridicules du parti entre Fillon et Copé en début d’année, mais là encore, même en se cantonnant à la semaine passée, il ne faut pas très longtemps pour constater les mêmes défauts, les mêmes façons d’agir à droite et à gauche.

Par exemple, la récente affaire qui secoue Aix-en-Provence et qui a conduit la maire, Maryse Joissains-Massini, en garde-à-vue pendant 24h, illustre très bien les délires et autres fariboles consternantes auxquels les élus recourent sans sourciller pour camoufler l’indigence de leur gestion ou les malversations dans lesquelles ils trempent avec décontraction. Tout comme des gamins qui n’hésiteraient pas à invoquer la malencontreuse présence d’extra-terrestres ou une maladie imaginaire pour expliquer leurs absences ou leurs comportements incongrus, malpolis ou délictueux, la maire en appelle aux heures les plus occupées de notre Histoire, sans imaginer une seule seconde que les détournements de fonds et autres bidouillages politiques locaux justifient largement qu’on s’en prenne à elle.

Et plus largement, l’année écoulée montre à quel point la politique est devenue une affaire de pulsions, d’envies erratiques dignes de gamins excentriques et mal policés, pour qui les événements doivent plier. L’absence brouillonne et totale de toute priorité mise à gérer l’actualité, le fait — très bien relevé par Daniel Tourre — qu’un président s’abaisse sur le cas particulier de Léonarda, déjà réglé par la justice de son peuple et en son nom, montre le besoin compulsif d’occuper les esprits avec ses petites manoeuvres politiciennes. Plus récemment, le ministre de l’Intérieur a réitéré la même pirouette médiatique avec un humoriste, de la même façon qu’un enfant accorde subitement une importance démesurée à un ours en peluche, un petit animal en cage ou un objet sur lequel il fera un transfert d’attention ou d’affection, pour éviter consciencieusement de tenir compte des remarques désagréables de ses parents.

Non, vraiment, les politiciens ne sont pas des adultes : ils ont les comportements d’enfants, les réactions d’enfants, les pulsions d’enfants, la moralité embryonnaire (voire inexistante) des jeunes enfants, et les jeux et les occupations d’enfants. Par leur recherche continue du pouvoir et des honneurs, ils ont besoin de trouver (ou de retrouver) l’admiration qui leur a peut-être manqué lorsqu’ils étaient plus jeunes. De nos jours, rares en effet sont ceux qui sont entrés dans la carrière politique avec le désir sincère d’aider la collectivité et le pays ; chez beaucoup d’entre eux, le militant politique a poussé très vite et très tôt comme un calcul bien compris permettant d’optimiser la quantité de travail avant l’obtention d’une rente dodue et pas trop pénible à percevoir.

Et bien qu’ils se croient animés de saines motivations, derrière cette solidarité dont ils se gargarisent afin d’en enduire les discours qui sortiront de leur bouche, ils ne font aucune espèce d’effort pour comprendre que, l’enfer étant pavé de bonnes intentions, chacune des actions qu’ils entreprennent apporte son lot d’effets pervers ; l’absence d’analyse et la fuite en avant ne les poussent jamais qu’à ajouter encore des dispositifs pour pallier les problèmes qu’ils ont eux-mêmes créés. Enfants n’ayant jamais connu l’humilité, ils sont persuadés d’avoir une solution pour tout. Ils sont certains qu’ils pourront contrôler, réguler, diriger, là où l’Histoire et la logique ne montrent qu’échecs, indécisions, passions catastrophiques et effets délétères.

Dans le meilleur des cas, les politiciens que nous subissons sont des adulescents, adultes biologiques à la maturité d’enfants à peine pubères dont les tâtonnements psychologiques et moraux se traduisent par des errements aussi coûteux financièrement que socialement. Hollande et sa clique n’échappent bien sûr pas à la règle, eux dont les costumes camouflent très mal leurs lourdes casseroles. Et bien sûr, comme des enfants-rois au pouvoir qui n’ont de compte à rendre à personne, ils n’ont donc absolument rien à faire de la réalité ou des grognements de ceux qui les ont mis là.

Ce constat fait, il en vient naturellement un autre : qui les a mis là, sinon un peuple majoritairement immature ?

Un peuple immature mené par des enfants… Pas de doute, ce pays est foutu.


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