La candidate socialiste aux municipales parisiennes de 2014, Anne Hidalgo / REUTERS/GONZALO FUENTES
Dans les hautes sphères du pouvoir, on parle beaucoup d’Anne Hidalgo, créature politique dauphine imaginée par Bertrand Delanoë, créature politique valorisée par François Hollande. Mais que sait-on d’elle précisément ? (Le) Quotidien Libre a mené l’enquête. Portrait.En campagne pour les élections municipales en mars prochain, lors de laquelle elle essaiera de succéder au maire socialiste Bertrand Delanoë, l’ambitieuse Anne Hidalgo se dispense bien de dévoiler quelques vérités. Née le 19 juin 1959 à San Fernando (Espagne), près de Cadix, Anne Hidalgo est la fille d’Antonio (électricien) et de Maria Aleu, (couturière). On lit souvent ici et là que ses parents étaient républicains espagnols refugiés en France après la guerre civile, mais rien n’est plus faux. En réalité, c’est le grand-père d’Anne, intendant d’un vaste domaine dans la province de Cadix, qui s’installa avec sa famille en France, dès 1937. Selon un article de VSD (non daté, ne figurant plus sur le site de la candidate. Il s’agit de l’unique article détaillé jamais paru sur sa famille en français) : "En 1937, pour échapper à la montée des troupes fascistes, le grand-père paternel, républicain, traverse les Pyrénées à dos de mulet avec sa famille". Etrange pour ce républicain venu de l’extrême sud de l’Espagne, alors même que toute la partie Est du pays est encore sous contrôle. La guerre civile avait commencé en juillet 1936 pour s’achevée en avril 1939. Son grand-père était certes républicain, mais faussement combattant républicain de premier plan ayant réellement lutté contre le mouvement fasciste. Une preuve manifeste révèle que la famille s’était réinstallée à Antequerra en Espagne dés la fin de la guerre, en 1939. VSDindique sans autre détail ; "sa femme ne survit pas, tout comme la petite dernière. Il est emprisonné durant trois ans. Le père d’Anne a dix ans." Vrai si ce n’est que la grand-mère d’Anne Hidalgo meurt durant le voyage de retour et nullement, comme on a pu le croire, de sévices infligés par les franquistes.
A 17 ans, Antonio Hidalgo s’engage, comme électricien, dans la marine marchande. VSD, qui fait alors "pleurer Margot" indique : "J’ai longtemps été considéré comme un fils de rouge, mais je n’acceptais pas, je me rebellais". Sans mauvais esprit, on doit conclure qu’Antonio refusait d’être considéré comme tel. Dans les années 1950, il se marie et s’installe à San Fernando, près de Cadix, là où naîtra Anne. Il travaille pour les chantiers navals alors que son frère s’est installé près de Lyon. La famille Hidalgo (les parents, Mary, l’ainée, passée par l’école supérieure de commerce de Lyon, qui dirige un magasin de jouets en Californie, et Anne, qui a deux ans) quitte alors l’Espagne pour s’installer dans une cité HLM du 9ème arrondissement de Lyon. En 1970, ils optent pour la bi-nationalité. Une histoire au final très classique d’immigrés espagnols venus chercher le confort en France, qu’Anne Hidalgo dramatisera dans son bouquin Une femme dans l’arène(éd. Rocher), n’hésitant pas à citer ses parents comme des "républicains convaincus" qui ont fui le franquisme pour s’installer à La Duchère en banlieue lyonnaise (France-Soir, 16 oct. 2006). Etrange fuite après plus de vingt ans en Espagne : El Pais est bien plus près de la réalité en indiquant que "les problèmes socio-économiques, conséquence du plan de stabilisation de 1959, ont conduit Antonio Hidalgo à franchir à nouveau la nouvelle frontière française."
A Lyon, le père, devenu contremaître chez Electrifil (il y restera 22 ans), milite pour FO. VSDajoute qu’il "écume les meetings avec Gérard Collomb, actuel maire de Lyon". Possible, mais ce ne peut qu’être tardif, Collomb étant né en 1947 est âgé de quinze ans de moins qu’Antonio.
Fille studieuse et brillante, Anne Hidalgo étudie à l’école Audrey Hepburn, le lycée Jean Perrin de Lyon et la Fac Lyon III. Elle y décroche une maîtrise de sciences sociales du travail et obtient ensuite un DEA de droit social et syndical à Nanterre. En 1982, elle réussit le concours d’inspecteur du travail, devient stagiaire dans la Loire, obtient son premier poste (Paris Val-de-Marne) en 1984 et déménage alors dans le 15èmeparisien. C’est dans cet arrondissement qu’elle se mariera avec un militant socialiste très actif, a qui elle donnera deux enfants. Elle en divorcera par la suite, au cours de son ascension.Responsable CFDT, elle sera promue chargée de mission à la division "synthèse" de la délégation à l’emploi, puis responsable de l’Institut National de l’Emploi et de la Formation (1991-1993), à Montrouge, en charge de la formation des inspecteurs du travail. En décembre 1993, elle deviendra chef de mission auprès du délégué à la formation professionnelle, en charge de la concertation avec les partenaires sociaux, puis chef de mission (1995) à la délégation à la formation professionnelle du ministère du Travail, en poste au Bureau international du travail, à Genève.
