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Comme chacun le sait, Occupation et secrets de famille font bon ménage ; après Grimbert (Un secret) ou Grémillon (Le confident), Romain Slocombe le montre à son tour plaisamment.
Monsieur le commandant prend la forme d'une longue lettre, de dénonciation, de confession, de demande d'absolution, presque. Son auteur : Paul-Jean Husson, un écrivain de droite, reconnu et établi, antirépublicain, antisémite, académicien, tombe sous le charme de sa belle-fille, une actrice allemande, dès que son fils la présente à la famille. Ce qui était une sympathie presque paternelle prend pourtant un tour radicalement différent avec la guerre, et la panique de l'exode joue comme le catalyseur d'une passion aussi intense que fugace.
Digne d'un drame grec, le petit roman de Slocombe se lit avec plaisir. Le narrateur, un type réactionnaire au dernier degré, peu recommandable et qu'on aime détester, tout comme la belle-fille, moins nunuche qu'elle n'en a l'air, composent un couple étrange dont le portrait donne du relief à cette histoire sordide. Le bouquin, documenté (peut-être un peu trop ...), reconstitue l'ambiance délétère de toute une partie de l'entre-deux-guerres, et on lui pardonne aisément quelques effets de manche pas toujours utile dans a construction du récent ou dans la forme. La réflexion sur l'aveuglement idéologique de certains intellectuels des années 1930 est même plutôt bien menée.
Romanesque, prenant et distrayant. Et le pire, c'est que ça pourrait bien être vrai.