Hier soir, j'ai terminé mon année "compétitive" en participant à la corrida des tanneurs, dans les rues du village de Lavausseau, à 25 kilomètres de Poitiers. Cette course, qui en était à sa 9e édition, est une corrida de fin d'année dans la plus pure tradition: un petit circuit en boucle plein de bosses et de relances, 7.1 kilomètres à tournicoter et à s'époumoner dans les ruelles de ce joli village posé dans la forêt de Vouillé, à la nuit tombée. Je n'avais absolument pas prévu d'y aller mais quand mon ami Widy Grego avec qui je faisais un footing la veille à Poitiers me l'a proposé, j'ai tout de suite dit oui. Une bonne façon de finir mon année de course à pied, et un vrai petit test aussi: j'ai certes retrouvé une vraie forme de coureur ces derniers temps, grâce à ma Via Francigena surtout, et j'ai envie de courir. Mais je n'ai absolument aucun travail de vitesse. Trottiner à bonne allure, entre 10 et 12 kilomètre heure, pendant de très longues heures, est certes extraordinaire pour construire une endurance et développer une "caisse" aérobie à toute épreuve ou presque, mais essayer de courir le plus vite possible sur un tourniquet de sept kilomètres, c'est autre chose.
Je n'ai plus couru sur une distance aussi courte sur route depuis des lustres, une dizaine d'année je pense, même si mon dernier dix kilomètre doit dater de 2007 et mon dernier semi-marathon de 2009... quant à ma dernière séance de fractionné réelle, elle doit bien remonter à six ou sept ans aussi. Bref, c'est un vrai petit challenge qui m'attend!
Nous arrivons, Jackye, Widy et moi, une petite heure avant le départ. Tout est en place, le temps menaçant a l'air de se maintenir sans pluie, nous retrouvons pas mal d'amis (Widy est connu comme le loup blanc ici et je commence à connaître pas mal de coureurs poitevins tout de même) également venu s'ébrouer entre les fêtes, notamment Alexandre qui était avec nous à Tafraout, au début de l'année. Nous faisons un petit tour d'échauffement, pour repérer les lieux et chauffer nos muscles: c'est que nous avons dans l'idée d'y aller à fond et donc de vite monter dans les tours!
Je retrouve avec un certain plaisir l'ambiance de ces petites courses qui font aussi la course à pied. Henri, l'organisateur, me confiera plus tard que ce type d'organisation est de plus en plus menacé par les règlements et obligations, comme celle d'avoir une ambulance, qui augmentent de façon drastique le coût des manifestations. A ce rythme là, les courses de villages, de passionnés, sans gros sponsors et sans gros moyens, les "pas pour le fric" risquent bien de connaître des difficultés, et avec elles s'en aller tout une culture de la course vraiment populaire. Mais bon, pour l'instant nous sommes tout de même 226 à nous placer sur la ligne de départ un peu étroite, avec un arbre trente mètre devant et un virage à droite tout de suite après. Quelques athlètes, affûtés et prêts à en découdre, se placent.
Boum, au coup de sifflet, la meute s'ébroue. On démarre en côte et je retrouve d'instinct mes réflexes de compétiteur sur ce genre de distance. Je me place et j'ai très vite envie de me porter en tête et d'accélérer...le soucis c'est que mes jambes, elles, ne partagent pas vraiment ce point de vue et ne sont vraiment plus habituées à tourner aussi vite. J'essaie donc, mais je dois vite me résoudre à un rythme un peu plus doux. Je me maintiens donc vers la 7/8e place et m'accroche. Le parcours est vraiment nerveux: deux demi-tour complet, des bosses, pas longues mais qui créent un changement de rythme, des virages serrés. Pas vraiment roulant mais plutôt éprouvant. Je suis en bonne forme, je pense, mais j'ai vraiment du mal à coordonner mes jambes avec mon souffle. Parfois, sur une centaine de mètre, je parviens à relancer, et à rattraper les deux coureurs qui caracolent devant moi, mais dès que je dépasse un certain rythme, je suis rappeler à l'ordre par mes mollets ou par mes poumons... et je dois ralentir un peu sous peine d'exploser complètement.
La boucle fait 1.7 kilomètres et nous devons donc effectuer quatre tours; les deux premiers se passent plutôt bien quand même, mais je cale un peu au troisième. J'ai rattrapé un coureur, mais deux me passent. Bon, ce sont tout de même des coureurs typés "club d'athlé" qui doivent encore fractionné à qui mieux mieux...mais bon, je me reprends vite au jeu et je suis bien décidé à y aller à fond ou presque, donc je tente de relancer dans le dernier tour, surtout pour ne pas non plus me faire encore doubler... Et justement, dans la zone la moins éclairée du parcours, je sens le coureur avec qui je fais un gentil chassé-croisé depuis quelques temps revenir sur moi... mais pour le coup je retrouve un peu mes réflexes de coureur de demi-fond et parviens quand même à plus ou moins sprinter dans les 400 derniers mètres pour conserver ma place, 7e au final... Mon temps, 26'42'', n'est pas bien terrible mais enfin, je me suis plutôt fait plaisir. Le temps de retrouver Widy, qui termine une petite minute derrière, Alexandre, Jackye et Lova, la compagne d'Alex, et nous filons dans la salle pour dîner en compagnie des autres coureurs, pour un fin de soirée bien conviviale.
J'ai les mollets en feu mais cette dernière trotte de l'année m'a plutôt donné le sourire. C'est de la course à pied, tout simplement, et c'est bien agréable aussi de ne penser qu'à courir le plus vite possible...