Ici se situe un épisode qu’elle n’aime pas vraiment évoquée : elle travaille brusquement dans le privé, se faisant détacher auprès de la Compagnie Générale des Eaux, comme chargée de mission auprès du directeur des ressources humaines Olivier Halpern (juillet 1996 – août 1997). Elle y aurait notamment signé un accord sur les 35h avant même le vote de la loi Aubry.
Au retour de la gauche au pouvoir, elle entre comme conseiller technique dans son premier cabinet ministériel, celui de Martine Aubry, ministre du Travail et de la Solidarité (1997 - 1998), qui avait également longtemps milité à la CFDT. Elle officiera ensuite, comme directeur adjoint, au cabinet de Nicole Pérey, secrétaire d’Etat aux Droits des femmes et à la Formation professionnelle (1998 - 2000), et, enfin, comme conseiller technique, au cabinet de Marylise Lebranchu, Garde des Sceaux (2000 - 2002). Dans la foulée, en 1999, elle se retrouve propulsée directeur du travail.
Engagée en politique dés le lycée (selon Actualité juive, 6 juin 2002), elle milite d’abord dans les mouvements féministes, un engagement sur lequel elle reste très discrète, ainsi qu’à la Ligue des droits de l’homme à partir de 1987. Elle n’a rejoint le Parti socialiste qu’en 1994.
Une ascension météoritique - en 1997, on lui propose d’être candidate contre Edouard Balladur dans le 15ème arrondissement, mais elle ne se sent pas prête. Elle entre au secrétariat national en 2000, en charge de la formation professionnelle (puis, par la suite, également du droit des femmes) et au bureau national en 2003. Au congrès de Dijon, elle obtient l’important secrétariat national à la culture, ayant chaudement soutenu son protecteur François Hollande. Mais dés 2002, à Paris, sans jamais avoir été une seule fois candidate, cette proche de notre actuel président de la République obtient la tête de liste socialiste dans le 15ème, étant préférée à Pervenche Bérès (pourtant député européen et bénéficiant de l’appui de Jack Lang). En mars 2001, elle est battue au second tour (41,12%), par la liste UMP d’Edouard Balladur/René Galy-Dejean, mais obtient, nouvelle surprise (parité oblige même si d’autres étaient beaucoup plus « titrés »), le poste de premier adjoint de Bertrand Delanoë, avec des fonctions curieusement subalternes : le bureau du temps (pour accorder les horaires municipaux à ceux des parisiens) et l’égalité homme-femme. C’est elle qui assurera l’intérim de maire de Paris lorsque Bertrand Delanoë sera gravement blessé par un déséquilibré.
En 2002, lors de la campagne présidentielle de Lionel Jospin, elle devient porte-parole pour les questions d’éducation. En juin 2002, elle est candidate aux élections législatives dans la 12ème circonscription de Paris, étant battue (29,6%) dés le premier tour par Balladur. En 2004, après un accord avec Les Verts, nouvelle surprise, en qualité de simple élue municipale, elle obtient la conduite des listes de gauche à Paris aux élections régionales, ayant été (une fois de plus) préférée à la première vice-présidente sortante de la région Ile-de-France Marie Pierre de la Gontrie (déjà tête de liste à Paris en 1998, proche de DSK et soutenue par Jean-Paul Huchon). Une place promise de longue date à Madame de la Gontrie. Elle obtient 50,5% des voix. Une fois de plus en 2010, elle totalise plus de 58%. Au conseil régional, elle préside, de 2004 à 2010, le Centre régional d’information et de prévention du sida.En 2007, après avoir envisagé de s’implanter à Toulouse, dans le 12ème et 20èmearrondissement de paris, elle est a nouveau battue (43,26%) aux élections législatives, cette fois dans la 13ème circonscription, par Jean-François Lamour (UMP). En 2008, elle est encore battue aux élections municipales, mais totalise tout de même 47,35% des voix. Elle lance alors son propre club, l’Argument public avec Stéphane Pellet.
Anne Hidalgo dispose de très solides appuis au Parti socialiste. Dans quelques mois, Paris changera de maire, Bertrand Delanoë ne souhaitant pas briguer un nouveau mandat. Déjà positionnée pour prendre la relève, elle espère convaincre les électeurs parisiens de ses engagements. Un peu d’honnêteté intellectuelle devrait être nécessaire, transparence oblige.FG